Sujet: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 21:04
Pour reprendre la conversation sur la manière dont le Breton (donc toute langue) peut résister et dépasser une langue rouleau-compresseur comme le français (qui s'est imposé par la violence) ou l'anglais (qui s'impose par sa pression culturelle), je vous propose un tour des ressources web réellement en breton.
Le premier lien vraiment gratifiant est cette émission entièrement en breton, aujourd'hui... défunte, mais dont les enregistrements sont encore apparemment à disposition de tous, sans doute pour une durée limitée.
Il s'agit donc l'émission de Noël... d'une heure et 17 minutes !!!
... qui s'ouvre avec un premier aperçu de culture bien vivante, un chœur a capella qui a particularité d'être... jeune ! En effet, pour avoir encore fréquenté récemment quelques chorales endurantes de la côte d'Azur, je peux vous dire que la moyenne d'âge est très élevée d'ordinaire, ce qui n'est pas normal car dans un chœur les jeunes générations doivent relayer les moyennes et anciennes et aussi parce que les voix dans un chœur ont besoin d'une diversité et d'une stabilité d'ensemble, qu'il devient vite délicat d'obtenir si la totalité du chœur a passé les 60 ans (encore que les voix saines de 60 ans n'ont pas de souci à se faire, sauf si toute la puissance et la justesse du chœur repose sur elles).
La vidéo n'est pas sous-titrée, mais l'immersion complète me parait la base dans l'apprentissage et la promotion d'une langue. Les accents ne me paraissent pas aussi chantant que de la publicité pour l'eau minérale ou une émission anglaise en gaellique, mais je n'y connais rien.
***
A 9min30 environ la première chorale se présente choriste après choriste, et l'émission de fait devient votre première leçon de Breton langue étrangère (comment se présenter)
***
Vers 18 minutes, le présentateur les interrogent sur le fait que le nom de la chorale contient ce qui ressemble au mot arabe Allah. Je n'ai évidemment pas pu suivre : la chorale parait clairement chrétienne, est-ce que Allah est un mot breton ou est-ce que c'est un choix d'un trait d'union avec la culture musulmane ?
Ce qui me fait m'interroger sur la question de savoir si le breton est aussi appris bien aux beurs et aux blacks qu'aux blancs, ou bien si, comme pour le rock, le jeu de rôle ou la musique classique dans bien des cas cette richesse culturelle est réservée à ceux qui n'habite pas les ghettos de la cité - et tout reportage sur le breton sera forcément un reportage "blond" (où aucune peau colorée n'apparait dans le champ de la caméra) ?
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 21:13
La présentation de l'émission (en français non retraduit en breton), en elle-même très intéressante du point de vue de la promotion d'une langue, à propos des prix des 7 pêchés capitaux :
Citation :
Pour cette dernière émission, Webnoz a installé son plateau à la Basilique Notre Dame du Folgoët. Un lieu prédestiné car l'émission donne la parole aux Chorales et notamment à Allah's kanañ.
Le renouveau des chorales ?
Où les jeunes chanteurs enthousiastes d'Allah's kanañ expliquent leurs choix, leurs envies, et montrent leur réel plaisir à chanter ensemble…
Les Disprizioù 2010 ou les 7 péchés et la langue bretonne… "Les Disprizioù 2010 ont été remis, ces « prix citrons » de la langue bretonne récompensent chaque année les plus grandes aberrations à l'égard du breton. Cette édition 2010 revêtait un caractère particulier car les Disprizioù se sont adaptés au Lieu et ont été décernés sous la forme des 7 péchés capitaux, appelant naturellement à la pénitence !
Les lauréats 2010 sont :
ORGUEIL: Les élus incapables de s'entendre pour proposer un texte de loi unique sur la protection des langues régionales. De nombreux militants et associations travaillent en ce sens depuis des mois. Mais les députés de tout bord ont été incapables de se mettre d'accord sur un seul texte. Est-ce par intérêt électoraliste ou par égo froissé ? En tout, cas, il y aura donc deux textes déposés à l'Assemblée, ce qui diminue fortement leurs chances d'être adoptés. Ils méritent donc le Dispriz du péché d'orgueil.
PARESSE: Dispriz remis aux reponsables de l'enseignement catholique bilingue de Bretagne, compte tenu du peu d'efforts fournis de leur part pour développer les classes bilingues en breton. La rentrée 2010 est catastrophique, selon l'association Dihun, qui représente les parents d'élèves, et les effectifs sont en baisse. Inacceptable, à un moment où la demande d'enseignement du breton est là. L'enseignement catholique peut mieux faire, à condition de s'appliquer (ou de s'impliquer).
COLÈRE: Contre tous ces mails de haine à l'encontre de Nolwenn Leroy. L'ancienne chanteuse de la Star Ac chante en breton sur son dernier album, et le jury lui adresse, au passage, toutes ces félicitations, en l'encourageant dans son apprentissage et sa promotion de notre langue. Malheureusement, il faut constater que de nombreux bretonnants n'en font pas de même. Il suffit de lire certains commentaires sur Facebook, ou Youtube, qui lui reprochent de chanter en breton sans avoir étudié le kan ha diskan ou lui interdise l'usage de la langue sous prétexte d'être « plus française que bretonne ». Ces commentaires semblent d'un autre âge, d'une intolérance extrême, et ont entraîné un Dispriz de la colère.
GOURMANDISE: Remis aux télévisions locales qui se sont engagées à diffuser et à produire des émissions en breton, à raison de 20 minutes par semaine, et ont été financièrement soutenues par la Région dans ce sens. Aujourd'hui, leurs téléspectateurs bretonnants attendent toujours. Ont-elles eu les yeux plus gourmand que le ventre ? D'où ce Dispriz de la gourmandise.
AVARICE: Décerné à toutes les communes du Finistère qui ont supprimé l'initiation à la langue bretonne dans les écoles primaires. Cette initiation avait été initiée par le Conseil général, à hauteur d'une heure par semaine. Elle permettait à tous les enfants d'avoir un minimum d'accès à la langue bretonne, et a rapidement connu un vif succès. D'où la demande du Conseil général de mettre aussi les communes à contribution lorsque ces cours concernaient leur territoire. Certaines d'entre elles se sont alors retirées du projet, sous prétexte d'économie, et ont privé les enfants d'une ouverture précieuse vers la langue et la culture bretonnes. Péché d'avarice.
LUXURE: Remis à trois écrivains, ayant appelé ou décrit ce péché dans leurs romans. De tels écrits n'existaient pas jusqu'à présent en breton. Ces écrits « modernes » risquent de détrôner notre « Buhez ar sent ». Jamais la littérature bretonnante n'était allée aussi loin, et si nous ne prêtons pas garde, la jeunesse bretonnante risque de se ruer majoritairement sur de tels écrits. Horreur ! Un dispriz est donc remis à Maïwenn Movan pour son roman « Buhez Prevez Lola P », qui évoque les errements amoureux d'une jeune bretonne. À Gégé Gwen, pour ses nouvelles dans « Ya! » qui décrit avec gourmandise les plaisirs du corps et des sens. Et à Ninnog Latimier pour sa traduction des « Monologues du vagin » en breton. Tous trois ont commis péché de luxure. Un péché nouveau en littérature bretonnante.
ENVIE: Décerné sans hésitation à Brezhoweb. Coupable d'avoir regardé de trop près les budgets de l'audiovisuel en Europe, attribués aux langues minoritaires. Plus de 300 millions pour les radios et télévisions catalanes. Plus de 100 millions de livres pour l'audiovisuel en gallois. Et plus de 15 millions de livre pour l'audiovisuel en gaëlique écossais, qui compte 60.000 locuteurs (200.000 bretonnants en Bretagne). Face à de telles sommes, l'équipe de Brezhoweb reconnaît qu'elle a péché par Envie, et même jalousie. Ce qui est un grave péché. Elle fera donc pénitence pendant ces fêtes de fin d'année.
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Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 21:19
Je vois que même des bretonnants voudraient enfermer leur langue dans un folklorisme confortable. Une jolie coiffe avec ça?
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Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 21:43
Quand j'ai commencé à apprendre le breton (malgré le peu de ressources disponibles) j'avais cherché des chansons en breton. En dehors de Nolwenn Leroy qui, semble-t-il, est fortement controversée par rapport à sa prononciation j'avais trouvé deux autres versions du chant Tri martolod que voici:
https://www.youtube.com/watch?v=4itvlCk5CtA
et
https://www.youtube.com/watch?v=lYFWyQggIa0
Ainsi que ce site qui donne quelques cours: http://www.keravon.com/skol/
Citation :
Ce qui me fait m'interroger sur la question de savoir si le breton est aussi appris bien aux beurs et aux blacks qu'aux blancs, ou bien si, comme pour le rock, le jeu de rôle ou la musique classique dans bien des cas cette richesse culturelle est réservée à ceux qui n'habite pas les ghettos de la cité - et tout reportage sur le breton sera forcément un reportage "blond" (où aucune peau colorée n'apparait dans le champ de la caméra) ?
Selon moi, il faudrait déjà apprendre le breton aux jeunes bretons avant de se soucier des "beurs" ou "blacks" qui n'ont à mon avis que peu d'intérêt à apprendre une langue qui ne les aidera pas à trouver un emploi et surtout, aucune racine avec cette culture. Ceci dit, sans être jamais allé m'inscrire à un cours de breton je suppose fortement que si un "beur" ou un "black" vient s'inscrire ils ne vont pas le jeter dehors
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 22:25
Merci pour ces liens.
A la 81ème minute de l'émotion, ils évoquent les critiques sur Nolwenn Leroy. 84ème minute, un dessin animé en breton - à nouveau un excellent moment de promotion.
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 8 Juil 2011 - 23:34
On avait un peu étudié le cas du breton à la fac mais c'est surtout les chants de Denez Prigent qui m'ont donné envie de m'y mettre plus sérieusement. Ces chants sont disponibles sur le net et les paroles (et traductions) aussi ! J'ai aussi un assimil de breton qui est pas trop mal.
_________________ Idéolangues : elko, kelep, englo, ... (+27) Idéomondes : Multivers d'Aegis, monde du Losda
Invité Invité
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 1:19
Ce qui domine dans ce genre de mise en scène, c'est le côté militant, caricatural et artificiel, l'optimisme forc(en)é qui peine à dissimuler une profonde amertume, un peu comme un clown triste, alcoolo et cocu, dans un petit cirque de campagne qui vivote...
Le néobreton est une langue étrangère pour la population de Bretagne, surtout les jeunes, au même titre que le chinois mandarin... Ceux, très peu nombreux, qui font exception, massacrent la langue plus qu'il ne la parlent, leur langue réelle étant le français, mais il font cet effort, car le breton est devenu leur gagnepain...
Nolwenn Leroy, qui a eu l'idée saugrenue (avant d'instrumentaliser à son tout la langue bretonne) de prendre le nom de ses grand-parents pour faire carrière à la télé (de son vrai nom breton "Le Magueresse" de "magerez" la nourrice), chante très bien en breton, pour quelqu'un qui ne parle pas la langue, et ne fait pas plus de faute de prononciation qu'un Denez Prigent ou un Alan Stivell...
Si vous voulez entendre un chanteur qui prononce correctement, je vous conseille Yann Fañch Kemener (Jean-François Quéméneur). Pour l'apprentissage et la lecture, la maison d'édition Emgleo Breiz, qui utilise une orthographe plus respectueuse de la phonologie de la langue (dans les deux dialectes KLT et vannetais), ce qui vous évitera d'apprendre surtout à faire des fautes, le plus souvent gravissimes et irréversibles...
Pour ma part, j'écris le breton dans une orthographe encore différente de cette dernière, mais qui en reste assez proche.
Si vous voulez faire un test, voici une première leçon de breton:
Voyelles: A, E(é/è), I, O, U, EU et OU (comme en français) Toutes les voyelles sont nasales devant N ou M Quand le N nasalise la voyelle qui le précède tout en restant muet, on l’écrit Ñ (facultatif) > breman / bremañ / brema = maintenant
Semi-voyelles: W , Y, mais aussi I, OU et U
Diphtongues: AI, EI comme "ail" et "eil" en français AO peut se réduire à Ô AE peut se réduire à Ê, parfois prononcé [ÉA] sous l'accent tonique (Léon) AOU accentuer fortement le A ; peut se prononcer OW EO accentuer fortement le E. peut se reduire à E IW (IOU) accentuer fortement le I
Consonnes : K..... T... P M N L R G..... D.. B C’H...S.. F H.... Z.. V ....... CH ........ J
GN et ILL comme en français
Le H est le plus souvent aspiré et le C’H l’est toujours et plus fortement.
Finales: les consonnes douces/sonores (G D B H Z V J) se prononcent dures en finale des mots : K T P C’H S F CH Ex : Tog [tok] (chapeau)
Liaisons : les consonnes dures/sourdes s’adoucissent en finale devant une voyelle : K T P C’H S F CH > G D B H Z V J Ex : Kement > kemend-all (autant)
Sous l'accent tonique, les voyelles sont en général fermées et longues lorsqu'elles sont suivies par une consonne sonore simple (B D G J L M N R V Z) Ex: Mab (fils) [ma: p], Mad (bon) [ma: t], Gouela (pleurer) [gwe: la]...
En breton la consonne initiale d'un mot peut changer (mutation) en fonction du mot qui précède ou de son genre (masculin/féminin) et nombre (singulier/pluriel). Les mutations peuvent être simples (adoucissement et durcissement) ou double (spiration). Les mutations par adoucissement figurent au tableau ci-dessous. La mutation par durcissemnet est le phénomène inverse. La mutation par spiration équivaut à une double mutation par adoucissement: Ex: adoucissement: P>B, B>V ; spiration: P>V (ou F) ; durcissement: B>P...
Tableau des mutations : K > G > H (C'H) T > D > Z (S) P > B > V (F) M > V C’H > H (C'H) S > Z (S) F > V (F) CH > J (CH)
Les variantes entre parenthèses correspondent parfois à des prononciations locales, souvent à des conventions orthographiques erronées ("peurunvan"/breton "unifié").
Pour faciliter l'apprentissage on fera précéder les mutations d'une apostrophe.
Vocabulaire:
Klask (chercher) O klask (cherchant) Emaon (je me trouve / je suis) Emaoud (tu te trouves / tu es) Emaom (nous nous trouvons / nous sommes) Emaoh (vous vous trouvez / vous êtes) Va 'zog (mon chapeau) Da 'dog (ton chapeau) Hon togou (nos chapeaux) Ho togou (vos chapeaux) Eo (c'est) N'eo ked (ce n'est pas) Din (à moi) Did (à toi) Me (moi) Te (toi) Petra? (quoi?)
Application : An tog (le chapeau)
Da 'dog eo ? [da-dó-gé(o)] (c’est ton chapeau ?) N’eo ked ! [nekét] (non!) N’eo ked va 'zog din-me ! [ne-ke-va-zók dím-me] (ça n’est pas mon chapeau) Da 'dog did-te eo ! [da-dóg-díd-dé(o)] (c’est ton chapeau) Emaon o klask va 'zog. [emáõn-o-klázg-va-zók] (je cherche mon chapeau) O klask petra emaoud ? [o-klask petrá emáout] (tu cherches quoi?) Va 'zog emaon o klask. [va-zóg-emáõn-o klásk] (je cherche mon chapeau)
Exercices:
1) Lisez le dialogue à voix haute plusieurs fois jusqu'à le savoir par coeur;
2) Mettez-le aux personnes du pluriel, puis répétez l'exercice 1;
3) Réécrivez-le en remplaçant TOG par BAG (bateau), puis répétez l'exercice 1;
4) Mettez-le aux personnes du pluriel, puis répétez l'exercice 1;
Faites les exercices écrits en réponse à ce message (pour la correction)
Attention! > Or bagou (nos bateaux) / Ho 'pagou (vos bateaux)
(Autre pluriel possible pour "bag": bigi > Or bigi / Ho pigi)
Dernière édition par Patrick Chevin le Sam 9 Juil 2011 - 21:55, édité 1 fois
PatrikGC
Messages : 6732 Date d'inscription : 28/02/2010 Localisation : France - Nord
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 15:07
Le web reste quand même une bonne opportunité de diffusion pour la langue bretonne, même massacré phonétique à la sauce francophone.
Peut-être que Nolwenn Leroy n'est pas une bretonne 100% pure souche label déposé, mais elle a réussi à faire son petit buzz autour de son album bretonnant, et même si certains puristes crient à la trahison, peut-être que s'il y aura des locuteurs en plus dans quelques années, on le devra à un effet de curiosité de ceux et celles qui auront écouté l'album en question, et se seront pris au jeu d'apprendre la langue.
C'est moche à dire, mais je préfère une langue parlée même mal qu'une langue morte et figée dans sa beauté antique dans la poussière des archives...
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 16:10
J'ai écouté cette version de la chanson Tri Martolod (dont l'interprète est conseillé par Patrick Chevin) et j'ai l'impression que parfois il roule ses R et parfois non... Il y a une règle précise ? Sinon, je ne vois pas trop en quoi sa prononciation diffère de celle entendue dans les émissions de télé.
Sinon, le présentateur de l'émission, je le connais de Brezhoneg Bemdez, de petites séquences très imagées sur les usages du breton.
_________________ Le grand maître admin-fondateur est de retour. - Bedal Original, bien justifié, et différent du sambahsa et de l'uropi. - Velonzio Noeudefée Nemszev m'a fait une remarque l'autre jour, et j'y ai beaucoup réfléchi depuis. - Djino J'ai beaucoup de tendresse pour ta flexion verbale. - Doj-Pater Pourquoi t'essaies de réinventer le sambahsa ? - Olivier Simon Oupses ! - Anoev
Invité Invité
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 19:27
Le R roulé a régressé comme en France. En Bretagne, il s'est maintenu dans certains coins et pas dans d'autres. Aujourd'hui les gens ne parviennent plus à rouler les R et préfèrent enseigner une prononciation plus française par paresse: "Ils ont déjà assez de mal comme ça. Pas la peine d'en rajouter" (sic)... Ceci dit, même si l'on roule les R, il en est qui ne doivent pas l'être parce qu'il suivent une mutation du G en H muet que l'orthographe n'écrit plus (sauf en vannetais traditionnel) : Gober (faire) > (h)ober / Kaozeal a (h)ran brezoneg (je parle breton)...
Le problème, c'est que les néos ne font plus la différence entre R / RR / C'H / RC'H / C'HR / RH / HR, puisque le R est prononcé "à la parisienne", c'est-à-dire, comme un C'H / H...
YF Kemener chante des chansons de divers parlers et s'efforce de suivre la prononciation d'origine, d'où cette variation dans sa façon de prononcer et d'accentuer. Si cela se produit dans une même chanson, alors c'est qu'il semmêle les pinceaux... Peurvadelez ne vez ked er bed man / La perfection n'est pas de ce monde...
Dernière édition par Patrick Chevin le Sam 9 Juil 2011 - 22:03, édité 3 fois
Olivier Simon Modérateur
Messages : 5572 Date d'inscription : 20/02/2009 Localisation : Lorraine
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 19:44
Je ne sais pas si je l'ai déjà indiqué.
Ici, on peut télécharger le premier tome (1978) du Breton sans Peine d'Assimil : http://www.scribd.com/doc/35544455/Assimil-Le-Breton-Sans-Peine-Tome-I-1978
Invité Invité
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 9 Juil 2011 - 22:15
Si vous voulez écouter de très belles chansons bretonnes en français, je vous conseille Gilles Servat (Kalondour, L'hirondelle, Le pays, Les embrasser, Je dors en Bretagne ce soir, etc.)...
Je viens d'écouter Tri martolod par YFK. En effet il fait qq mélanges... Les R, ils les roule, en général, parfois très légèrement. Sa prononciation a des accents du sud de la Bretagne (entre Quimper et vannes), avec une nette tendance vers le vannetais mais avec retenue. Par ex. il palatise le GU/GW [dj] mais pas systématiquement, et prononce Z là où le vannetais prononcerait un H...
Là où le breton standard dit: [maR'tolod 'yaouank], on entend bien: [marte'lod ieù'enk] (vannetais).
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 14:11
Patrick Chevin a écrit:
Ce qui domine dans ce genre de mise en scène, c'est le côté militant, caricatural et artificiel, l'optimisme forc(en)é qui peine à dissimuler une profonde amertume, un peu comme un clown triste, alcoolo et cocu, dans un petit cirque de campagne qui vivote...
Je crois que quelque soit la langue enseignée, il faut faire la preuve de tonicité et d'humour. Bien sûr, il vaut mieux être honnête dans son ton et ses gestes et vraiment se sentir bien et s'amuser, sinon ça s'entend et ça se voit, et ça sonnera faux.
Après je dirais que tant qu'il y a de la vie (la langue est pratiquée), il y a de l'espoir, même si je pense que la pratiquer seulement contre de l'argent n'est pas une preuve de vie.
***
Sur le R roulé, il est utilisé en chant pour pratiquer (ne riez pas...) la détente et l'agilité de la langue (l'organe) et de tout ce qui y est accroché (gorge, glotte, vol du palais). Pour s'entraîner à le produire, on émet le son BRRR en montant et descendant comme pour imiter une moto qui démarre. Ensuite on chante littéralement un air sur le RRRR roulé (d'habitude je fais chanter Summer Time extrait de Porgy & Bess).
Ne pas savoir rouler les R, ne pas s'entraîner à rouler les R, c'est non seulement un signe de crispation musculaire mais également un mauvais signe pour la santé de la voix.
Cela signifie souvent que chaque attaque de voyelle, chaque formation de consonne dissimule un coup glottal qui à terme va détruire l'appareil vocal, en conjonction avec d'autres gestes ou produits nocifs (gueuler, fumer, respirer l'air pollué, boire de l'alcool, manger des saletés etc.). Plus c'est une garantie que "le ménage n'est pas fait" dans l'appareil vocale, les vibrations naturelles sans stress accompagnant les mouvements vocaux nettoient les déchets et impuretés qui s'accrochent et s'accumulent dans toute la zone, et lissent les couches cellulaires en cours de remplacement (prévention des polypes).
Le premier signe physique de crispation de l'appareil vocal est l'enrouement, les "couacs" (étranglement vocal - la voix monte et descend en s'interrompant) et l'incapacité de d'émettre un son aigu très doux en continue (effet de voix en pointillé type message "Morse"). ça arrive très souvent chez le prof (de FLE ou autre) épuisé.
La paresse bien réelle des étudiants (et surtout des professeurs) est simplement inadmissible, parce que dans les faits, ce n'est pas un effort de rouler un R mais une absence d'effort (l'effort de crispation est absent lorsqu'on peut et sait rouler les R). En plus c'est un véritable entraînement qu'il ne faut jamais abandonner au fil de la vie si l'on veut encore pouvoir parler correctement à 80 ans par exemple. Et ça muscle le visage et le cou donc prévient l'affaissement des tissus et les rides (ce n'est pas une blague).
Dernière édition par Greenheart le Dim 10 Juil 2011 - 14:39, édité 1 fois
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 14:38
Si l'émergence et la réémergence du breton dans la chanson populaire est une indiscutable marque de vie, son usage dans la musique rock et toutes ses mouvances l'est encore plus.
Tri Bleiz Die est apparemment un groupe de rock indépendant (le son rappelle Noir Désir ou Matmatah) qui, sauf erreur de ma part, chante en Breton (avec quel accent ?)
Donc une solution pour maintenir et étendre la pratique d'une langue serait de composer dans tous les styles de musique qui actuellement ont une fonction sociale, sont populaires ou simplement sont suffisamment belles ou bouleversantes pour interpeller et être repris et imité par les auditeurs.
***
Sur "Jean-François Quéméner" (orthographe recommandée par Youtube, j'ignore sur quelle base exactement).
https://www.youtube.com/watch?v=3y9UgtSC-P4
L'accent est beaucoup plus agréable à entendre que dans l'émission télé plus haut. Que la langue soit fluide et belle à entendre (et sans doute agréable à prononcer) ne serait-il pas une preuve qu'elle est correctement parlée ?
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 14:41
Olivier Simon a écrit:
Je ne sais pas si je l'ai déjà indiqué.
Ici, on peut télécharger le premier tome (1978) du Breton sans Peine d'Assimil : http://www.scribd.com/doc/35544455/Assimil-Le-Breton-Sans-Peine-Tome-I-1978
Apparemment, c'est seulement possible pour ceux qui acceptent de vendre leur âme à Facebook
Olivier Simon Modérateur
Messages : 5572 Date d'inscription : 20/02/2009 Localisation : Lorraine
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 15:24
Greenheart a écrit:
Olivier Simon a écrit:
Je ne sais pas si je l'ai déjà indiqué.
Ici, on peut télécharger le premier tome (1978) du Breton sans Peine d'Assimil : http://www.scribd.com/doc/35544455/Assimil-Le-Breton-Sans-Peine-Tome-I-1978
Apparemment, c'est seulement possible pour ceux qui acceptent de vendre leur âme à Facebook
Ah bon ? Moi je n'utilise pas mon compte Facebook sur Scribd.
Donc, crée-toi simplement un compte sur Scribd et tu y auras accès.
Cependant, la possibilité de téléchargement varie selon la volonté du publicateur du document. Peut-être que celui-ci veut éviter d'avoir (trop) de problèmes avec les éditions Assimil.
Avec un peu de chance et des bons anti-virus, il n'est pas impossible que le même bouquin se trouve en téléchargement ailleurs....
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 16:58
Petit test comparatif entre la culture bretonne (celle avec la coiffe, passéiste et tout et tout) et la culture française actuelle "dominante".
L'équivalent breton d'un sirtaki grec ou d'une sevillanne espagnole dont le principe de base est de danser à plusieurs, former des couples et décoller du sol sans drogues.
L'équivalent français actuel, évoquant l'ambiance en discothèque dont le principe est le même qu'une salle de bal : danser à plusieurs, former des couples et décoller du sol... euh, sans drogue.
Qui à votre avis, résiste le mieux au rouleau compresseur anglais ?
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Dim 10 Juil 2011 - 17:28
Je réalise au fil de ces extraits d'émissions, de danse etc. que la survie d'une langue tient au fait que ses locuteurs bossent, pas forcément dans la langue, mais dans tous les domaines de civilisation.
Par exemple, ce qui différencie un "bal breton" où l'on danserait en cercle et une sortie en discothèque où l'on s'ennuie tellement qu'il faut vider les bouteilles d'alcool, sniffer la coke et gober le reste pour arriver à supporter l'ambiance, c'est qu'à un moment le groupe de locuteurs s'est réuni régulièrement pour bosser ensemble.
C'est un effort que le p.teux et la p.tasse moyenne ne sont pas près à fournir, ni socialement, ni sportivement, ni linguistiquement - non pas par infériorité individuelle (ou supériorité du locuteur breton ou de n'importe quelle langue minoritaire), mais suite à un conditionnement basé sur l'ignorance, la confusion et la corruption ("je te ferai des cadeaux si tu continues d'être un gros nul - une grosse nulle").
Or, c'est bien la technique de la corruption qui domine dans les principes d'éducation actuel en France, en particulier à l'école ("oh mon pauvre petit, tu risques d'avoir à bosser pour avoir une bonne note - si on supprimait les notes pour que les choses soient plus agréables pour toi, hein que tu es d'accord mon petit amour trognon, tiens bouffe un cookie de plus, ça fera plaisir à ton dentiste et comme tu seras trop gros / grosse pour séduire, tu resteras le petit bébé jouflu à tonta papamaman adoré !!!).
C'est la même chose pour une chorale, mais ce serait aussi la même chose pour une entreprise de pointe où l'on ne parlerait que breton (ce qui pourrait compliquer juste un brin l'espionnage industriel).
Par exemple, ce qui différencie les chansons entièrement en français ou au breton, de l'avalanche récente de chansons moitié français moitié anglaise, c'est qu'à un moment il faut écrire de vraies paroles, qui vont dans le même sens que la musique, au lieu de simplement copier / coller des bribes piquées dans les chansons précédentes - et côté éditeur, il faut prendre la peine de les écouter et les comprendre, à tous leurs niveaux, ce qui n'est pas possible quand on sait à peine lire et que chercher un mot dans une dictionnaire vous coûte au minimum cinq minutes et une mini dépression nerveuse...
La notion de performance, individuelle et collective est donc étroitement liée à la survie d'une communauté et de sa langue.
Bien sûr, la notion de performance peut être aussi détournée et corrompue à des fins amorales, mais ce n'est plus alors de la performance, c'est seulement un jeu de massacre.
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 16 Juil 2011 - 1:10
Danser et chanter c'est bien joli, mais lire, est-ce que c'est vraiment possible ?
Comment le Breton s'impose-t-il dans les bibliothèques virtuelles du net ?
Commençons par le redouté Google Books, l'ennemi public numéro 1 des bouquinistes et une ressource parcellaire mais remarquable en matière de travaux et littérature du 17ème au 19ème et l'occasion 20ème, mais ne rêvons pas trop.
Je parle bien entendu d'une disponibilité intégrale d'un ouvrage papier possiblement utile pour des recherches ou la pratique de la langue bretonne...
Mauvaise surprise : le breton ne figure pas comme langue permettant de faire une recherche de tous les bouquins téléchargeables intégralement dans cette langue.
Seconde mauvaise surprise : taper "brezhoneg" ne permet pas d'accéder à autre chose que des "petits futés" de la Bretagne (des guides à usage commerciaux).
Bonne surprise : il suffit de taper le mot "breton" (en français dans le texte) pour tomber sur un début de manne (360.000 ouvrages téléchargeables ?).
Il faut cependant franchir un barrage anti-robot pour télécharger un premier exemplaire du "Conteur breton".
Cela n'aura pas été facile.
***
Et du côté de Gutenberg.org, une des premières bibliothèques de celles que nos chers gouvernements tentent quotidiennement d'assassiner massivement en faisant varier les règles des oeuvres du domaine public de manière imprévisible et toujours dans un seul sens : toujours plus dans les poches de leurs amis, toujours moins dans les poches des citoyens qu'ils sont censés représenter.
http://www.gutenberg.org/
Première bonne surprise : le breton figure dans l'index de recherche par langue (avec l'Espéranto notamment).
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Sam 16 Juil 2011 - 1:46
Les danses bretonnes me font penser au tap dance irlandais.
_________________ Le grand maître admin-fondateur est de retour. - Bedal Original, bien justifié, et différent du sambahsa et de l'uropi. - Velonzio Noeudefée Nemszev m'a fait une remarque l'autre jour, et j'y ai beaucoup réfléchi depuis. - Djino J'ai beaucoup de tendresse pour ta flexion verbale. - Doj-Pater Pourquoi t'essaies de réinventer le sambahsa ? - Olivier Simon Oupses ! - Anoev
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Mer 27 Juil 2011 - 18:26
Un long métrage animé entier récent grand public en Breton, et une grande réussite en lui-même, c'est possible.
Brendan et le livre de Kells est sorti en dvd et blu-ray je pense l'année dernière. Le film raconte comment un jeune moine irlandais découvre un livre aux enluminures inachevées et comment il choisit de le sauver malgré son oncle, les vikings et quelques sortilèges. C'est très très beau, la musique est signée Bruno Coulaix, et l'émotion est touchante pour des situations plutôt rares au cinéma.
L'édition française comprend en plus de deux pistes sonores en surround et stéréo et la piste en breton en stéréo.
Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ? Ven 19 Aoû 2011 - 22:13
Un fil intéressant sur la difficulté de parler le Breton en Bretagne sur le forum Babel :
http://projetbabel.org/forum/viewtopic.php?t=70
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Sujet: Re: Comment le breton survit-il à l'heure du web ?