On m'a passé une petite commande cet été, une cliente suisse voulait quelque chose pour un univers sur lequel elle travaille, avec quelques contraintes:
La langue devait avoir une sonorité similaire à celle du latin. Mais pour la grammaire, j'avais carte blanche.
La cliente voulait un peu de grammaire, mais seulement les rudiments, je n'ai donc pas créé une langue complètement fonctionnelle.
Elle m'a aussi demandé de concevoir la phono de l'ancêtre de la langue, sans grammaire, juste de quoi approfondir.
La langue devait être assez simple pour qu'elle puisse elle-même lui inventer des mots au fur et à mesure qu'elle en aura besoin.
Le contrat étant maintenant rempli, je peux vous en dire plus sur ce que j'ai créé, le levostis. Levostis signifie simplement "langue" (parlée), le levostis a d'autres noms mais j'ai opté pour celui-ci par simplicité pour mes documents, ses locuteurs sont une espèce d'êtres mi-hommes, mi-guépards, mais il utilise des sons humains. Voici comment lire sa romanisation:
m, n, p, t, b, d, g, f, s, h, v, l, r et a se prononcent comme leurs équivalents en API
c se prononce /k/ et x se prononce /ks/
toute consonne écrite deux fois d'affilée est géminée
i et u se prononcent /j/ et /w/ avant une autre voyelle et /i/ et /u/ ailleurs
e et o se prononcent en principe /ɛ/ et /ɔ/, mais les allophones [e] et [o] sont répandus
un accent aigu marque une voyelle longue
toute suite de voyelles est prononcée avec un hiatus
l'accent tonique tombe sur la dernière voyelle si elle est longue, sinon il tombe sur l'avant-dernière. Une voyelle longue est toujours accentuée.
Le levostis est assez analytique et plutôt simple à prononcer, mais son point le plus intéressant et de loin le plus complexe (je me suis gouré pas mal de fois) est sa morphologie, voyez quelques dérivations:
mál (aider) > moglus (assistant)
rixa (graver) > sarcira (effacer)
adra (guider) > odros (roi)
sunur (huit) > singrí (huitième)
Ou quelques paradigmes nominaux:
Possédé
Lié
Non-possédé
"serviteur"
coérus
coersura
ceérsis
"épée"
prá
pragra
prés
"oiseau"
rúo
ruóra
ríes
Comme vous le voyez, les changements de radical sont très fréquents, les voyelles et les consonnes se transforment, et le pattern semble impossible à cerner. Serait-ce une langue hautement fusionnelle avec une morphologie gabaritique, comme les afro-asiatiques? Pas vraiment, en fait, tout cela vient de la phonologie inhabituelle du proto-levostis: il utilisait d'une part un curieux système vocalique vertical consistant en une seule voyelle phonémique, */a/, et des */ə/ épenthétiques partout ailleurs, et d'autre part une harmonie consonantique particulière entre consonnes simples, palatalisées et labialisées qui se propage de droite à gauche mais est bloquée dans certains cas particuliers, je me suis beaucoup inspiré des langues tchadiques pour concevoir tout ça.
Ajoutez à ça une série de changements phonétiques pour obtenir le levostis moderne, et vous obtenez une langue où la forme qu'un mot va prendre n'a pas du tout l'air prévisible mais l'est en réalité entièrement si on connait sa proto-forme. Regardez celles des mots des exemples précédents, elles devraient maintenant vous paraitre plus transparentes:
/maxəl/ > /mʷaxlʷəs/
/rəksa/ > /sərkəsa/
/ʔaθra/ > /ʔʷaθrʷas/
/sʷəŋʷər/ > /sʲəŋrʲəxʲə/
/kʷaʔajrʷəs/, /kʷaʔajrsʷəra/, /kʲaʔajrsʲəs/
/praxə/, /praxra/, /prʲaxʲəs/
/rʷəʔʷa/, /rʷəʔʷara/, /rʲəʔʲas/
Je commencerai bientôt à détailler la grammaire. Avez-vous déjà des questions?
Dernière édition par Wojnicz le Ven 4 Nov 2022 - 1:25, édité 3 fois
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Velonzio Noeudefée Référent Actualités
Messages : 8431 Date d'inscription : 14/02/2015 Localisation : Rhône-Alpes
Sujet: Re: Le levostis Lun 3 Oct 2022 - 21:34
Le pattern régulier de la langue ancienne ne m'est pas encore d'une clarté absolue.
Mais dans l'ensemble, je comprends bien.
Encore un beau projet intéressant, idéolinguistiquement parlant, à ton actif.
Niluusu kivanu ki-so∂em-korondo-s-uvi gu koyoodnißju. (dudyi) / Midevim iſeet dotſe iJebiriotoẏot éß umowonêyû. (∂atyit) Je rêve que les humains deviennent les jardiniers de la vie dans le système solaire.
Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Lun 3 Oct 2022 - 22:10
L'ajout d'affixes aux proto-racines est susceptible de déplacer les schwas car il peut réorganiser la syllabification du mot. Et la palatalisation et la labialisation sont soit inhérentes à la racine soit portées par un affixe, qui transmet sa palatalisation ou labialisation aux syllabes précédentes du mot mais pas aux suivantes. Par exemple, la forme non possédée des noms s'obtient avec un suffixe *-/s/ palatalisé, ce qui explique pourquoi les voyelles des radicaux deviennent antérieures dans les exemples de formes non possédées du tableau comme les anciens */a/ sont devenus des /ɛ/ après une consonne palatalisée, et les anciens schwas des /i/.
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Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Mar 4 Oct 2022 - 12:37
Aujourd'hui, quelques rudiments de grammaire, les noms et les adjectifs!
La conversion lexicale est très productive en levostis, les adjectifs sont souvent aussi utilisables comme des noms. Les deux sont faiblement flexionnels, mais leurs flexions sont très souvent accompagnées de changements de radical. Le levostis n'a pas d'articles, ses adjectifs ne s'accordent pas avec ses noms, et les noms n'ont pas de flexion de nombre, le pluriel est exprimé par des particules, no marque le pluriel additif et per l'associatif (un nom ne peut pas prendre les deux en même temps):
edrelis: un/le roi
no edrelis: des/les rois
per edrelis: un/le/des/les roi(s) et son/leur entourage
Les noms ont généralement 3 formes, la possédée, la liée et la non-possédée. Cependant, certains noms n'ont que la forme possédée car ils ne peuvent pas apparaitre sans possesseur, ce sont des noms de possessions inaliénables comme les parties du corps ou les membres de la famille. Les noms propres n'ont pas de forme liée, et les emprunts sont généralement invariables à moins d'être très anciens.
La forme possédée est le radical seul, la forme liée finit par ra ou la et la non-possédée par s, qui a tendance à changer les voyelles du radical en voyelles antérieures. La forme liée en ra est de loin la plus répandue, la n'est employée qu'avec les noms dont la forme possédée finit par ri, ru, re, res, rel, ro, ros, rol ou ra ainsi qu'avec certains dont la forme possédée finit par ris, ril, rus, rul, ras ou ral, cette forme est apparue suite à une dissimilation.
Possédé
Lié
Non-possédé
"braise"
nuxa
nuxara
nuxes
"roi"
odros
odrolla
edrelis
"père"
apa
-
-
Comme vous le voyez, apa étant une possession inaliénable, il n'apparait que sous forme possédée. La forme possédée est employée quand un nom est... possédé, il précède son possesseur, qui peut lui-même être possédé:
coérus edrelis: le serviteur du roi
prá coérus edrelis: l'épée du serviteur du roi
La forme liée est employée quand un nom précède l'adjectif le qualifiant. Un nom possédé ne peut pas être suivi d'un adjectif, donc tous les noms liés sont non-possédés.
odrolla cri: le vieux roi
Elle sert aussi à former des noms composés, par exemple "rouge-gorge" se dit ruóra nuxa (oiseau-braise). Le noyau précède alors le modifieur.
La forme non-possédée est employée le reste du temps.
Les adjectifs ont 2 formes, la non-liée et la liée. La non-liée est le radical seul, la liée se forme en suivant les mêmes règles que pour les noms:
Non-lié
Lié
"rouge"
porus
possura
"vieux"
cri
crila
La liée est employée quand un adjectif précède le nom qu'il qualifie. Quand un nom est possédé, un adjectif peut le précéder mais pas le suivre, le reste du temps, la place de l'adjectif est libre.
crila edrelis: le vieux roi
sundra prá crila edrelis: la longue épée du vieux roi
Le levostis n'a pas de verbe "être", quand un nom à la forme non possédée précède un autre nom ou un adjectif, le second mot est l'attribut du premier, et quand un adjectif à la forme non liée précède un nom, il est son attribut:
edrelis cri: le roi est vieux
sun prá edrelis: l'épée du roi est longue
Le système de possession est inspiré de l'état construit des langues afro-asiatiques, tandis que le système de ligature entre les adjectifs et les noms est inspiré du tagalog. Ce sera tout pour cette fois, ne vous inquiétez pas, le reste est beaucoup plus simple!
Dernière édition par Wojnicz le Jeu 6 Oct 2022 - 20:25, édité 1 fois
Mardikhouran
Messages : 4313 Date d'inscription : 26/02/2013 Localisation : Elsàss
Sujet: Re: Le levostis Mar 4 Oct 2022 - 18:46
J'ai hâte d'en savoir plus. Pour que la cliente puisse créer ses propres mots, lui as-tu donné les règles de création de la proto-langue puis un "algorithme" de dérivation phonétique ?
Pour qui voudrait en apprendre davantage sur le phénomène d'ablaut des langues tchadiques qui a inspiré le système levostis, la section 2.3 de cette grammaire du moloko en accès ouvert (en anglais) est une bonne lecture.
Velonzio Noeudefée Référent Actualités
Messages : 8431 Date d'inscription : 14/02/2015 Localisation : Rhône-Alpes
Sujet: Re: Le levostis Mar 4 Oct 2022 - 19:21
Merci Mardikhouran, alors, enfin de retour ?!
Belle validation de ta part pour le Levostis, mais Wojnicz la mérite amplement.
Niluusu kivanu ki-so∂em-korondo-s-uvi gu koyoodnißju. (dudyi) / Midevim iſeet dotſe iJebiriotoẏot éß umowonêyû. (∂atyit) Je rêve que les humains deviennent les jardiniers de la vie dans le système solaire.
Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Mar 4 Oct 2022 - 20:25
C'est précisément cette grammaire qui a été ma principale inspiration, même si les systèmes ne sont pas tout à fait les mêmes.
J'ai donné à la cliente les paramètres pour générer des racines de la proto-langue, mais les systèmes d'épenthèse et d'harmonie consonantique sont trop complexes pour être appliqués automatiquement, alors je lui ai aussi donné les instructions pour les appliquer manuellement. Mais une fois que c'est fait et que les proto-formes sont complétées, j'ai programmé Lexurgy pour appliquer toute l'évolution automatiquement et instantanément obtenir les mots modernes (il les romanise même tout seul), et j'ai aussi envoyé le programme à la cliente, donc si j'ai rédigé mes documents assez clairement, elle devrait pouvoir se débrouiller. Par exemple, si le générateur sort *ʷθʔaxʷa (ʷ en début de mot est un raccourci qui indique que toute la racine est labialisée), mes instructions permettront à la cliente d'obtenir elle-même la proto-forme, */θʷəʔʷaxʷa/, et elle n'aura qu'à l'entrer dans Lexurgy pour obtenir son descendant, fuóvo.
Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Mer 5 Oct 2022 - 19:17
Aujourd'hui, un peu de dérivation, les pronoms et les déterminants!
Le diminutif forme un nom de plus petite taille ou de moindre importance, il finit par l et a tendance à changer les voyelles du radical en voyelles antérieures. lisca, lascira, liscis (homme-guépard, femme-guépard) > liscil, liscirra, liscilis (enfant d'homme-guépard)
L'augmentatif forme un nom de plus grande taille ou importance, il finit par ti, sauf si on l'ajoute à un radical finissant par une nasale, ça donne alors ndi. levos (langue, la partie du corps) > levosti, levostira, levostis (langue parlée)
Le péjoratif forme un nom déprécié, il finit par ca, sauf si on l'ajoute à un radical finissant par une nasale, ça donne alors nga. cri, crila, cris (personne âgée) > crica, cricara, crices (vioque)
Les pronoms personnels ne distinguent ni genre ni cas, mais à la troisième personne du singulier, il y a une distinction entre le proximal í et le distal mí, car ces pronoms sont aussi des démonstratifs, on peut les traduire par "il" ou "elle" mais aussi "celui-ci" et "celui-là". No est identique au marqueur du pluriel. He peut se traduire par "on" ou "quelqu'un".
Singulier
Pluriel
1ère personne
es
sor
2ème personne
min
cor
3ème personne
í/mí
no
Indéfini
he
Il n'y a pas de pronoms ou de déterminants possessifs, on utilise juste un pronom personnel après un nom possédé:
apa es: mon père
apa he: un père, le père de quelqu'un
Comme vous le voyez, on peut utiliser he comme possesseur indéfini, ce qui permet d'utiliser sans un vrai possesseur les noms inaliénables.
Í et mí servent de pronoms mais aussi de déterminants, ils précèdent les noms dans le second cas. No n'est en revanche pas un déterminant seul, les déterminants démonstratifs pluriels sont composés, respectivement í no et mí no:
í liscilis: cet enfant-ci
mí no liscilis: ces enfants-là
Quand un pronom précède un nom, on considère que le nom est l'attribut du pronom, mais on n'utilise pas í, mí ou no comme sujets dans ces constructions, un sujet à la troisième personne est sous-entendu:
es edrelis: je suis le roi
edrelis: (c'est) le roi
no edrelis (ce sont) des rois
Vous voyez, là c'est bien plus analytique.
Dernière édition par Wojnicz le Jeu 6 Oct 2022 - 20:24, édité 1 fois
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Anoev Modérateur
Messages : 37610 Date d'inscription : 16/10/2008 Localisation : Île-de-France
Sujet: Re: Le levostis Mer 5 Oct 2022 - 22:26
C'était pas évident à prime abord pour le diminutif !
Moi, j'ai pas fait preuve d'autant d'originalité.
Et pour le laudatif (l'inverse du péjoratif) ?
Tes transformations sont-elles effectives pour les adjectifs, les adverbes ?
Je me limite aux exemples en français, ne voulant pas faire de réclame pour ma crèmerie.
Comment différencies-tu "bon" (bonté, humanisme) de "bon" (aptitude, performance) ?
... et "majestueusement" de "amplement" ?
_________________
Pœr æse qua stane:
Pour ceux qui restent.
Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Mer 5 Oct 2022 - 22:44
Citation :
C'était pas évident à prime abord pour le diminutif !
Un point n'était pas clair?
Citation :
Et pour le laudatif (l'inverse du péjoratif) ?
Je n'en ai pas mis un, ça viendra peut-être si la cliente me rappelle pour pousser la grammaire plus loin un jour, mais ça m'étonnerait.
Citation :
Tes transformations sont-elles effectives pour les adjectifs, les adverbes ?
Si tu parles des dérivations, comme il y a peu de distinction entre noms et adjectifs, les dérivations qui marchent sur les noms marchent aussi sur les adjectifs, ça les nominalise souvent.
Pour ce qui est des adverbes, ils ne sont pas vraiment distingués des adjectifs (par exemple toru signifie à la fois "vite" et "rapide"), on les reconnait car ils sont invariables et généralement en premier dans la phrase (une exception notable est vo, l'adverbe de négation, qui précède directement ce qu'il annule). Les autres mots que tu mentionnes, je ne les ai pas créés, la cliente n'avait besoin que d'un petit vocabulaire qu'elle pourrait ensuite agrandir elle-même.
Anoev Modérateur
Messages : 37610 Date d'inscription : 16/10/2008 Localisation : Île-de-France
Sujet: Re: Le levostis Mer 5 Oct 2022 - 23:41
Wojnicz a écrit:
Citation :
C'était pas évident à prime abord pour le diminutif !
Un point n'était pas clair?
Si, si ! Prenons un radical de mot de base. mettons XYYXZ, pour raccourcir le mot pour le diminuer, les solutions, on peut en trouver plusieurs : soit XYXZ soit XYYZ soit XYZ.
Moi, j'ai réussi à écourter certains verbes, pour le mode subjonctif. Lla différence, c'est que certains d'entre eux avaient une terminaison : j'ai sucré la terminaison : pùze > pùz liven > liv.
Pour d'autres, qui avaient un radical à voyelle longue, j'ai raccourci la voyelle : gœnes > gunes lyym > lym faar > far dæn > den.
quant à pas mal d'autres, le singulier des deux modes au présent est parfaitement homonyme ; comme pour les verbes français du premier groupe, en somme da waad tep eg inzh = il attend que je mange.
Wojnicz a écrit:
J'ai donné à la cliente les paramètres pour générer des racines de la proto-langue...
(...) ça viendra peut-être si la cliente me rappelle pour pousser la grammaire plus loin un jour, mais ça m'étonnerait.
J'avais oublié que tu avais travaillé pour quelqu'un d'autre.
_________________
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Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Jeu 6 Oct 2022 - 0:04
Ah oui, quand je parle de diminutif, j'en parle dans le sens que ce mot a en linguistique, l'équivalent de -et/ette en français, en gros. Je n'en parle pas comme un moyen de littéralement diminuer les mots en les raccourcissant.
Anoev Modérateur
Messages : 37610 Date d'inscription : 16/10/2008 Localisation : Île-de-France
Sujet: Re: Le levostis Jeu 6 Oct 2022 - 0:33
Wojnicz a écrit:
Ah oui, quand je parle de diminutif, j'en parle dans le sens que ce mot a en linguistique, l'équivalent de -et/ette en français, en gros.
Ma réponse, un peu hors-sujet ; tu m'excus'ras:
C'est aussi un peu comme ça que je voyais les choses, mais la solution que tu as choisie était assez audacieuse. Moi (fallait ben qu'j'en cause !), j'm'en suis tiré avec -in : guère original comme j'ai dit ci d'ssus. Mais ça marche pas trop mal... sauf peut-être pour les noms à suffixes en -yn, faut ben êt'juste. On a kùvin pour "cuvette", mais aussi grœpin pour "groupuscule" ; on fera bien la différence entre ed neràpkadin ane = leur petite fille ed loejakad ane = leur petite-fille*. *Par contre, une petite fille se dit nexàvkad.
J'admire ton talent d'adaptabilité, même si je ne fais pas les mêmes choix grammaticaux. Tu es un peu de la même veine que Paul Frommer. Je ne pense pas que je puisse en faire autant.
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Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Jeu 6 Oct 2022 - 20:23
Comme j'ai déjà parlé des adverbes dans mes réponses aux questions d'Anoev et qu'il n'y a rien d'autre à dire dessus, aujourd'hui, je vais plutôt parler de quelques mots-outils et des chiffres.
Pour les conjonctions, pas grand-chose à dire, elles se placent entre les éléments qu'elles relient et sont les mêmes pour les noms et pour les phrases, voilà les plus répandues:
la: et
vóa: ou
fel: mais
cundo: car
serti: donc
La particule éa se place au début d'une phrase et la change en question: éa edrelis tavan?: le roi est-il malade?
Il n'y a pas de mot "oui", on répond avec un adverbe positif comme fra (ainsi). L'adverbe de négation vo peut servir de "non". Les pronoms interrogatifs basiques sont o (quoi/lequel?) et nu (qui?), o peut aussi servir de déterminant interrogatif et marche alors comme í et mí. Les mots interrogatifs apparaissent in situ, pas en début de phrase contrairement au français:
nu tá icur hembis?: qui a ouvert la porte?
min nu?: qui es-tu?
edrelis tá lucu o?: qu'est-ce que le roi a bu?
edrelis tá lucu o mulis?: quel vin le roi a-t-il bu?
Le clitique aco suit le premier constituant de la phrase et encode l'évidentialité indirecte, on l'utilise obligatoirement quand on parle de quelque chose dont on n'a pas été témoin et qui n'est pas une vérité générale.
edrelis tavan: le roi est malade, je l'ai vu
edrelis aco tavan: j'ai entendu dire/je présume que le roi est malade
Les chiffres sont décimaux et se combinent de façon très régulière, par exemple 11 est "dix un" (iela he), 20 est "deux dizaines" (cambra iela), etc. Ils marchent comme des adjectifs et prennent donc ra ou la quand ils sont qualificatifs, le marqueur de pluriel no n'est pas utilisé quand un nom prend un chiffre explicite: cambra edrelis: les deux rois (*no cambra edrelis est agrammatical)
Quand on les emploie comme attributs, ils servent à dénombrer le sujet: edrelis cam: il y a deux rois
Les ordinaux sont tous dérivés des cardinaux (donc pas de supplétion comme avec un>premier), ils prennent eux aussi ra ou la quand ils sont qualificatifs, ils finissent par é, í ou i et la dérivation a tendance à changer les voyelles du radical en voyelles antérieures. Comme les chiffres sont truffés de changements de radical, je vais juste mettre le tableau complet (vous l'aurez peut-être remarqué, le pronom indéfini he vient du chiffre 1):
Cardinal non-lié
Cardinal lié
Ordinal non-lié
Ordinal lié
1
he
hera
hé
hegra
2
cam
cambra
cengi
cengira
3
povu
pogra
pecci
peccira
4
sto
stora
stói
stogra
5
cái
caíra
ceí
ceígra
6
iva
idra
iví
ivigra
7
foras
forsira
forsí
forsigra
8
sunur
sungrula
singrí
singrigra
9
endi
endira
endí
endigra
10
iela
ielara
ielé
ielegra
100
ricca
raccira
riccí
riccigra
1000
mundron
mundrondra
mindrengi
mindrengira
Pour terminer, sachez que pour dire son âge, on utilise une expression se traduisant par "je suis enfant de (nombre)": es uttu cambra iela sto: j'ai 24 ans
Faites donc le test avec votre âge!
EDIT: j'avais fait une erreur, c'est povu et pas pó pour 3, désolé.
Dernière édition par Wojnicz le Jeu 27 Juil 2023 - 0:54, édité 3 fois
Wojnicz
Messages : 850 Date d'inscription : 13/12/2017
Sujet: Re: Le levostis Ven 7 Oct 2022 - 22:48
Comme on ne m'a commandé que les rudiments de la grammaire, je n'ai pas créé un système verbal complètement fonctionnel, par exemple je n'ai pas mis d'autres voix que l'active, de clauses relatives ou d'autres modes que l'indicatif et l'impératif. Voilà ce qu'il y a à savoir sur les verbes, c'est-à-dire peu de choses comme ils sont très analytiques, ils seraient même isolants si je n'avais pas mis de dérivations. Pour l'anecdote, le mot de salutation par lequel j'ai débuté ce fil, cáer, est à l'origine le verbe "obéir", la formule de politesse est apparue par abréviation de es cáer (j'obéis), elle signifie à la fois "bonjour" et "au revoir".
Le levostis distingue l'aspect mais pas le temps, qui se déduit du contexte. Les verbes ne prennent aucune flexion, donc pas d'accords, pas de marquage des aspects, etc, quand un verbe est employé seul, il a l'aspect générique, c'est celui qu'on utilise pour les vérités générales ou juste quand il n'est pas nécessaire de préciser plus. On utilise aussi le verbe seul pour l'impératif, qui ne distingue pas le nombre.
edrelis lucu mulis: le roi boit du vin
lucu!: bois/buvez!
Vous aviez eu quelques indices hier dans la partie sur les questions, et aujourd'hui, cet exemple le confirme, le levostis est SVO, je n'ai pas mis d'exceptions.
Pour exprimer l'aspect progressif, on utilise l'auxiliaire fi, qui signifie aussi "être à (un endroit)", il précède le verbe: edrelis fi lucu mulis: le roi est en train de boire du vin
Pour l'aspect accompli, c'est tá, qui veut aussi dire "quitter". On peut aussi l'employer avec un adjectif (qui marche alors comme un verbe d'état) pour exprimer l'aspect cessatif.
edrelis tá lucu mulis: le roi a bu du vin
edrelis tá tavan: le roi n'est plus malade
Enfin, pour l'aspect inchoatif, c'est lis, qui veut aussi dire "aller à (un endroit)". Là encore, ça marche aussi avec les adjectifs.
edrelis lis lucu mulis: le roi se met à boire du vin (je ne m'aperçois que maintenant que cette phrase a trois fois lis, c'est accidentel)
edrelis lis tavan: le roi est tombé malade
Un peu de dérivation, maintenant, on peut dériver pas mal de choses d'un verbe.
Les agents animés, utilisables comme noms ou adjectifs, finissent par s, ce suffixe a tendance à changer les voyelles du radical en voyelles postérieures: adra (guider) > odros (roi)
Les patients animés, utilisables comme noms ou adjectifs, commencent par cl et cr quand on les dérive de verbes commençant par l et r respectivement, dans les autres cas, ils commencent par h ou f en fonction de la proto-racine, la forme f est toujours suivie d'une voyelle postérieure, et la forme h toujours d'une non-postérieure: adra (guider) > hadra (sujet)
Les masdars (noms désignant le procès d'un verbe) finissent par um ou om: adra (guider) > adrom (fait de guider)
Le péjoratif forme un verbe déprécié ou mal effectué, intentionnellement ou non. Il a la même forme que pour les noms: il finit par ca, sauf si on l'ajoute à un radical finissant par une nasale, ça donne alors nga: adra (guider) > adraca (égarer, tromper)
Un nom exprimant le résultat d'un verbe finit par ta, sauf si on l'ajoute à un radical finissant par une nasale, ça donne alors nda: rixa (graver, écrire) > raxata (gravure, écrit)
On peut étendre le sens d'un verbe finissant par une consonne en lui ajoutant í, tandis qu'un verbe finissant par une voyelle prend í, ú, é, ó ou á en fonction de sa proto-racine: adra (guider) > adrá (gouverner)
Le privatif inverse le sens d'un verbe, il commence par s: rixa (graver, écrire) > sarcira (effacer)
J'ai presque fini de détailler la grammaire, ensuite on passera aux détails sur l'évolution phonétique.
Anoev Modérateur
Messages : 37610 Date d'inscription : 16/10/2008 Localisation : Île-de-France
Sujet: Re: Le levostis Ven 7 Oct 2022 - 23:22
Wojnicz a écrit:
Le privatif inverse le sens d'un verbe, il commence par s: rixa (graver, écrire) > sarcira (effacer).
Là, t'admettras que je suis un peu perplexe.
Comment le préfixe s- peut-il transformer à ce point rixa ?
Que, par euphonie, la langue veuille qu'on intercale un A ou un I (par mutation vocalique) de srixa en sarixa ou en sirixa, j'comprendrais, mais là... d'où vient -cira ? J'avoue ne pas comprendre.
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Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Ven 7 Oct 2022 - 23:54
Je te l'accorde, c'est opaque, c'est l'évolution qui a donné ça. Rixa vient du proto-levostis *rksa, épenthétisé en *[rəksa], qui est devenu *[rɨksa] ([ə]>[ɨ] en syllabe accentuée) puis /riksa/ (tous les anciens [ɨ] ont fusionné avec /i/).
Quand on ajoute le privatif *s- à *rksa, on épenthétise le résultat en *[sərkəsa], qui est devenu *[sərkɨsa] là encore à cause de l'accent tonique, puis les anciens [s] intervocaliques ont subi un rhotacisme qui les a changés en /r/, donnant *[sərkɨra], et enfin, non seulement les anciens [ɨ] ont fusionné avec /i/, mais tous les anciens [ə] restants ont fusionné avec /a/, d'où /sarkira/, sarcira.
Anoev Modérateur
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Sujet: Re: Le levostis Sam 8 Oct 2022 - 0:14
'Fectiv'ment, y a une mécanique vach'ment complexe, digne d'une langue artistique, en fait. J'ai bien quelques charcutages à-postériori chez moi aussi, comme le russe тетрадь (cahier) transformé en tetjærd, et y en a d'autres, franchement indirects, parce que passés par l'intermédiaire d'alphabets plus ou moins ésotériques.
Chez moi, le [і] et le [ɨ] n'ont pas fusionné (respectiv'ment I et Ỳ ; IY et YY en version longue) ; par contre, comme le [ɨ] n'existe qu'en version accentuée (/'ɨ/), si par hasard, il perd l'accent tonique pour quelque raison que ce soit (agglutination ou subjonctif parfait), il "tombe" en [ɪ] ou en [ə]. Fin de ma digression.
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Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Sam 8 Oct 2022 - 2:03
Il y a deux choses en levostis dont je suis particulièrement fier: primo, le système de noms triptotes centré sur la relation que les noms entretiennent avec leurs modifieurs, contrairement à un système de cas plus classique qui aurait plutôt été un trio direct/oblique/génitif ou quelque chose d'approchant (j'ai brièvement envisagé de mettre des prépositions préfixées, comme en hébreu, mais j'ai trouvé que ça créerait trop de formes différentes), secundo, la complexité des paradigmes et des dérivations entrainée par la phonologie inhabituelle de la proto-langue.
Avec l'ourgaïte (vous devrez encore attendre un peu pour en savoir plus dessus), je tiens le levostis pour ma meilleure création jusqu'à présent.
EDIT: Vous allez pas me croire, la cliente vient de me payer, et elle a tellement aimé mon boulot qu'elle m'a augmenté!
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Anoev Modérateur
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Sujet: Re: Le levostis Sam 8 Oct 2022 - 10:07
Wojnicz a écrit:
Vous allez pas me croire, la cliente vient de me payer, et elle a tellement aimé mon boulot qu'elle m'a augmenté!
Ça donne, effectiv'ment, d'la valeur au produit (le produit étant ici un mode d'expression artistique, dans l'cas présent, une langue).
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Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Sam 8 Oct 2022 - 22:51
Plus qu'un petit point et on aura fait le tour de la grammaire. Le levostis n'a pas d'adpositions, mais comme vous avez déjà pu le voir, il n'a pas non plus de cas obliques, ce qu'il a, c'est des coverbes (à ne pas confondre avec des converbes, aucun rapport).
Je n'ai pas inventé de verbes ditransitifs, par conséquent je n'ai pas décidé de comment ils fonctionnent. Mais j'ai inventé les équivalents de quelques phrases obliques répandues, pour cela on utilise ce genre de construction: es iem siltis icur hembis: j'ouvre la porte avec la clé
Littéralement, cette phrase signifie "je prends la clé ouvre la porte", iem est un coverbe, il signifie "prendre" mais remplit aussi un rôle analogue à une adposition instrumentale, les coverbes précèdent le verbe principal de la clause, le système est inspiré du chinois. Voici quelques coverbes répandus:
Sens verbal
Sens coverbal
iem
prendre
avec (instrumental)
fi
être à (un endroit)
à (locatif)
tá
quitter
de (ablatif)
lis
aller à (un endroit)
à (allatif)
cin
regarder
vers
rovo
être à côté de (quelque chose)
avec (comitatif)
ús
suivre
après
Si vous vous rappelez de la partie sur les verbes, vous aurez reconnu fi, tá et lis, qui sont aussi des auxiliaires. C'est quand il y a un complément entre eux et le verbe principal que ce sont des coverbes.
Le proto-levostis est un gros morceau, ce sera en plusieurs fois, mais voici déjà son inventaire de phonèmes (il n'a pas de romanisation, je l'écris juste avec des symboles de l'API), vous remarquerez que le levostis moderne en a perdu plusieurs mais en a aussi gagné de nouveaux:
Labiales
Coronales
Dorsales
Labiovélaires
Glottales
Nasales
m
n
ŋ
ŋʷ
Occlusives
p
t
k
kʷ
ʔ
Fricatives
ɸ
θ s
x
xʷ
Liquides
l r
Semi-voyelles
j
w
Quant aux voyelles, je l'ai déjà dit, il y en a... une, /a/. Enfin, une phonémique, car il y a aussi [ə], mais il est épenthétique. Les deux peuvent former une diphtongue avec /j/ ou /w/.
Voilà pour la grammaire du levostis moderne!
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Sujet: Re: Le levostis Dim 9 Oct 2022 - 14:28
Wojnicz a écrit:
Il y a deux choses en levostis dont je suis particulièrement fier: primo, le système de noms triptotes centré sur la relation que les noms entretiennent avec leurs modifieurs, contrairement à un système de cas plus classique qui aurait plutôt été un trio direct/oblique/génitif ou quelque chose d'approchant (j'ai brièvement envisagé de mettre des prépositions préfixées, comme en hébreu, mais j'ai trouvé que ça créerait trop de formes différentes), secundo, la complexité des paradigmes et des dérivations entrainée par la phonologie inhabituelle de la proto-langue.
Ouais, mais c'est pas simple.
Wojnicz a écrit:
EDIT: Vous allez pas me croire, la cliente vient de me payer, et elle a tellement aimé mon boulot qu'elle m'a augmenté!
Super pour toi, très content pour toi et très fier de toi.
Niluusu kivanu ki-so∂em-korondo-s-uvi gu koyoodnißju. (dudyi) / Midevim iſeet dotſe iJebiriotoẏot éß umowonêyû. (∂atyit) Je rêve que les humains deviennent les jardiniers de la vie dans le système solaire.
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Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Dim 9 Oct 2022 - 20:30
Aujourd'hui, plus de détails sur le proto-levostis.
Je vais commencer par l'épenthèse et la phonotaxe. Les mots et affixes du proto-levostis sont constitués d'un squelette d'une à 4 consonnes, qui peuvent être seules ou suivies de /a/. /a/ n'apparait qu'après une consonne, par conséquent, deux voyelles ne sont jamais en contact, et un mot ne commence jamais par une voyelle. Un squelette peut contenir la même consonne 2 fois d'affilée, mais jamais plus de 2, et ne peut jamais contenir les suites /ʔʔ ʔaʔ jj jaj ww waw/ ou toute suite consistant en une labio-vélaire suivie d'une semi-voyelle ou d'une diphtongue, comme /xʷj/.
Les mots peuvent commencer par n'importe quelle consonne ou par les groupes suivants:
/p t k kʷ ɸ θ x xʷ/ + liquide
/s/ + /p t k kʷ/
Les mots ne peuvent finir que par une voyelle, une diphtongue ou une et une seule consonne, /m n ŋ ŋʷ s l r/ sont les seules consonnes permises en fin de mot. /ŋʷ/ est délabialisée en fin de mot, mais sa labialisation peut parfois se remanifester si un affixe entraine l'ajout d'un /ə/ après elle.
Les diphtongues /əj əw aj aw/ peuvent apparaitre dans les syllabes ouvertes et fermées. /ʔ/ ne peut jamais suivre une autre consonne, sauf si c'est une semi-voyelle. Quand /ja/ ou /wa/ suivent une consonne qui n'est pas une semi-voyelle, /j/ et /w/ sont effacés et se manifestent sous la forme d'une palatalisation et d'une labialisation de la consonne précédente respectivement, par exemple /mja/ donne /mʲa/. Ces changements sont cependant bloqués avant /aj aw/ et on doit ajouter un /ə/, par exemple /mjaw/ donne /məjaw/ et pas /mʲaw/. Quand /j w/ suivent une consonne et ne sont pas suivies de /a/, on ajoute un /ə/ avant, donc /mjm/ donne /məjm/. Les autres groupes permis entre voyelles sont:
les mêmes que ceux qui sont autorisés au début
toute géminée sauf les exceptions ci-dessus
toute nasale ou liquide suivie de toute consonne sauf les exceptions ci-dessus
/p t k kʷ/ + /s/
/s/ + toute nasale ou liquide
Tout groupe non permis par ces règles se voit cassé par l'ajout d'un /ə/, par exemple si un squelette contient /pm/, ça donnera toujours /pəm/ avec l'épenthèse. Les labio-vélaires sont délabialisées quand elles forment un groupe avec la consonne suivante, mais leur labialisation peut parfois se remanifester si un affixe entraine l'ajout d'un /ə/ après elles. Si on met de côté les semi-voyelles et leur comportement particulier, aucun groupe de plus de 2 consonnes n'est permis.
Pour épenthétiser un squelette, les règles sont les suivantes et s'appliquent dans cet ordre:
si le squelette finit par plusieurs consonnes et que la dernière peut apparaitre en fin de mot, on ajoute /ə/ avant, donc /ʔats/ donne /ʔatəs/, sinon, on ajoute /ə/ à la fin du mot, donc /sk/ donne /skə/.
on part du début du squelette et on cherche et casse les groupes illicites de la première syllabe à la dernière, /mprs/ donne donc /mprəs/ avec la règle 1, puis /məprəs/ avec la 2, mais si on ajoute un préfixe /w/- au squelette pour donner /wmprs/, on l'épenthétisera en /wəmpərəs/ et non en /wəməprəs/ comme on part toujours du début.
Voilà, là c'est déjà complexe, mais il y a un autre facteur crucial, maintenant: la palatalisation et la labialisation prosodiques. Tout squelette est, de façon inhérente, soit entièrement palatalisé, soit entièrement labialisé, soit ni l'un ni l'autre. Cette articulation secondaire est techniquement un prosodème indépendant des phonèmes du squelette lui-même, et il se propage de la dernière syllabe à la première. Pour abréger, pour indiquer qu'un squelette est palatalisé ou labialisé, j'écris juste ʲ ou ʷ avant sa première consonne, par exemple si j'écris /ʲsra/, c'est un raccourci pour /sʲrʲa/, qui s'épenthétise en /sʲərʲa/.
Comme l'articulation secondaire se propage, si j'ajoute un préfixe /t/- à /sʲərʲa/, ça donne /tʲəsrʲa/ (le premier schwa change de place à cause de la resyllabification), le préfixe hérite de la palatalisation du squelette. Ça veut aussi dire que si j'ajoute un suffixe portant une labialisation prosodique au squelette, tout le squelette devient labialisé, /sʲərʲa/ + -/ʷs/ donne /sʷərʷas/, c'est toujours la labialisation ou palatalisation la plus à droite qui l'emporte. L'absence de labialisation ou palatalisation ne se propage pas, en revanche.
La labialisation et la palatalisation sont toutes les deux annulées avant une diphtongue, donc /səjra/ + -/ʷs/ donne /səjrʷas/ et pas /sʷəjrʷas/. Les semi-voyelles /j w/ sont toujours labialisée et palatalisée respectivement, et rien ne peut changer ça, idem pour la série de labio-vélaires inhérentes, qui sont toujours labialisées, ainsi que les consonnes palatalisées et labialisées formées de suites C+/ja wa/, qui sont permanentes. Notez que la propagation ne concerne que la palatalisation et la labialisation prosodiques, pas les inhérentes, par exemple si un squelette contient /j/, la palatalisation de cette consonne ne se propage pas. Les consonnes résistant à la propagation ne l'empêchent pas de passer, donc /t/- + /səjrʷas/ donne /tʷəsəjrʷas/ et pas /təsəjrʷas/
Exemples:
Squelette simple: /rsm/ > /rəsəm/
Squelette préfixé: /ʔa-rsm/ > /ʔarsəm/
Squelette avec suffixe palatalisé: /rsm-ʲn/ > /rʲəsmʲən/
Squelette avec suffixe labialisé: /rsm-ʷt/ > /rʷəsmʷətʷə/
Squelette préfixé avec suffixe palatalisé: /ʔa-rsm-ʲn/ > /ʔʲarsʲəmʲən/
Squelette préfixé avec suffixe labialisé: /ʔa-rsm-ʷt/ > /ʔʷarsʷəmtʷə/
J'ai essayé d'être clair, mais je sens que vous allez quand même avoir des questions car je reconnais volontiers que c'est tarabiscoté, alors ne vous retenez pas.
Dernière édition par Wojnicz le Mar 18 Oct 2022 - 12:24, édité 1 fois
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Mardikhouran
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Sujet: Re: Le levostis Lun 10 Oct 2022 - 0:15
Wojnicz a écrit:
Les consonnes résistant à la propagation ne l'empêchent pas de passer, donc /t/- + /səjrʷas/ donne /tʷəsəjrʷas/ et pas /təsəjrʷas/
Pourquoi la labialisation passe-t-elle sur le préfixe, mais pas sur la consonne initiale ? Les deux pourtant sont bloquées par le /j/ ?
Wojnicz
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Sujet: Re: Le levostis Lun 10 Oct 2022 - 10:04
Non, j'ai justement écrit que les consonnes qui résistent à la propagation ne l'empêchent pas de passer, /j/ ne bloque pas la labialisation, il l'empêche juste d'affecter le schwa adjacent, mais pas celui de la syllabe précédente.