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 Une langue impressionniste

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MessageSujet: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyVen 9 Déc 2011 - 4:02

Bonjour à tous !

Comme indiqué dans mon message de présentation, je me suis inscrit sur ce forum principalement dans le but d'avancer dans la création d'une langue construite à visée philosophique et poétique. Je vais tenter de vous exposer ici l'avancée de mon projet et de répondre à vos participations, que je sollicite humblement ! N'hésitez pas à m'indiquer les problèmes qui vous semblent apparaître, à me donner des conseils, etc ; nous sommes là pour ça. J'espère que mes idées sauront susciter votre intérêt !



Une langue impressionniste
(Nom encore à définir)


I) Le projet

Vous l'aurez compris, il s'agit d'un projet double : d'une part expérimental, d'autre part artistique (et ici, j'emploie sciemment vos termes de classification des idéolangues). La partie expérimentale prime cependant sur la partie artistique, mon objectif principal n'étant pas de créer la langue d'un peuple imaginaire mais de manifester, exprimer et supporter certaines de mes idées philosophiques. Ici, il va donc s'avérer nécessaire que je vous expose ma philosophie dans ses grandes lignes.

L'idée initiatrice du projet est celle selon laquelle un langage structure toujours la manière de penser de ses locuteurs. J'adhère réellement à la pensée selon laquelle l'influence du langage sur la conception du monde des êtres humains est extrêmement importante, non-seulement d'un point de vue structurel (logique), mais aussi et surtout d'un point de vue fondamental, à un tel point que certaines des idées des plus grands philosophes leur ont été en partie dictées par leur langue.

Prenons un exemple simple. Les langues indoeuropéennes ont souvent parmi leurs auxiliaires le verbe Être ; en conséquence, pour les grecs de l'Antiquité et les occidentaux modernes, la question de l'existence des choses est fondamentale, non seulement dans le conscient, mais aussi et surtout dans l'inconscient. Heidegger et Nietzsche l'ont dit bien mieux que moi : il y a un capital a priori dans la vision du monde des occidentaux (mais c'est sans doute le cas pour toutes les cultures, sous des aspects différents). Dans certaines langues africaines, aucun mot n'exprime précisément la notion de notre verbe "être", si bien que leurs locuteurs naturels ont un mode de pensée essentiellement différent du notre.

Mais, dans le cadre de ce projet, l'a priori que je critique le plus n'est pas celui imposé par le verbe être mais celui imposé par la grammaire elle-même. Pour le comprendre, il faut d'abord acquérir un regard d'ensemble sur ma philosophie (qui, à terme, devra devenir naturelle pour les locuteurs de ma langue). Ma conception du monde se résume par les affirmations suivantes :
- Toute connaissance de la réalité est impossible. Toute certitude est irrationnelle. (J'essaierai de ne pas trop argumenter là dessus ici, car on pourrait y passer des heures ; admettez-le simplement comme un principe de base. Ma pensée est un nouveau scepticisme.)
- Le monde est essentiellement complexe, essentiellement flou, confus, à la limite de l'incompréhensible.
- Nous n'avons pas accès à la vérité. La seule chose à laquelle nous avons un accès direct est la perception. Même la pensée est avant toute chose perception : lorsque quelque chose me semble évident, je n'ai en fait que la perception d'une évidence ; et ainsi, il est impossible de nous appuyer sur la logique pour déduire quoi que ce soit des perceptions : c'est par la perception que nous avons accès à la logique. (Il s'agit du problème épistémologique de l'Induction.)
- Ainsi, une redéfinition de la perception et de la pensée s'impose. La perception, je la définis comme tout ce à quoi nous avons directement accès. Ceci inclue bien sûr les sens physiques tels que nous les voyons habituellement, mais aussi leur partie intellective (lorsque j'ai une image en tête ou lorsque je rêve à la manière d'un film, je perçois bien une image ; ma perception est de nature visuelle, même si nous avons été habitués à croire que la vue ne concerne que les objets matériels et la lumière qui les lie à nos yeux. Ici, les sens ne sont plus nos organes sensoriels, mais plutôt les fonctions sensorielles de notre cerveau).
- En outre, nous disposons de sens supplémentaires que nous ne sommes pas habitués à considérer comme tels : la pensée pure en est un (lorsque je conçois un concept d'une manière qui dépasse à la fois la pensée auditive, c'est-à-dire les mots que j'entends lorsque je pense, et la pensée visuelle, c'est-à-dire les images que je vois lorsque je pense, eh bien je perçois quelque chose par un sens qui n'est ni la vue ni l'ouïe), l'émotion en est un autre (lorsque je ressens de l'amour, ou de la colère, ou de la joie, je peux, certes, avoir des sensations de nature physique, mais j'ai également des sensations n'appartenant à aucun des sens conventionnels). Ainsi, nous redéfinissons la pensée comme l'une des capacités sensorielles du sujet pensant, bien qu'il existe peut-être (mais cela, nous l'ignorons) une autre faculté bel et bien rationnelle correspondant à ce que nous appelons d'habitude la pensée. Simplement, affirmer que la pensée est une faculté rationnelle serait interpréter injustement nos sensations de pensée, qui existent bien.
- Ainsi, mon monde n'est constitué que d'impressions, très exactement à la manière des tableaux impressionnistes ou pointillistes. Je perçois des choses, mais dès que je les interprète pour leur donner un sens je quitte le domaine de la raison, qui ne dispose pas des moyens d'arriver à quelque certitude que ce soit (même ma propre existence est sujète au doute ; je me perçois moi-même, mais c'est une perception que je ne peux rationnellement interpréter. Ainsi, il est intéressant de noter que le cogito cartésien est une perception du sens de la pensée).

C'est là que se situe l'élément le plus important pour ma langue impressionniste. D'habitude, les occidentaux considèrent que le monde est constitué de choses qui sont, dans le grand bocal à poisson rouge que représente l'univers - et c'est là un fait que critique fortement Heidegger. Eh bien, pour moi, le monde n'est pas constitué de choses fixes et connaissables, mais seulement d'impressions. L'impression est l'atome de l'univers subjectif. Et ainsi, ma langue doit être constituée d'impressions, plutôt que de laisser croire par sa grammaire, comme en grec et en français, qu'il y a des choses fixes, des "étants", à opposer aux relations (les actions) et aux prédicats (les qualificatifs) qui, eux, existent d'une manière différente.

En somme, je dois supprimer toute distinction entre substantif, adjectif et verbe.

J'ignore si, à ce stade, vous comprenez en quoi cette philosophie est profondément artistique. Le sujet pensant est métamorphosé en l'interprète de la réalité, et surtout a désormais conscience des impressions elles-même indépendamment des choses qui les suscitent (les objets eux-même). Or séparer les choses et les impressions est tout le travail de l'artiste : il donne un sens nouveau à la réalité, il parle de son ressenti, d'un univers entièrement neuf et séparé de celui de chacun d'entre nous : son univers intime.

Une langue favorisant cette philosophie offrirait donc certainement des possibilités poétiques et psychologiques très importantes. De plus, la chose est évidente, mais elle inspirerait à ses locuteurs énormément de respect et de tolérance (puisque rien n'est certain). Pour finir, elle serait extrêmement interprétable. Cela dit, je souhaite qu'il soit possible de philosopher dans cette langue, et j'espère parvenir à la doter d'une originalité d'ordre cosmétique.


II) La théorie

Une langue est toujours à l'image de la conception du monde qu'elle transmet implicitement. Pour cette raison, il faut qu'un seul et unique type d'être existe dans ma langue : l'impression, située précisément à mi-chemin entre la chose (fixe, individuelle) et la relation (le mouvement lui-même, essentiellement virtuel). C'est pourquoi il ne doit y exister qu'une seule et unique fonction grammaticale (et, à ce sujet, j'ai déjà étudié vos discussions sur les langues sans verbe ; je comprends donc qu'un mot peut être un verbe sans que cela soit inscrit dans sa définition, par exemple si on détermine que le premier mot de chaque phrase a fonction de verbe).

Mais comment faire pour s'exprimer sans structure grammaticale, me demanderez-vous à juste titre ?

Eh bien, la chose n'est pas évidente, mais je vous répondrai : par l'interprétation. Dans cette langue impressionniste, chaque mot correspondra à une précision supplémentaire d'ordre descriptif au sujet d'une impression dont nous ignorons (et voulons ignorer, quasiment) la véritable nature. La structure liant ces informations descriptives claires, elle, sera floue, et devra être devinée par le destinataire, qui par la même occasion deviendra conscient de l'incertitude de ses interprétations.

Ainsi, chaque mot sera un concept équivalant à une entière famille de mots dans la langue française. Pour prendre un exemple grossier, le mot pour "oiseau" signifiera aussi "être comme un oiseau" ou "voler" (sens qui seront précisément énumérés dans la définition du mot, car "tuer" et "être tué" n'ont pas le même sens).

Mais, de même manière qu'en philosophie, je ne me contente pas de détruire ; le scepticisme peut être fécond, et je vais vous le montrer. Ce n'est pas parce que ma langue sera dépourvue de fonctions grammaticales qu'elle n'aura aucune structure ; en effet, elle comprendra un système modal essentiel correspondant précisément aux différents sens (par sens, j'entends ici la vue, l'ouïe, le toucher, etc). La brique fondamentale de cette langue n'est plus le mode d'être, mais le mode de ressenti. Les 7 modes sont :

1) Le Mode Visuel (qui confond la pensée visuelle avec la vue matérielle, ainsi que ses pairs)
2) Le Mode Auditif
3) Le Mode Volatil (qui fond en un seul sens le goût et l'odorat)
4) Le Mode Tactile (qui servira aussi à renforcer le sens des mots ; en effet, le toucher est le sens qu'il est le moins facile d'ignorer, dans le sens où, si on me frappe, j'ai mal et peux même mourir)
5) Le Mode Émotionnel (qui comprend aussi une bonne part de la spiritualité)
6) Le Mode Conceptuel (celui de la pensée pure, de la sensation abstraite, du raisonnement)
7) Le Mode Ineffable (il s'agit d'un mode particulier, moins utilisé que les autres car ne correspondant pas réellement à une faculté sensorielle. À l'origine, il représente les sensations si nouvelles qu'elles appartiennent à un sens nouveau ; par exemple, on utiliserait ce mode pour décrire un hypercube à plus de 3 dimensions spatiales. Par extension, ce mode sert aussi à désigner ce que nous sommes incapables de percevoir - le non-ressenti, finalement, et de ce fait il s'agit aussi d'un mode de la neutralité -, et donc ce qui nous transcende - il s'agit d'un mode naturel pour décrire Dieu. Pour finir, ce mode sert également à indiquer un profond respect, de même manière que le "Thou" anglais.)

Il est aussi possible de n'utiliser aucun mode, mais cela fait très dictionnaire (encore plus asceptisé qu'un manuel, puisqu'un manuel utilise des modes), et, puisque cela revient à refuser de transmettre son ressenti, cela est considéré comme extrêmement grossier, à moins que l'on n'ait une excellente raison de procéder ainsi (par exemple pour désigner un mot en tant que mot, indépendamment de son sens, ou encore pour ne pas spécifier un mode de perception particulier).

Chaque mot est généralement placé sous un mode qui lui est propre. Par exemple (exemple grossier encore, évidemment), dans la phrase "[Attirance]-5 [Fleur]-3, [Oiseau]-1 [Chant]-2" (que l'on interprèterait facilement comme "J'aime les fleurs et les oiseaux chantent"), on comprend, grâce aux modes, que j'aime (l'attirance est ici un sentiment, donc de l'amour) le parfum des fleurs et que je vois mais aussi entends les oiseaux chanter (et, par extension, que j'aime ce chant en particulier ; la virgule permet d'indiquer une relative, et le fait que je parle du chant plus spécifiquement que des oiseaux me permet de comprendre qu'ils sont plus centraux qu'eux). Cela me permet d'ailleurs de préciser que, plus on avance dans la phrase, plus la description devient spécifique. Ainsi, la fleur est relative à l'attirance et le chant à l'oiseau.

Mais, si je modifie les modes de la phrase en : "[Attirance]-6 [Fleur]-5, [Oiseau]-5 [Chant]-5", on comprend tout de suite que le sens n'est pas du tout le même. Ici, on parle de l'attirance conceptuellement, et, "Fleur", "Oiseau" et "Chant" étant sous le mode de l'émotion, on comprend qu'ils n'ont pas un sens littéral. En fonction des définitions de ces mots (qui, comme déjà dit, sont à préciser ; raison pour laquelle cet exemple est superficiel), on peut aisément comprendre quelque chose comme "L'attirance ouvre et libère comme un chant" (si on considère par exemple que ce mot "fleur" précis a plus trait à l'éclosion des pétales et donc à l'ouverture qu'aux racines ou à la sève). Bien sûr, en choisissant de manière réfléchie les sens des véritables mots de la langue impressionniste, on arrivera à rendre ce système modal extrêmement utile. On peut exprimer énormément de choses en très peu de mots ; on transmet directement notre expérience intime à l'interlocuteur. C'est au niveau de la logique formelle et du raisonnement que la langue impressionniste est moins efficace que le français.

Elle n'est cependant pas incapable de raisonnement, et, en fait, ses raisonnements sont d'une précision et d'une profusion de détails largement supérieures à ceux exprimés en français. Le désavantage est qu'ils sont plus longs à formuler (il faudra sans doute parfois plusieurs phrases pour expliquer quelque chose de simple), dans la mesure où il faut préciser plusieurs aspects de la pensée afin de dissiper son flou. Mais ceci va tout à fait dans le sens de la philosophie selon laquelle rien n'est simple, et selon laquelle la réalité est toujours plus complexe qu'elle en a l'air.

Pour contrebalancer ce flou, bien entendu, cette langue a besoin d'un vocabulaire extrêmement varié, plus qu'en français (le français est plutôt bien doté en synonymes, mais de manière extrêmement irrégulière ; par exemple, je me suis souvent retrouvé à cours de synonymes de "doux", et les mots conceptuels comme "être" sont en général extrêmement imprécis). Un immense avantage, par la suite, sera que le nombre réel de mots exprimables est multiplié par 7 grâce au système modal.

Tous les mots désigneront des concepts indépendants de tout mode, il faudra bien y veiller. Par exemple, "façonner" ou "sculpter" s'exprime en fait par l'utilisation du mode du Toucher sur une des nombreuses variantes qu'il faudra définir dans le domaine de la Création, de la Formation, etc. De plus, d'un point de vue pédagogique, cette grammaire est extrêmement simple ; elle nécessite seulement de bonnes connaissances en vocabulaire (ou un bon dictionnaire).

Au final, on se rend compte que, si verbe et sujet il y a dans cette langue, ils sont toujours implicitement "Je ressens que...", "Je perçois que..." ; cette langue inciterait donc au relativisme, au subjectivisme, ce qui est une excellente chose dans mon projet. Elle incite aussi à s'écouter les uns les autres, et à réfléchir avant de parler (tant pour interpréter la phrase de notre interlocuteur que pour lui en transmettre une exacte à notre tour). Prenons quelques exemples du même type que précédemment...

Commençons simplement. Je veux me contenter de traduire "je ressens de la colère". Ici, on se heurte au mot "colère", qui n'existe pas sous un état simple en langue des impressions : la colère étant un sentiment, elle se désigne par un mot accordé à la 5ème modalité. Ici, on va employer un mot signifiant grossièrement "violence". On prendra soin de choisir le bon mot et la bonne nuance : cette langue différencie la violence subie et la violence infligée, la violence contenue et la violence déchainée...

"Violence infligée contenue-5". Littéralement : "Je ressens en moi de la violence", "Je ressens une violence infligée mais contenue". Bien sûr, cette formulation peut être ambiguë, dans le sens où ce n'est pas forcément moi qui suis en colère ; mais c'est là le cas le plus évident, et, après tout, je n'ai utilisé qu'un seul mot ; libre à moi de donner plus de précisions avec un ou deux mots supplémentaires.

On remarque que le mode du sentiment permet souvent de remarquer que le locuteur parle de lui-même. À l'inverse, "Violence infligée contenue-1" serait probablement interprété comme "Je vois que tu es en colère", car si je souhaitais exprimer ma propre colère, il serait probable que j'utilise le mode de l'émotion ; néanmoins, on n'évoque plus ici une colère relevant réellement du sentiment, mais plutôt les indices, les signes visuels de cette colère, par exemple une certaine tension physiologique. Si je veux montrer à mon interlocuteur que je perce son esprit et que je vois littéralement son sentiment, je peux dire : "Perception-1 Violence infligée contenue-5" ; ici, on appuie sur le fait que je vois, et on parle bien en suite d'un sentiment. Cela constitue une figure de style (on pourrait tout à fait utiliser deux fois le mode de la vision pour simplement insister sur la perception). On est déjà dans la synesthésie, qui semble immensément favorisée par ce langage, ce qui est un bien inestimable pour l'artiste.

"Il ne faut pas se mettre en colère" : "Nécessité morale-6 Négation-4 (Apparition-5) Violence infligée contenue-5." Ici, la Nécessité morale est en 6 pour indiquer que j'exprime une idée, d'ordre rationnel, et la Négation est en 4 pour indiquer son importance : elle est dure, je la touche. Apparition est facultatif : on ne l'utilise que si l'on désire mettre l'accent sur l'apparition de la colère plus que sur la colère elle-même. Dans le cas où l'on appuie sur son apparition, la colère pourrait être mise en 6 ou en 7 (qui ont chacun des nuances d'importance considérable, attention) afin d'indiquer qu'elle est théorique, n'apparaît pas en fait – mais ici, on entre dans la rhétorique.

"Aujourd'hui, j'ai acheté des pommes, des navets, des poireaux et un gigot" : "[Maintenant]-2 [Achat]-1 [Pomme]-4, [Navet]-4, [Poireau]-4, [Gigot]-4 [Un]-1". Explications : on aura pris soin de définir dans le mot pour "maintenant" différents sens en fonction du mode. Le mode Volatil, par exemple, sera parfaitement adapté pour indiquer un instant infinitésimal (et on remarque ainsi que ce mode a souvent une connotation éphémère, fragile). Le mode qui me semble le plus adapté pour "aujourd"hui" est le mode Auditif : le jour, c'est l'unité de l'histoire, de la narration. [Maintenant-1] signifierait sans doute plutôt "maintenant", tout simplement - on remarque d'ailleurs que le mode Visuel exprime souvent les choses dans leur sens le plus ontique, basique, sans appuyer vraiment sur leur sens, car la vue est le sens le plus intuitif (de même manière que le genre masculin a perdu son sens en français pour devenir neutre). En suite, l'énumération est simplement structurée par des virgules, donc respirations ; le fait que le nombre ne soit pas spécifié laisse aisément sous-entendre qu'il y a plusieurs pommes, navets, poireaux. Par ailleurs, le fait qu'on puisse spécifier leurs modes laisse une immense liberté d'expression au locuteur : il pourrait insister sur le goût de ces aliments (3), ou encore sur la nécessité qu'il a de manger (6) ; ici, on a choisi le 4 pour exprimer ces légumes comme des choses matérielles, dont on sent la forme et le poids, donc des choses bien réelles et consistantes, le fruit de notre dur labeur et la subsistance d'un repas copieux (de même façon que l'anglais dirait "the very apple", même si en anglais ça n'a aucun sens dans ce cas-là). Pour finir, indiquer qu'il n'y a qu'un seul gigot est aisé : il suffit de spécifier le sens de l'impression "gigot", et donc d'ajouter après elle une impression d'unité.

Nous allons nous arrêter là pour l'instant au niveau des exemples théoriques, mais il faudra sans doute y revenir car, bien entendu, il reste beaucoup de choses à construire dans cette langue.


III) Morpho-phonologie

Pour cette langue, je comptais à l'origine utiliser l'alphabet latin (pour moi, la graphie est une chose secondaire dans la construction d'une langue), mais je me suis heurté a des choix difficiles et nécessairement illogiques (zwugzwang, pour les joueurs d'échec...), ce qui fait que l'alphabet latin, si je l'ai conservé, n'est maintenant plus qu'une transcription.

Après quelques recherches, j'ai choisi d'utiliser l'alphabet Nushkhuri (il y a une page wikipédia), un alphabet aujourd'hui désuet utilisé à partir du Moyen-Âge et jusqu'au XVIIIème siècle en Géorgie par les ecclésiastiques. Alors, oui, effectivement, ce n'est pas du tout pratique au clavier ! Mais c'est bien pour ça qu'il y a une méthode de transcription par alphabet latin. Si j'ai choisi cet alphabet, c'est parce qu'il est particulièrement beau à mes yeux, qu'il est totalement inutilisé par les langues vivantes, et qu'il comte un grand nombre de caractères sans connotation phonétique.

Note : j'ai totalement changé l'ordre et le sens des lettres de l'alphabet original, et c'est un alphabet monocaméral.


Alphabet ⴀⴣⴝⴍⴗⴠ (Arcyil, [arθjɛl]) :

01 – ⴀ – a – [a]
02 – ⴣ – r – [r]
03 – ⴝ – c – [θ]
04 – ⴍ – y – [j]
05 – ⴗ – i – [ɛ]
06 – ⴠ – l – [l]
07 – ⴘ – î – [e]
08 – ⴇ – p – [p]
09 – ⴊ – b – [b]
10 – ⴂ – m – [m]
11 – ⴁ – n – [n]
12 – ⴑ – e – [œ]
13 – ⴎ – ê – [ø]
14 – ⴙ – j – [ʒ]
15 – ⴡ – h – [h]
16 – ⴋ – f – [f]
17 – ⴄ – o – [ɔ]
18 – ⴖ – ô – [o]
19 – ⴜ – x – [ʃ]
20 – ⴅ – z – [z]
21 – ⴓ – s – [s]
22 – ⴛ – u – [u]
23 – ⴞ – w – [w]
24 – ⴈ – û – [y]
25 – ⴚ – k – [ð]
26 – ⴒ – d – [d]
27 – ⴌ – t – [t]
28 – ⴢ – â – [i]
29 – ⴉ – q – [k]
30 – ⴤ – 1 – marqueur modal visuel
31 – ⴔ – 2 – marqueur modal auditif
32 – ⴟ – 3 – marqueur modal volatil
33 – ⴥ – 4 – marqueur modal tactile
34 – ⴕ – 5 – marqueur modal émotionnel
35 – ⴐ – 6 – marqueur modal conceptuel
36 – ⴏ – 7 – marqueur modal ineffable
37 – ⴆ – ! – marqueur tonal exclamatif
38 – ⴃ – ? – marqueur tonal interrogatif

L'Alphabet Nuskhuri original et les caractères en gros :
Spoiler:


N'hésitez pas à me l'indiquer si quelque chose vous semble illogique, notamment dans le choix de mes sons ou de mes caractères. En outre, n'hésitez pas à me donner des conseils à ce sujet : je suis une quiche en phonétique.

Les marqueurs modaux, vous l'aurez compris, correspondent aux 7 modes. Bien que les modes s'entendent à l'oral exactement à la manière de déclinaisons, j'ai pensé qu'il serait intéressant de les représenter à l'écrit pas des idéogrammes. Ainsi, pour écrire Arcyil-1 ("Alphabet"), je vais écrire ⴀⴣⴝⴍⴗⴠⴤ, où le dernier caractère correspond au mode 1. Ainsi, seul le radical du mot est écrit en toutes lettres.

Je pense aussi que les marqueurs modaux pourraient être utilisés par cette langue pour représenter les chiffres conjointement avec le 0, mais alors, évidemment, on ne serait plus dans un système décimal mais dans un système de base 8 (ce qui constitue d'ailleurs une originalité).

Les deux marqueurs tonaux ont une fonction un peu similaire à celle des marqueurs modaux. Ils permettent de représenter à l'écrit une intonation exprimant l'exclamation, la surprise, l'insistance, ou au contraire l'interrogation, l'hésitation, le doute. Si l'on souhaite indiquer une telle information sur un mot précis, on indique le marqueur tonal adapté en début de mot : ⴃⴀⴣⴝⴍⴗⴠⴔ est la représentation de ?-Arcyil-2 : "Je ne suis pas sûr de la manière dont cela s'épelle"). En outre, ces deux marqueurs servent aussi à remplacer le point d'interrogation et le point d'exclamation, de même manière qu'en français. Pour le reste de la ponctuation, on utilise habituellement le point, la virgule, et le tiret (qui équivaut à la fois à la parenthèse s'il y en a deux à un certain intervalle et aux deux points s'il n'y en a qu'un).


Voilà où j'en suis. Il reste beaucoup de choses à faire, le travail le plus vaste étant évidemment de créer le vocabulaire. J'avoue aussi avoir des difficultés au niveau de la création des mots d'un point de vue phonétique (j'aimerais, si possible, rendre une certaine unité phonétique dans le langage). Je pense d'ailleurs que je vais créer un vague système de racines radicales et de préfixes/suffixes, qui n'influeront pas plus sur le sens que ne le fait l'étymologie en français, mais aideront à deviner le sens d'un mot inconnu et permettront justement de rendre la langue plus naturelle. Cela dit, si vous avez des conseils ou des idées, n'hésitez pas, je suis très ouvert à la critique, qui selon moi est essentielle à la progression !

Mais l'aspect phonétique et sémantique est encore secondaire : je veux d'abord en finir avec l'aspect théorique, grammatical, syntaxique. Dîtes-moi ce que vous pensez de mes idées, et ce qui manque selon vous - je vous en serai reconnaissant !

Merci pour votre lecture, en espérant que vous n'aurez pas trouvé ça trop long... ^^"
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Ziecken
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyVen 9 Déc 2011 - 10:52

Voilà, c'est lu ! Laughing

Plus c'est long plus c'est bon ! dit le dicton

Il s'agit bien là d'un projet original, et cela fait tout son intérêt. En théorie cela semble plein de promesses, mais en pratique, cela me semble très complexe à mettre en place, aussi je suis curieux de voir avec des exemples comment tu t'en sors.

Nous sommes plusieurs à avoir établi une idéolangue a priori, sur le base de l'hypothèse Sapir-Whorf, mais à chaque fois les projets sont très différents.

En revanche, je crois bien que tu sois le seul à avoir choisi d'utiliser le système d'écriture du géorgien. Tu dis que tu aimes cet alphabet, mais je me demande si dans l'intérêt d'une langue philosophique, il ne serait pas plus judicieux de créer ton propre système d'écriture afin de pousser l'a priori à fond et de le faire correspondre aux besoins spécifiques de cette langue.

Quoiqu'il en soit je trouve que tu es très cohérent dans ton raisonnement, très méthodique et tu sembles te poser les bonnes questions. Je pense, que la langue que tu créeras bénéficieras de ce raisonnement réfléchi et c'est une très bonne chose.

Après un pavé comme celui-là je suis néanmoins impatient d'en savoir plus et de voir comme cette langue impressionniste évolue.

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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyVen 9 Déc 2011 - 17:21

J'ai lu rapidement, et il me semble que, tout à fait bizarre, certains points de ta langue me font penser au lojban, bien que l'idée derrière cette langue soit presque à l'opposé des tiennes. Néanmoins, le lojban me fait aucune distinction entre verbe, nom et adjectif; on peut très bien y distinguer une affirmation certaine d'une affirmation impressionniste, etc.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyVen 9 Déc 2011 - 23:31

silent 


Dernière édition par lsd le Mer 10 Juil 2013 - 23:34, édité 1 fois
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Leo

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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 10 Déc 2011 - 0:05

Je m'abstiendrai de faire des critiques pour l'instant car tu en es au stade de l'architecture générale et toi seul peux y voir vraiment clair, d'autant plus que les notions de raison et autres constructions cognitives sont assez subjectives. Lorsque tu seras passé au stade de l'application, il sera plus facile de palper ce qui différencie ta langue des autres et de se cogner à d'éventuels couacs qui demanderont des retours en arrière. (on appréciera le mode audiotactilomoteur de la phrase ^^)

Je pressens que tes 7 modes de perception vont interagir avec les champs sémantiques des langues naturelles, donnant des résultats différents selon la langue maternelle de chacun et sa personnalité. Dans une de mes langues à champs tentaculaires un même mot désigne le jour, la chaleur, la lumière, l'activité, etc, selon le composé où il se trouve et qui sélectionne un mode perceptif (ou autre), est-ce que ta langue fonctionnerait de la même manière ou bien distinguerait clairement ces concepts?
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 10 Déc 2011 - 12:08

Ziecken a écrit:
En revanche, je crois bien que tu sois le seul à avoir choisi d'utiliser le système d'écriture du géorgien. Tu dis que tu aimes cet alphabet, mais je me demande si dans l'intérêt d'une langue philosophique, il ne serait pas plus judicieux de créer ton propre système d'écriture afin de pousser l'a priori à fond et de le faire correspondre aux besoins spécifiques de cette langue.
Hm, effectivement, je n'y avais pas pensé... tu as peut-être raison. Le désavantage, c'est qu'à moins d'utiliser des caractères existants (ce qui n'est pas forcément évident avec un système novateur), l'utilisation de la langue sur support informatique serait assez complexe. Après y avoir un peu réfléchi, je suis arrivé à l'idée d'un système syllabique, mais je ne suis pas encore satisfait - je vous tiens au courant.

Ziecken a écrit:
Quoiqu'il en soit je trouve que tu es très cohérent dans ton raisonnement, très méthodique et tu sembles te poser les bonnes questions. Je pense, que la langue que tu créeras bénéficieras de ce raisonnement réfléchi et c'est une très bonne chose.
Merci, ça me va droit au cœur !

Silvano a écrit:
J'ai lu rapidement, et il me semble que, tout à fait bizarre, certains points de ta langue me font penser au lojban, bien que l'idée derrière cette langue soit presque à l'opposé des tiennes. Néanmoins, le lojban me fait aucune distinction entre verbe, nom et adjectif; on peut très bien y distinguer une affirmation certaine d'une affirmation impressionniste, etc.
Ce que tu dis là est extrêmement pertinent. J'avais effectivement le lojban en tête lorsque l'idée de cette langue m'est venue, et il s'agit effectivement d'un projet diamétralement opposé (je suis un ennemi de l'idée selon laquelle la logique est universelle, et je prends souvent comme exemple la physique quantique, qui n'admet pas le principe de non-contradiction). Ici, la différence majeure (ou en tout cas que j'espère telle) avec le lojban est que les armes que je fournis à la logique sont volontairement peu pratiques.

lsd a écrit:
mon pc ne lit pas tes caractères géorgiens (suis allé faire un saut sur omniglot pour voir la bête) jolis (même si je vois pas l'avantage avec le système que tu ébauche...) mais du coup problématique pour moi de te suivre silent
On aura l'occasion d'en reparler study
Les caractères que j'ai utilisés font partie d'Unicode 5. Peut-être cette information peut-elle t'aider à corriger le problème...

Sinon, j'admets que les avantages fournis par ce choix sont maigres, mais ils existent :
- 38 caractères ;
- Caractères inutilisés par les autres langues, et donc pas d'a priori sémantique ou phonétique, ce qui me donne une totale liberté ;
- Au delà du fait que c'est joli, c'est original !

Leo a écrit:
Je pressens que tes 7 modes de perception vont interagir avec les champs sémantiques des langues naturelles, donnant des résultats différents selon la langue maternelle de chacun et sa personnalité. Dans une de mes langues à champs tentaculaires un même mot désigne le jour, la chaleur, la lumière, l'activité, etc, selon le composé où il se trouve et qui sélectionne un mode perceptif (ou autre), est-ce que ta langue fonctionnerait de la même manière ou bien distinguerait clairement ces concepts?
Oui, c'est exactement ça, les 7 modes de perception vont interagir avec les champs sémantiques des langues naturelles ! Par exemple, il n'y aura pas de mot spécifique pour "aveugle" ; on utilisera plutôt un mot-concept ayant plus ou moins le sens d'"insensibilité", et complété par un des modes de perception. Ceci me permet de remarquer que les modes de perception ont deux effets possibles bien séparés : ils peuvent indiquer par quel type de perception ont a perçu l'information que l'on transmet, ou bien sur quel type de perception porte le mot utilisé.

Ceci peut causer des ambiguïtés et est donc peut-être problématique. Cela dit, dans l'exemple que j'ai cité, bien qu'il y ait ambiguïté, cette ambiguïté est faible : il est évident que l'insensibilité dont on parle est relative à un type de perception, et c'est donc lui qui est précisé par le mode. Le second problème que cela pourrait poser est que du coup, on aurait sans l'avoir désiré deux types quasi-grammaticaux de mots : ceux sur lesquels les modes ont un effet grammatical et ceux sur lesquels ils n'ont qu'un effet sémantique... en l'occurrence, pour le mot-concept "insensibilité", l'effet serait sémantique. Ce deuxième problème me semble plus important que le premier... Pensez-vous qu'il puisse nuire au projet ?
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 10 Déc 2011 - 16:25

Grelot-de-Bois a écrit:
Les caractères que j'ai utilisés font partie d'Unicode 5. Peut-être cette information peut-elle t'aider à corriger le problème...

Sinon, j'admets que les avantages fournis par ce choix sont maigres, mais ils existent :
- 38 caractères ;
- Caractères inutilisés par les autres langues, et donc pas d'a priori sémantique ou phonétique, ce qui me donne une totale liberté ;
- Au delà du fait que c'est joli, c'est original !
Mais même avec mon Mac, je ne les vois pas.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 10 Déc 2011 - 22:53

Grelot-de-Bois a écrit:
Ce deuxième problème me semble plus important que le premier... Pensez-vous qu'il puisse nuire au projet ?
Je ne sais pas du tout. Il faut tester, car l'usage est souvent bien éloigné des principes qu'on peut se fixer. La langue est fluide et rebelle Wink

Pour ceux qui ne voient pas les caractères, j'ai fait une capture d'écran:
https://sd-1.archive-host.com/membres/images/7521784554799019/1112/arcyil.png
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 11 Déc 2011 - 18:30

Merci Léo cheers .
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 17 Déc 2011 - 6:24

Après quelques jours de travail et de réflexion, j'ai établi un syllabaire peut-être plus adapté à cette langue qu'un alphabet. Les sons utilisés et les transcriptions latines restent les mêmes :

a – [a]
â – [i]
i – [ɛ]
î – [e]
e – [œ]
ê – [ø]
o – [ɔ]
ô – [o]
u – [u]
û – [y]

h – [h]
w – [w]
y – [j]
l – [l]
r – [r]
q – [k]
b – [b]
p – [p]
m – [m]
n – [n]
d – [d]
t – [t]
k – [ð]
c – [θ]
f – [f]
x – [ʃ]
j – [ʒ]
z – [z]
s – [s]

Le h est particulier : lorsqu'il est situé entre deux voyelles ou en début de mot il se prononce normalement, c'est-à-dire aspiré ; en revanche, s'il suit une voyelle mais est suivi d'une consonne (et on ignore dans ce cas précis y et w), il est remplacé par une voyelle identique à celle qu'il suit ; et s'il est suivi d'une voyelle mais suit une consonne, il n'a aucun effet sur la pronconciation et n'est pas marqué. Lorsque deux voyelles identiques se suivent dans un même mot, on les sépare sans prononcer d'aspiration, et si une voyelle est entourée par deux h aspirés, le second est lui aussi effacé et remplacé par une simple séparation. Les consonnes doublées se prononcent deux fois, de même manière que les voyelles. À la fin, aucun caractère ne doit être muet.


Mais passons au syllabaire en question, plus intéressant que la phonologie en elle-même...

Tous les mots impressionnistes possèdent un radical invariable permettant de les distinguer individuellement. Ce radical est lui-même construit à partir de racines monosyllabiques que l'on appelle des clefs. Chaque clef est associée à un modèle de déclinaison modale qui lui est propre ; le modèle de déclinaison d'un mot est celui de la dernière clef de son radical. Chaque clef possède une prononciation précise et invariable (le son [h] faisant exception, comme vu plus haut) et n'a pas de sens dans le langage usuel. Ainsi, les mots impressionnistes sont toujours constitués d'au moins deux clefs, et lorsqu'ils possèdent plus de deux clefs, leurs troisième et éventuellement quatrième clefs jouent un rôle de précision par rapport au mot à deux clefs associé.

Les symboles de la langues impressionniste sont donc :
- Les clefs (72)
- Les marqueurs modaux (7)
- Les marqueurs tonaux (2)
- La ponctuation (3)


Il existe 7 modèles de déclinaison. Les formes sont ci-dessous indiquées dans l'ordre suivant : Mode Visuel, Mode Auditif, Mode Volatil, Mode Tactile, Mode Émotionnel, Mode Conceptuel, Mode Ineffable.


1ère déclinaison (15 clefs l'utilisent) :
hab, raa, hay, har, laa, ham, haz

2ème déclinaison (9) :
ip, il, ik, ib, iid, ij, iit

3ème déclinaison (10) :
êr, êk, êl, êq, êm, êt, ês

4ème déclinaison (11) :
oc, on, yor, ok, ô, odr, hops

5ème déclinaison (12) :
ux, ur, um, ru, lnu, uqs, hut

6ème déclinaison (10) :
wâ, âb, âm, âd, âlf, ârn, ârk

7ème déclinaison (6) :
bâ, âj, yim, ja, yad, hûl, hûn


La 1ère déclinaison est généralement utilisée pour les mots (d'origine étrangère) non-constitués de clefs.

Par convention, on utilise le Mode Visuel d'un modèle de déclinaison pour désigner celui-ci grammaticalement.

Passons maintenant aux 72 clefs, classées en 10 catégories, chacune correspondant à une des 10 voyelles de la langue impressionniste. Les clefs et les déclinaisons ont été choisies de manière à ce qu'il n'y ait jamais confusion entre deux d'entre elles si la prononciation est bonne (à ce sujet, si vous trouvez une erreur, prévenez-moi).

- a (18 clefs dans cette catégorie) :
ha, hab
ax, hab
qa, hab
wa, hab
la, hab
at, hab
dja, hab
hal, ip
af, ip
sa, êr
an, oc
ba, ux
za, ux
tar, wâ
aq, wâ
kya, bâ
ra, bâ
as, bâ

- â (9) :
xâ, hab
âl, ip
râ, êr
âx, êr
âr, oc
âf, ux
âz, wâ
djâ, wâ
âs, bâ

- i (10) :
iy, hab
ir, hab
ix, ip
hi, ip
ik, oc
ic, ux
bi, ux
fi, ux
in, wâ
iq, wâ

- î ( 8 ) :
îf, hab
cî, êr
tî, ip
qî, oc
kî, ux
rî, wâ
fî, wâ
nî, bâ

- e (6) :
men, hab
ew, ip
ex, ip
ker, êr
ey, êr
hye, êr

- ê (3) :
hê, êr
nê, oc
zêr, ux

- o (5) :
om, hab
no, oc
qwo, oc
ob, ux
od, wâ

- ô (6) :
kôn, ip
cô, êr
psô, oc
tô, oc
ôz, ux
qô, wâ

- u (4) :
us, hab
ku, oc
nu, ux
cu, ux

- û (4) :
ûj, hab
cû, êr
rû, oc
ûr, bâ


Puisqu'il s'agit d'un syllabaire, chaque clef constitue un symbole, un idéogramme, un caractère à part entière dans le mode d'écriture habituel de cette langue. En comptant les modes et en considérant que tous les mots ont entre 2 et 4 clefs, il existe 230 340 696 combinaisons possibles.

Petit exemple de tout ce qui a été dit précédemment : Axbaqahaz est constitué des clefs Ax, Ba, et Qa ; s'y ajoute la marque du Mode Ineffable de la 1ère déclinaison (qui est celle de Qa) : Haz. Le locuteur impressionniste l'écrira [Ax][Ba][Qa][7]. On prononce [aʃbakahaz]. Axbaqa ("Hors du temps") est un mot relatif à Axba ("Écoulement du temps"), de même que Axbadjâ ("Passé") ; mais Axbadjâ, au mode Ineffable, serait Axbadjâârk et se prononcerait [aʃbakadʒi.irð]. Évidemment, comme je n'ai pas encore commencé à créer le vocabulaire, ces mots sont sujets à modification ; et, de même, je n'ai pas encore vraiment commencé à travailler sur les caractères de ce syllabaire (d'ailleurs, si vous avez des idées à ce propos, je suis preneur... inventer 84 symboles différents ayant une certaine unité, ce n'est pas simple ! :s)

Qu'en pensez-vous ?


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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptySam 17 Déc 2011 - 23:44

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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 1:47

lsd a écrit:
va faire un tour sur omniglot.com si tu sèche
C'est ce que j'allais proposer. On y trouve une liste de syllabaires.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 9:48

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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 11:18

Pour créer un syllabaire, 3 voies :
- Un signe pour chaque syllabe (japonais)
- Un signe pour chaque consonne, les voyelles sont des marqueurs ajoutés à la consonne (écritures de l'Inde)
- Un signe pour chaque voyelle, les consonnes sont des marqueurs ajoutés à la voyelle (?)

On peut comme le coréen combiner consonne(s) et voyelle(s) en une seule unité graphique. Mais il s'agira alors d'un alphabet.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 12:42

Merci pour ces idées, je réfléchis à tout ça !
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 12:49

Juste une ancienne idée...
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J'ai aussi utilisé les mêmes signes mais en version Voyelle, les marqueurs étant les consonnes.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 13:58

PatrikGC a écrit:
Pour créer un syllabaire, 3 voies :
- Un signe pour chaque syllabe (japonais)
- Un signe pour chaque consonne, les voyelles sont des marqueurs ajoutés à la consonne (écritures de l'Inde)
- Un signe pour chaque voyelle, les consonnes sont des marqueurs ajoutés à la voyelle (?)

On peut comme le coréen combiner consonne(s) et voyelle(s) en une seule unité graphique. Mais il s'agira alors d'un alphabet.

Ne pas oublier que l'écriture n'est pas le son de la phrase énoncée.

J'ai commencé par écrire le Rémaï en croyant qu'il se lirait comme il se prononce, mais c'est une chose impossible : le fait de prononcer un mot n'est jamais équivalent au fait de le lire et ça a des conséquences énormes sur comment le fil de la pensée va se transcrire à l'oral ou à l'écrit, ou comment on va pouvoir comprendre ce que l'on entend ou ce que l'on voit.

Fais très attention aussi à garder le contact avec le monde qui nous entoure, en particulier si tu veux que quelqu'un puisse apprendre ta langue une fois qu'elle sera construite : l'apprenant va avoir besoin de dire des choses en priorité, lesquelles ? C'est le problème de la progression (quel est le vocabulaire à apprendre en priorité, le plus courant, le plus simple dans le domaine d'expertise de la langue ou du langage et comment on fait pour passer au plus compliqué). Si on construit sa langue sans progression ou contre les progressions existantes, c'est plus difficile voire impossible de la transmettre. Si on se sert d'une progression, cela facilite le travail de construction à ma connaissance.

Bon courage.


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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 15:03

PatrikGC a écrit:
- Un signe pour chaque consonne, les voyelles sont des marqueurs ajoutés à la consonne (écritures de l'Inde)
En fait, ce n'est pas vraiment ça. Ces écritures ont pour chaque consonne une voyelle «par défaut», souvent le A. Il y a des signes pour les autres voyelles et un autre signe pour enlever la voyelle... Comme si PP se prononçait papa, que, pour pipi, on dût écrire PiPi, et pour pape, ou écrivît PP'.
Cependant il existe des écritures où les voyelles ne sont notées que par des diacritiques, le tengwar, par exemple.
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 16:13

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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 16:19

lsd a écrit:
C'est une évidence dès qu'on construit: il faut limiter le nombre de signe Wink
En fait, le choix entre un alphabet, un syllabaire, un alphasyllabaire et un abjad dépend aussi de la structure phonétique de la langue. Essayer de faire un syllabaire pour le français ou l'anglais aboutirait sans doute à quelque chose d'aussi énorme que les signes chinois!

En fait, selon certains linguistiques, le hangûl est presque parfait : un alphabet qui regroupe les sons en syllabes, tels qu'ils sont énoncés !
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 16:22

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Dernière édition par lsd le Mer 10 Juil 2013 - 23:35, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyDim 18 Déc 2011 - 22:42

La vraie de vraie question, qui mériterait un sujet indépendant, est : Pourquoi créer une langue ? Very Happy Very Happy Very Happy

Je signale de l'absence de marqueur est elle-même un marqueur.

Dans ce que j'ai écrit, j'ai simplifié les différentes façons de classer les syllabaires, sinon on se complique trop la vie. Il s'agissait de donner les grandes directions. Bien sûr, il vaux mieux que l'écriture soit optimisée avec la langue, mais il a existé, il existe encore et toujours une foultitude de langues écrites avec un système inadéquat.

Un très bon site, déjà cité : omniglot.com...
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyLun 19 Déc 2011 - 3:46

Au sens strict, je ne sais pas si on peut appeler "syllabaire" un système indiquant les consonnes ou les voyelles par des diacritiques. Il s'agit plutôt d'un alphabet ou d'un abjad. Ce que j'appelle un syllabaire, c'est un système dans lequel chaque caractère indique une syllabe complète, consonne et voyelle à la fois. Si les consonnes et les voyelles sont indiquées par des moyens séparés et s'il y a une certaine fluidité dans leur assemblage, on ne peut pas vraiment parler de syllabaire.

Par ailleurs, ne peut-on pas penser que dans une langue construite le système d'écriture est toujours nécessairement adapté à la langue ? Cela est dû au fait que, dans une langue construite, le système d'écriture précède la langue elle-même et constitue l'une des principales influences sur son développement. Les langues naturelles subissent le processus inverse. La véritable inquiétude à avoir, lorsque l'on construit une langue, n'est pas "mon système d'écriture est-il adapté à ma langue ?" mais plutôt "ce système d'écriture fera-t-il de ma langue ce que je voulais qu'elle soit ?"

C'est d'ailleurs une question que je me pose en ce moment. Je commence à penser que, en dépit de l'aspect esthétique et créatif d'un tel système, un syllabaire risque d'éloigner la langue impressionniste du projet qui motive sa création. Enfin, il me faut encore y réfléchir...
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyLun 19 Déc 2011 - 3:59

Grelot-de-Bois a écrit:
Au sens strict, je ne sais pas si on peut appeler "syllabaire" un système indiquant les consonnes ou les voyelles par des diacritiques. Il s'agit plutôt d'un alphabet ou d'un abjad.
J'ai tendance à être d'accord avec toi. Cependant, que penser du syllabaire inuktitut (au Québec, ils disent inuttitut) qui indique les voyelles par des directions?
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MessageSujet: Re: Une langue impressionniste   Une langue impressionniste EmptyLun 19 Déc 2011 - 4:10

À mes yeux, il n'est pas un syllabaire, parce que la forme des caractères découle de leur son de manière logique. Dans un vrai syllabaire, il ne peut pas y avoir cette logique qui permet de déduire de la forme d'un symbole sa prononciation même sans le connaître spécifiquement. S'il est possible de considérer un symbole comme la déclinaison d'un autre, comme le même symbole en une version différente, alors nous avons affaire à un certain type de diacritique. Un vrai syllabaire ne compte pas de lien logique entre les caractères, à moins que ce lien logique soit sans rapport avec la prononciation. Pour cette raison, les syllabaires japonais me semblent de meilleurs exemples que le système inuktitut...
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