Techniquement, le saiwosh et le dibadien sont des créoles. Il se trouve que grâce à mon épouse j'ai la chance d'avoir appris le créole mauricien, dont la grammaire est, en gros, la grammaire universelle de tous les créoles. Ce qui me permet, dans une certaine mesure, d'éviter les gallicismes :
Créole mauricien :
To kontan = tu es content / tu aimes / tu aimes bien / tu es content de, etc
To loto = ta voiture
To gran loto = ta grande voiture
To franse = tu es français / tu es un Français
To bulanze = tu es boulanger / ton boulanger
Le saiwosh et le dibadien, en tant qu'anciens pidgins, ont des grammaires proches de celle des créoles :
Saiwosh :
Oma tiki = tu aimes
Oma wehachik = ta voiture
Oma hayash wehachik = ta grande voiture
Oma pasayoks = tu es français
Oma pasayoks-tili = ton Français
Omaika pasayoks-tili = tu es un Français
Omaika monkpantili = tu es boulanger
Oma monkpantili = ton boulanger
"Omaika" est la forme essive du pronom. Elle permet de faire la différence entre "tu es boulanger" et "ton boulanger", ce que le créole mauricien ne fait que par le contexte.
Dibadien :
Tlët tëk = tu aimes
Tlët wehëchik = ta voiture
Tlët haiash wehëchik = ta grande voiture
Tlët pasaiuk = tu es français
Tlët pasaiuktilik = ton Français
Tlët shub pasaiuktilik = tu es un Français
Tlët shub mungpango = tu es boulanger
Tlët mungpango = ton boulanger
Le dibadien n'a pas de forme essive pour le pronom. À la place, il utilise plusieurs verbes, qui signifient "être": shub, gu, sis...
- Citation :
- Le magasin est au centre de la ville
Saiwosh :
Makok-hit kopa kotsak mi an ou
Makok-hit kopa an-kotsak Dibadien :
Emakukkha kopa ekotsak ye hon ou
Emakukkha kopa ehonkotsak Dans les deux cas, le français peut être traduit quasiment mot-à-mot : "Le magasin est au centre de la ville" et "Le magasin est dans le centre-ville". Ce qui, d'ailleurs, n'a pas tout-à-fait le même sens en français : un magasin peut être dans le centre-ville sans être exactement au centre de la ville. En saiwosh et en dibadien, il est possible d'insister sur la localisation centrale du magasin :
Makok-hit tilet kopa kotsak mi anEmakukkha dilet kopa ekotsak ye honLe magasin est précisément au centre de la ville.En créole mauricien :
Magazen-la omilye lavil"magasin-là au-milieu la-ville""Au-milieu" est utilisé comme une préposition en mauricien. J'ai remarqué que, d'une manière générale, le mauricien, langue orale, n'aime pas utiliser plus d'une préposition par phrase : "
au centre
de la ville" est trop compliqué, "au centre de" est remplacé par un seul mot, "omilye". En mauricien il est impossible de dire une phrase comme : "La portière de la voiture du fils de la tante de la concierge de Robert." Un mauricien dirait : "Robert sa concierge, le fils de sa tante. Ce fils, la portière de sa voiture."
(
Rober so konsyerz, fis so latant. Fis la, lapot so loto).
Le Pirahã, une langue d'Amazonie, répugne aux enchâssements encore plus que le mauricien.
Je pense que la possibilité (au moins théorique) d'utiliser un nombre illimité de "de" en français vient de la langue écrite. Les équivalents saiwosh (
mi) et dibadien (
ye) viennent aussi de la langue écrite
Le saiwosh et le dibadien sont censés s'être développés grâce au travail obscur de centaines de traducteurs, qui ont traduit les mots plus que la pensée...