Bonjoir à toutes et à tous, aujourd'hui le premier chapitre d'une histoire mienne, j'essaye d'innover mais j'espère qu'elle vous plaira !
Au passage, grâce à la générosité des Industries Kuruphi, ce texte sera doté de la prononciation des mots non-français : il vous suffira de passer le curseur sur un mot
bleuté et l'API apparaîtra comme par magie ! Essayez donc avec ça :
Naemexe.
Des remerciements également à Pomme de Terre pour m'avoir aidé dans le travail de relecture !
Bon voyage !
Chapitre 0
18 Janvier 2018
Le ciel était clair, dans cette matinée de Janvier.
L'océan, d'un azur pur, contrastait avec la blancheur de la neige tombée ces derniers jours.
À ces latitudes, il n'était pas commun qu'il en tombe en plaine ou sur le littoral, même en hiver.
Mais malgré le climat insulaire, les pentes de Némétie étaient ce jour-là couvertes d'une neige poudreuse et tenace.
Un temps parfait pour se détendre après les examens.
C'était tout du moins ce que pensait
Maria, heureuse, profitant de cet or blanc pour se promener le long de l'ancien port.
Sortant de ses partiels de deuxième année de médecine, la jeune femme de 17 ans était sûre d'elle.
Calme, elle marchait, le pas lent et léger, admirant les enfants s'amusant avec la neige, les touristes surpris et les marins-pêcheurs travaillant d'arrache-pied comme tous les jours.
Le long de la baie accueillant la capitale canéenne se trouvaient de nombreux bâtiments à l'architecture ancienne, baroque, mais malgré cela toujours en état trois à quatre siècles après être sortis de terre.
Se balader dans la vieille ville semblait être comme un voyage dans le temps et l'espace, les vieux édifices et l'ambiance qui y régnait nous transportant plusieurs siècles en arrière, en Europe.
On s'y croirait, au bord de la mer Baltique, au sein d'un de ces nombreux comptoirs commerciaux que possédait la Junie, l'ancienne maîtresse des lieux, entre les navires commerciaux venant d'Europe et d'Asie, et les explorateurs à la recherche de nouveaux horizons.
"Quelle histoire malgré tout..." se disait Maria, sortant de ses pensées pour revenir à la réalité.
Pourtant, en omettant le fait que l'île de Kana où elle se trouvait est au milieu de l'océan Pacifique, on s'y croirait.
Petit à petit, elle arrivait vers la place des Marchés, un grand ensemble de marchés couverts qui étaient ce jour-là ouverts, et auprès desquels de nombreux habitants de la capitale venaient s'approvisionner en vivres, notamment les fruits et légumes issus de l'agriculture biologique.
Attirée par les douces odeurs qui en émanaient, Maria s'y dirigea donc, réfléchissant par la même occasion à ce qu'elle se cuisinerait pour le déjeuner.
De nombreux légumes de saison étaient présents, d'ici ou d'ailleurs, mais la plupart venant d'ici ou des îles voisines de Duralie et de Candara.
Mais à peine avait-elle choisi ce qu'elle prendrait que d'autres saveurs vinrent l'appeler.
De grosses quantités de fruits, pour la plupart propres à l'archipel, d'autres importés des rives américaines et japonaises.
Puis vinrent les fromagers et les bouchers, leurs délices à consommer modérément, les fleuristes et leurs compositions multicolores, et divers artisans travaillant à Némétie ou dans les environs et venant ici pour vendre leurs produits ainsi que leur savoir-faire.
Enfin vinrent les étals de son père,
Ànerei. Un brillant ébéniste selon elle, capable de travailler le bois à la perfection, autant des meubles que des statuettes, ou encore des armoiries.
Inspiré par tout ça, le frère de Maria,
Maŧiās, de trois ans son aînée, avait décidé de suivre son père dans sa vocation. Tous les deux tenaient ainsi l'atelier familial, situé à
Nāi, ville en banlieue de Némétie, créé par l'arrière-grand-mère de Maria,
Hana Dieleņeuscā, d'origine polonaise.
"Alors, pour tes examens ma chérie ?" lui dit soudain Ànerei.
"Plutôt bien Papa, je suis assez confiante là-dessus" lui répondit sa fille.
"Il faudrait qu'on fête ça, je suis fier de toi Maria, autant que de ton frère !"
"Ça dépend, quand est-ce que tu voudrais faire ça ? J'ai deux-trois petites choses d'organisées ça et là, mais pourquoi pas."
"Ce week-end alors ?"
"J'aimerais qu'on soit tous ensemble, avec Maman... Qu'elle soit rentrée de l'hôpital d'ici-là..."
"Pardonne-moi, j'aimerais bien qu'
Irina revienne aussi..."
"
Saura !" cria soudainement Maŧiās, "J'ai une mission pour toi !"
"Je te laisse Papa, je reviens." dit la jeune femme à son père, avant de rejoindre son frère à l'arrière.
"De quoi t'as besoin frérot ?"
"C'est une mission importante... en gros, ça fait des mois que je parle avec une fille que j'aime bien, et j'aimerais lui faire un cadeau; le souci c'est que j'ai un peu peur de sa réaction..."
"Et donc tu voudrais que je lui donne à ta place ?"
"C'est ça, en échange je pourrais te rendre n'importe quel service !"
"Hmmm... c'est d'accord, dis-moi juste où est cette personne et à quoi elle ressemble."
"Alors, Leo est de taille assez normale, un peu comme toi, avec des cheveux noirs qui lui vont jusqu'aux épaules, la peau pâle et les yeux verts... fin, approximativement, je sais surtout qu'elle m'avait dit qu'elle venait habituellement ici."
"Ouais, tu m'aides pas beaucoup frangin là... Je vais voir ce que je veux faire mais je promets rien."
"Tu ne peux pas savoir à quel point ça me rassure Maria !"
"Je vais me balader un peu en attendant de pouvoir trouver ta fameuse Leo... c'est quoi justement ce cadeau que tu veux lui offrir ?"
Maŧiās tendit alors à sa sœur un gros coffret, et l'ouvrit.
En son sein se trouvait un cygne en bois, d'une vingtaine de centimètres, semblant sculpté à la perfection.
"C'est magnifique... je pense qu'elle appréciera vraiment, votre histoire a l'air d'être puissante... Je vais faire attention à ne pas le casser !" lui répondit Maria, admirant la beauté de sa sculpture, puis prenant de mains hésitantes le coffret qu'elle referma.
Elle sortit de l'arrière-boutique puis, avec précaution, pris le coffret sous le bras pour se déplacer plus facilement entre les étals et les gens, nombreux certes mais pas autant que d'habitude à cause de la neige.
Après quelques instants, elle entendit un début de dispute.
À quelques pas de là, la scène semblait surréaliste pour Maria, mais les gens aux alentours semblaient habitués à ça.
En effet, elle crut reconnaître la reine
Eleonara en personne, ayant une partie du pouvoir de Kana depuis 2006, se disputant avec un militaire haut-gradé, qui semblait être le chef de la sécurité à l'entendre parler. Le commandant
Henric Cārmorànt qu'elle put lire au loin sur l'uniforme. Elle tenta de s'approcher, mais avait peur d'interférer au risque d'envenimer les choses.
"...mais vous êtes inconsciente, vous ne vous souvenez pas de ce qu'il est arrivé la dernière fois ?"
"Je sais ce que je fais, je ne risque rien, j'ai toujours eu cette habitude-là et il ne m'est jamais rien arrivé !"
"Vous voulez être atteinte à nouveau par une catastrophe ? Vous voulez perdre la vie ?!"
"Je vous interdis de parler de ce qu'il est arrivé à ma mère !"
Ayant peur qu'ils en viennent aux mains, Maria tenta alors de les interrompre.
"Veuillez m'excuser..." dit-elle timidement.
Les deux protagonistes s'arrêtèrent d'un coup.
"Est-ce que je pourrais vous parler un instant en privé votre Altesse ?"
"Oui bien sûr, ne t'inquiète pas, je ne pense pas que ça serait une grande menace."
"Ça ne vous dérangerait pas mon commandant ?"
"Non, non..." lui répondit Cārmorànt. "Soyez rapides."
Maria se courba devant les deux personnes et se mit un peu en retrait avec Eleonara.
"Je m'appelle Maria Dieleņeuscā, et quelqu'un, enfin, mon frère, voulait que je remette quelque chose à une certaine Leo, mais n'ayant que peu d'informations sur cette personne j'ai supposé que c'était vous, en accord avec sa description..." lui dit la jeune femme.
"N'aie aucune crainte." lui répondit la monarque, de dix ans son aînée, "C'est bien moi la femme que tu cherches."
"J'aimerais comprendre, Maŧiās me disait qu'il y avait... quelque chose entre vous deux, et ça me surprend vraiment de savoir qu'il puisse ressentir de telles choses avec une femme de votre rang..."
"L'amour fait bien les choses. Tutoie-moi s'il te plait, je ne suis qu'une femme normale sans rien de grand ni divin, juste des titres et un héritage lourd."
"Expliquez-m- euh, pardon, explique-moi s'il te plait Eleonara..."
"Quand j'ai du temps libre, pas si souvent que ça, j'aime m'adonner au plaisir des vieilles correspondances, à la lettre, comme au bon vieux temps. J'aime ce moyen, c'est plus romantique selon moi, les sentiments sont plus présents et la manière dont chacun écrit peut révéler beaucoup de choses. Loin des carcans, des castes et des protocoles. Sur le papier, seuls les cœurs existent, et ils sont libres de s'exprimer comme ils veulent. Quant à ton frère, je l'ai rencontré sur un forum littéraire il y a un an de cela, ses pensées me plaisaient beaucoup ainsi que sa manière de les ordonner et de créer de nouvelles choses. Une belle plume."
"À ce sujet, il aimerait t'offrir ça." Maria montre le coffret à Eleonara et l'ouvre doucement, avec précaution, espérant que rien ne se soit cassé avec tout ça. "Notre père est ébéniste, et il lui a transmis sa passion. Une autre manière de créer des choses."
Surprise par le cygne en bois, elle mis quelques temps à réaliser la quantité de travail que cela a dû lui prendre. Quelques larmes coulaient sur ses joues blanches.
"C'est magnifique, sincèrement. Maŧiās est vraiment exceptionnel, je..."
Maria lui tendit le coffret.
"Merci infiniment Maria."
"Mais ce n'est pas moi qui..."
"Tu as eu le courage de faire tout ça, pour aider ton frère avec ce que tu fais déjà. Même s'il n'a pas osé me le remettre ni su à qui il s'adressait réellement, il a laissé son cœur parler. Et le tien est grand aussi."
"M-merci beaucoup, je lui dirai, même si je pense qu'il faudra qu'on ait une discussion un jour ou l'autre..." Elle rit doucement. "Pardonne-moi, c'est nerveux. Je n'arrive juste pas à en revenir encore..."
"Ne t'en fais pas, tu n'as aucun souci à te faire, au contraire. Que fais-tu en ce moment ?"
"Je viens de finir mes examens de fin de semestre, en deuxième année de médecine. C'est pas facile mais je garde espoir, j'ai envie d'aider les gens autant que je peux peu importe l'effort qu'il faudra que je fasse. J'espère avoir les résultats bientôt..."
"Tu les auras, et tu y arriveras, j'en suis absolument certaine Maria. Tu es motivée, tu as envie de faire ça, et tu as cette chose qui t'anime à faire de ton mieux pour rendre le monde meilleur. Certains ont des moyens, d'autres de l'ambition, toi, tu as un cœur immense. Tu iras loin, j'ai foi en toi."
"Je..." Maria ne pouvait plus retenir ses émotions et se mit à pleurer. Eleonara posa le coffret avant de la prendre dans ses bras pour la rassurer, la conforter.
"Merci infiniment Eleonara, du fond du cœur..."
"Bientôt tu trouveras quelqu'un. Quelqu'un qui aura besoin de toi. Cette personne saura retrouver ses repères et se reconstruira grâce à toi. Peu importe à quel moment cela arrivera, tu sauras ce qu'il faut faire. J'ai foi en toi, Maria. Tiens."
La reine prit sa main et lui donna une pomme, fruit qu'elle avait l'habitude d'aller chercher seule au marché, pratique qui avait don d’agacer le commandant.
"J'aurais une dernière chose à te demander, ça peut sembler égoïste mais... est-ce que je pourrais prendre une photo avec toi ? Pour garder ce moment avec moi si jamais..."
"Bien sûr, ça ne me dérange pas le moins du monde ! Sèche tes larmes, ton cœur saura toujours retenir les bons moments."
Maria sécha ses larmes, puis saisit son téléphone pour se prendre en photo avec Eleonara. Elle savait qu'elle se souviendra longtemps de ça, à l'aide d'une simple photographie elle se rappellerait de ses mots précieux. Elle en profita également pour prendre le cygne avec elle, sorte de confirmation à Maŧiās de la "transaction".
"Merci infiniment, j'espère ne pas te déranger plus longtemps !" lui dit Maria.
"Tu ne me déranges pas du tout, sois rassurée." lui répondit Eleonara, dans une dernière étreinte avant de sortir du recoin. "Passe une bonne journée !"
"Merci, toi aussi !" lui souhaita Maria avant que leurs chemins se séparent.
Peu de temps après, elle revient auprès de son père, comme si de rien n'était.
"Je vais y aller Papa, je passerai par l'hôpital avant de rentrer à mon appartement. T'auras besoin que je lui dise quelque chose ? Je prendrai un bouquet de fleurs aussi pour Maman."
"Rien de spécial, c'est bien ma fille." lui répondit Ànerei. "Tu reviendras ce week-end ?"
"Je vais essayer, si j'ai pas trop de choses à faire. Bisous !"
"À plus tard, tiens." lui dit son père, en lui tendant un chocolat chaud pour braver le froid.
Juste avant de partir, elle prit un air sérieux et regarda son frère.
"Leo a bien reçu ton cadeau. Il faudra qu'on ait une petite discussion toi et moi."
Elle rit doucement avant de se mettre en route vers l'ouest.
Au passage, elle acheta un bouquet de fleurs pour sa mère, Irina, à l'hôpital à cause d'un accident de voiture.
La neige se remettait à tomber, légèrement.
Maria avançait, d'un pas confiant, remontant les pentes enneigées à pied à côté des tramways bloqués par la neige.
Non loin, elle passa près du Parlement, et en face d'un large boulevard, le Palais Royal, converti en grande partie en musée.
Ensuite, elle longea la rivière
Catâliņ, sur un chemin où la verdure était recouverte par la neige, où les traces de pas et de vélos se mélangeaient.
L'hôpital de l'ouest de Némétie était à mi-chemin entre la place des Marchés et la petite ville d'
Āstae, dans la proche banlieue et où se trouvait l'appartement de Maria.
Au bout de cinq minutes, elle entendit des enfants s'amuser, profitant de la fermeture des écoles. Certains se lançaient des boules de neiges, pendant que d'autres essayaient de faire un bonhomme. Cependant une boule vint heurter la tête d'une jeune femme assise au sol, qui pleurait.
Inquiète, Maria s'approcha d'elle, mais constata qu'elle était blessée. Elle semblait avoir pris des coups au point qu'un peu de sang entachait la neige immaculée.
Remarquant ce détail, prise de panique, elle accourut aussi vite que possible vers l'inconnue, lâchant inconsciemment son chocolat chaud et son bouquet à terre.
"Allez-vous-en !" cria-t-elle, voulant que les petits s'écartent d'elle.
Elle se mit à genoux puis lui demanda.
"Qu'est-ce qu'il s'est passé ?" lui demanda Maria, en détresse face à cette situation.
L'inconnue restait mutique, en sanglots.
Maria tenta de se ressaisir, puis lui demanda d'une voix plus calme et rassurante.
"Comment tu t'appelles ?"