Brève présentation du rapLe rap
Né dans les années 70 dans les quartiers noirs défavorisés des États-Unis, comme partie du mouvement Hip-Hop, exporté en France au milieu des années 80, cet art à mi-chemin entre le chant et la déclamation a au fil des années développé ses propres codes et est devenu une musique à part entière ; si décrié, si caricaturé (il faut dire que des fois il le cherche un peu) et pourtant si fascinant
Le mot « rap » lui-même a plusieurs sens : il s'agit d'un mot d'argot américain pour dire «bavarder», il évoque aussi l'idée d'un coup sec, ou d'une accusation. Le terme est on ne peut plus approprié puisque le rap, c'est un peu tout ça à la fois. Le discours peut-être au choix politique, dénonciateur, égocentrique, violent, apaisant, spirituel, rassembleur, humoristique, et bien d'autres choses… bref les sujets traités sont très divers (bien que certains soient plus récurrents que d'autres, selon le pays), mais l'essence du rappeur est de décrire la réalité, sa réalité, son ressenti sur le monde qui l'entoure. Les rappeurs se définissent à l'origine comme des journalistes témoins de leur époque. Le tout en maniant la rime et le rythme, pour rendre le texte le plus percutant possible.
TechniqueLe texte justement, c'est ce qui distingue le rap des autres musiques. Si dans la chanson classique la mélodie est importante et les syllabes souvent étirées, dans le rap le texte est dense et la plupart du temps peu interrompu. La structure la plus courante est : 3 couplets de taille équivalente - 3 refrains (généralement de 8 mesures). Il n'est toutefois pas rare de voir des raps en deux couplets ou même des raps ininterrompus, sans refrain, pouvant durer 6, 7, voire 10 minutes. Le refrain peut aussi être instrumental.
Deux éléments composent principalement le rythme dans un titre de rap :
-le beat, c'est-à-dire les percussions, qui impriment le rythme. Au départ minimalistes et faites à partir de samples (des morceaux existants remixés), ils ont été de plus en plus élaborés, si bien qu'aujourd'hui on parle plus généralement de «production». Il y a de célèbres producteurs (le terme DJ n'est plus trop utilisé) comme il y a de célèbres MC (maîtres de cérémonie). Au États-Unis, de nombreux rappeurs sont même les deux à la fois. De plus en plus, les samples et les musiques synthétiques sont associés ou laissent place à de véritables instruments (notamment en France).
-le flow : la vitesse de diction, les variations de rythme, la fluidité, les rimes, la voix, le ton, la métrique… tout cela compose le flow. Chaque rappeur a un flow qui lui est propre et certains parviennent à le varier plus que d'autres. Il peut être lent et saccadé ou au contraire rapide et fluide, il peut également être d'apparence parlée ou proche du chant… l'essentiel est que cela soit travaillé tout en ayant l'air le plus spontané possible. Les MC les plus doués peuvent enchaîner les mêmes schémas de rimes sur des couplets entiers sans que la cohérence ou la spontanéité des phrases s'en ressente le moins du monde.
On peut noter que la nature des rimes dépend grandement de la langue employée : si les rappeurs français raffolent des allitérations, les rappeurs américains feront essentiellement des rimes vocaliques, les consonnes anglaises étant plus «légères» et facilement avalées (t et d qui deviennent des l, r arrondi, nombreuses diphtongues…) De même en japonais les mots en CVCV favorisent une plus grande fluidité dans la diction. Tandis que le mandarin avec ses nombreux homonymes offrira une plus grande facilité de rime.
Casey, Premier Rugissement :
« Mais où sont-elles, les couleurs pastelles, dans ce navrant cocktail de béton et de métal ? Et l'ennui mortel, tel une maladie mentale, te martelle et te rappelle qu'il est inutile, voire infantile, de rêver à terre plus fertile ou sentimentale. Et les sentinelles sont matinales, comme à leur accoutumée peu maternelles. Leur fureur est infernale, et elles peuvent être fières d'elles : leur impunité semble éternelle. Aussi sans pitié que sempiternelle… »Eminem, Lose Yourself :
« His palms are sweaty, knees weak, arms are heavy, there's vomit on his sweater already, mom's spaghetti. He's nervous, but on the surface he looks calm and ready to drop bombs… but he keeps on forgetting what he wrote down. The whole crowd goes so loud, he opens his mouth but the words won't come out. He's choking how everybody's joking now, the clock's run out, time's up, over, blah ! »Un terme que l'on retrouve souvent dans le rap est celui de « punchline » (« vers percutant »). Comme son nom l'indique, la punchline doit être une phrase ou une rime qui sort du lot, que l'on retient parmi les autres, qui reste dans la tête de par sa formulation.
Exemple (Booba) :
« J'ai demandé ma route au mur, il m'a dit d'aller tout droit »Tous les raps n'ont pas de punchlines, certains au contraire en recèlent à la pelle. Comme pour le flow, la densité de punchlines dépend surtout du style du MC… mais aussi de l'auditeur. Tout le monde ne sera pas forcément marqué par les mêmes phrases. La punchline peut être «accompagnée» par une variation du beat (emballement ou ralentissement voire arrêt pendant un instant).
Le rap aux quatre coins du mondeLes deux pays où le rap s'est le plus développé sont les États-Unis et la France, mais on en trouve dans de nombreux pays et dans de nombreuses langues (même en Esperanto !) : Japon, Chine, Espagne, Amérique Latine, Russie… en ce qui me concerne, ne m'intéressant vraiment au rap que depuis quelques années j'apprécie surtout le rap français que je trouve bien plus varié, réaliste et innovant que son grand-frère américain, où l'aspect revendicatif a été largement éclipsé par le culte du paraître et du « business »
Mais cette dérive n'épargne malheureusement aucun pays. Du coup le rap est un peu comme tous les arts : beaucoup de terre fade de laquelle on peut tirer quelques pépites d'or en la tamisant. En cherchant un peu on trouve toujours des artistes intéressants
Je ne connais pas tellement les raps des autres pays, c'est aussi pour cela que j'ai créé ce fil
Si vous suivez de près un rap particulier n'hésitez pas à nous le faire connaître
Pour ma part je livre deux des sons qui m'ont particulièrement marqué (ce ne sont pas les seuls évidemment), l'un américain l'autre français, et qui ma foi illustrent un peu la différence qu'il peut y avoir entre ces deux raps.
Eminem - Lose Yourself
Médine - Enfant du destin (Kounta Kinté)
Pour conclure, une belle histoire contée par nos amis du Groland
:
https://www.dailymotion.com/video/x6oh2u_un-grand-coup-dans-ton-cul_music
Et comme je suis fatigué je vais m'arrêter là pour aujourd'hui