Don Rodrigue / Don Rodrig
Sous moi donc cette troupe s'avance, / Sub mi este trop avansa,
Et porte sur le front une mâle assurance. / E porta sur le fronte un mascle seguransie.
Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort / Ni parti sincesente e per pronte reforsie
Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port, / Ni vide ni tremil arivante al porte
Tant, à nous voir marcher avec un tel visage, / De tante vider ni marxar con un tal fasie
Les plus épouvantés reprenaient de courage ! Le plu apavorat reprendeva audasie !
J'en cache les deux tiers, aussitôt qu'arrivés, / Mi esconde du trim pronte pos arivat
Dans le fond des vaisseaux qui lors furent trouvés ; / En le funde del barces alor encontrat
Le reste, dont le nombre augmentait à toute heure, / Le reste cui numer aumentava a tot or,
Brûlant d'impatience, autour de moi demeure, / Ardente impasiente, sirce mi, rest' ancor,
Se couche contre terre, et sans faire aucun bruit / Tomba a ter en silensie e com un sentinel
Passe une bonne part d'une si belle nuit. / Pasa un bon parte deste nocte tan bel
Par mon commandement la garde en fait de même, / Per mi comande tot le guardie fa idem,
Et se tenant cachée, aide à mon stratagème ; E, escondente se, ajud' al estratajem
Et je feins hardiment d'avoir reçu de vous/ E mi finje audas aver de vu comande
L'ordre qu'on me voit suivre et que je donne à tous. / Ce mi secui e da a totes en mi bande.
Cette obscure clarté qui tombe des étoiles / Este clar oscur ce cade del esteles
Enfin avec le flux nous fait voir trente voiles ; / Finalment' en le flu monstra tre-des veles ;
L'onde s'enfle dessous, et d'un commun effort / Le mar de funde inxa, e per comum esforsie
Les Maures et la mer montent jusques au port. / Le maures e le mar monta asta le porte.
On les laisse passer ; tout leur parait tranquille ; / Se lasa li pasar ; tot pare a li trancil ;
Point de soldats au port, point aux murs de la ville. / Nul soldat en le porte; nul al mures del vil.
Notre profond silence abusant leurs esprits, / Ni profunde silensie enganante li
Ils n'osent plus douter de nous avoir surpris ; / Li ja no duta plu aver surprendet ni
Ils abordent sans peur, ils ancrent, ils descendent, / Li aborda sen pavor, ancora, dezembarca,
Et courent se livrer aux mains qui les attendent. / E curi livrar se al manes en embusca.
Nous nous levons alors, et tous en même temps / Ni leva ni alor e tot, simultaniemente,
Poussons jusques au ciel mille cris éclatants. / Lansa asta le siel mil crites ensurdente.
Les nôtres, à ces cris, de nos vaisseaux répondent ; / Le nies, al crites, de ni barces responde ;
Ils paraissent armés, les Maures se confondent, / Li pari armat, le Maures se confunde,
L'épouvante les prend à demi descendus ; / Le pavor prende li a medie desendet ;
Avant que de combattre ils s'estiment perdus. / Ante de combater li crede se perdet.
Ils couraient au pillage, et rencontrent la guerre ; / Li curiva al sacaj e encontra la ger ;
Nous les pressons sur l'eau, nous les pressons sur terre, / Ni prensa li sur l'acue, ni prensa li sur ter,
Et nous faisons courir des ruisseaux de leur sang, / Ni fa curir de li un riverot sanguin
Avant qu'aucun résiste ou reprenne son rang. / Ante c' un rezistise reprendente su linie.
Mais bientôt, malgré nous, leurs princes les rallient, / Ma pronte, contra ni, su prinses se junta
Leur courage renait, et leurs terreurs s'oublient : / Su coraj renase i su pavor s'oblida :
La honte de mourir sans avoir combattu / Le vergonie de morir sen aver lutat
Arrête leur désordre, et leur rend leur vertu. / Para su dezorden: virtue recuperat.
Contre nous de pied ferme ils tirent leurs alfanges ; / Contra ni, firmemente, saca su simitar ;
De notre sang au leur font d'horribles mélanges. / De ni sangue e lie fa orible mesclar.
Et la terre, et le fleuve, et leur flotte, et le port, / E le ter, e le fluv, e li flor, e le porte,
Sont des champs de carnage où triomphe la mort. / Es campes de carnaj u triumfa le morte.
Ô combien d'actions, combien d'exploits célèbres / Oi cuante acsiones, cuante fasanies selebre
Sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres, / Av restat sen glorie 'n medie al tenebre,
Où chacun, seul témoin des grands coups qu'il donnait, / U totun solo save li colpe ce dava
Ne pouvait discerner où le sort inclinait ! / No poteva disernir u le sorte inclinava !
J'allais de tous côtés encourager les nôtres, / Mi andav' a tot parte encorajat le nies,
Faire avancer les uns et soutenir les autres, / Fa avansar unes e sutenir le otres,
Ranger ceux qui venaient, les pousser à leur tour, / ordenar ci veniva, impulsar li en su vez
Et ne l'ai pu savoir jusques au point du jour. / E mi no l'av savet asta le primatin
Mais enfin sa clarté montre notre avantage ; / Ma enfin su clarite monstra ni avantaj ;
Le Maure voit sa perte, et perd soudain courage : / Le maur vide su fin, e pronte perde fid :
Et voyant un renfort qui nous vient secourir, / Vidente un reforsie ci veni acudir,
L'ardeur de vaincre cède à la peur de mourir. / l'ardor de venser sed' al pavor de morir.
Ils gagnent leurs vaisseaux, ils en coupent les chables, / Li retorna al barces, de li corta le cables,
Poussent jusques aux cieux des cris épouvantables, / Solta asta le siel crites abominables,
Font retraite en tumulte, et sans considérer / Retira s'en tumulte, e sen considerar
Si leurs rois avec eux peuvent se retirer. / Si su Rejes con li pote se retirar.
Pour souffrir ce devoir leur frayeur est trop forte ; / Por sofrer le dever, li pavor es tro forte ;
Le flux les apporta, le reflux les remporte ; / le flu av aportat e le reflu porta ;
Cependant que leurs rois, engagés parmi nous, / Encuante su rejes, engajat entre ni
Et quelque peu des leurs, tous percés de nos coups, / E alcunes del lie, totes furat de ni
Disputent vaillamment et vendent bien leur vie. / Disputa valentes e vende car su vite.
À se rendre moi-même en vain je les convie : / A render se mi proprie a li en van invita
Le cimeterre au poing ils ne m'écoutent pas ; / Simitar al punie li permane asurdat
Mais voyant à leurs pieds tomber tous leurs soldats, / ma vidente a su pedes cader su soldates
Et que seuls désormais en vain ils se défendent, / E c'aor solitar en van li se defende
Ils demandent le chef ; je me nomme, ils se rendent. / Li demanda le xef ; mi noma mi, li rende.
Je vous les envoyai tous deux en même temps ; / Mi av li du enviat a vu en mezme or ;
Et le combat cessa faute de combattants. / Sesante le combat per falte de lutor.
(Ceci est ma contribution auxilinguiste à la lutte contre l'islamisme...)