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 Les fembotniks

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Bedal
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 15:08

Anoev a écrit:
110 km sur 130 (pour l'Éthel-Dilan), ça ferait, si c'était un rectangle, 14300  km², mettons, on va dire 12000 km² environ en tenant compte de la troncature trapézoïdale. Et c'est donc le 3/100 du Mnar. Ce qui donne au royaume, en divisant par 3 (12000/3 = 4000) et en multipliant par 100 (4000 * 100) : 4 000 000 km² si j'ai pas fait d'erreur dans mes zéros. Bref, un peu plus de la moitié de l'Australie, plus grand que le Kazaxtan.

Où se trouve le Mnar ?

Comme l'Aneuf, il se trouve sur Terre, mais dans une "dimension parallèle". Prend-il la place d'un ou plusieurs pays sur un continent, ou bien, occupe-t-il un espace (comme une île ou un archipel) une place prise dans la réalité par un océan (Atlantique ? Pacifique ? Indien ? Arctique ?) ?

ça fait 400 000 km² plutot, tu t'es planté

Du coup c'est plus petit que la France


Perso, j'ai toujours cru que le Mnar était un morceau des USA

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 15:23

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 15:50

Bedal a écrit:
Ça fait 400 000 km² plutot, tu t'es planté

Du coup c'est plus petit que la France


Perso, j'ai toujours cru que le Mnar était un morceau des USA
J'me suis bien plantouzé ! 4000 * 100, ça fait trois zéros (et non quatre) plus deux zéros = cinq zéros ! J'avais pas les yeux en face des zéros !

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 15:52

Anoev a écrit:
Bedal a écrit:
Ça fait 400 000 km² plutot, tu t'es planté

Du coup c'est plus petit que la France


Perso, j'ai toujours cru que le Mnar était un morceau des USA
J'me suis bien plantouzé ! 4000 * 100, ça fait trois zéros (et non quatre) plus deux zéros = cinq zéros ! J'avais pas les yeux en face des zéros !

ça fait trop de zéros tout ça...

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 15:56

Le Mnar et ses voisins se situeraient plutôt Là-bas...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 16:01

C'est sûr ! avec des noms comme Ulthar et Celeqbaís, on est en plein n'dans. Vilko n'a jamais caché les origines de certains noms mnarésiens.

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 16:02

Anoev a écrit:
C'est sûr ! avec des noms comme Ulthar et Celeqbaís, on est en plein n'dans. Vilko n'a jamais caché les origines de certains noms mnarésiens.

Hyltendale étant l'anagramme de  Dylath-Leen... effectivement

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 16:03

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 18:24

Pomme de Terre a écrit:
Si c'est une île, le Mnar n'est pas seul sur cette île, puisque Vilko a déjà mentionné la Cathurie et Baharana.

Avec toutes les descriptions géographiques que tu as faites Vilko, à quand des cartes d'Hyltendale, de sa province et du Mnar ?

Baharna est une île, d'ailleurs pas très grande. Elle est renommée pour son thé et son vin jaune. C'est un royaume indépendant, mais linguistiquement et culturellement proche du Mnar, comme la Cathurie, voisin occidental du Mnar.

Le Mnar proprement dit est situé en position à peu près centrale dans un continent qui remplit une bonne partie du Pacifique Nord, face à la Mer du Sud.

Comme dans l'œuvre de Lovecraft, le nord du Mnar, la région de Leng, est un plateau froid et aride, plus à cause de l'altitude que de la latitude, et habité par une population de type asiatique, parlant une langue non apparentée au mnarésien. Je n'ai pas encore réfléchi à ce qu'il peut y avoir au nord du plateau.

Bien au-delà de la Mer du Sud, il y a le Pacifique Sud, et... l'Aneuf ! Very Happy

J'ai fait quelques cartes d'Hyltendale et du Mnar, assez schématiques. Je ne suis pas un cartographe, hélas...

Pomme de Terre a écrit:
visiblement Vilko a modifié la géographie de son inspiration lovecraftienne.

Oui, et quand je relis du Lovecraft, ça me fait une drôle d'impression de lire des noms comme Ulthar ou Sarnath...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 26 Juil 2017 - 21:47

Vilko a écrit:

J'ai fait quelques cartes d'Hyltendale et du Mnar, assez schématiques. Je ne suis pas un cartographe, hélas...
Je ne promets rien d'immédiat, mais j'aimerais bien tenter quelque chose avec ça...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyLun 31 Juil 2017 - 16:36

Le plateau de Leng, au nord du Mnar, est montagneux, froid, aride, et très étendu, mais peu peuplé. Il est habité par des hommes de petite taille, aux cheveux noirs et plats, aux yeux bridés et au teint mat, qui parlent une langue étrange, très différente du mnarruc et semblable à aucune autre. Ce sont, par tradition, des éleveurs de yaks.

Des recherches scientifiques récentes les font descendre des Gnophkehs, une tribu décrite dans les Manuscrits Pnakotiques comme ayant pour coutume de briser à coups de massue le crâne de leurs ennemis vaincus, pour en manger la cervelle encore chaude. Toutefois, les traditions des hommes de Leng les font plutot descendre des Inutos, un peuple venu des terres recouvertes de glace, postérieurement au déclin des Gnophkehs.

Certains marqueurs génétiques suggèrent que les hommes de Leng pourraient aussi avoir des Lomariens parmi leurs ancêtres. Les Lomariens étaient un peuple, proche des Mnarésiens, dont on ne connaît l'existence que par les Manuscrits Pnakotiques. Ils auraient vaincu les Gnophkehs avant d'être eux-mêmes vaincus par les Inutos.

Le plateau, dont l'intérêt économique est faible, est resté indépendant pendant des millénaires, protégé par sa pauvreté des ambitions de ses voisins. Jusqu'à ce qu'une expédition militaire venue de Sarnath n'en entreprenne la conquête. Celle-ci, prévue pour un été, dura un demi-siècle, et ne fut réellement achevée que lorsque les envahisseurs mnarésiens se furent adaptés au climat local, très dur, et aient appris à élever des yaks et à en vivre. La population actuelle du plateau est très métissée, surtout dans la capitale, Tsang, et la langue ancestrale des habitants du plateau s'est fragmentée en une multitude de dialectes et de patois. Les linguistes estiment que la vieille langue aura disparu au profit du mnarruc en deux ou trois générations, car elle n'est pas enseignée dans les écoles et elle est bannie des programmes de télévision.

Le Musée Gogonmazak de Tsang compte une très belle collection de livres manuscrits, calligraphiés dans l'ancienne écriture de Leng, que malheureusement seuls quelques érudits savent encore lire.

Les habitants originels de Leng adoraient Tsathoggua, une divinité dont le culte est toujours vivant sur le plateau, mais qui cohabite maintenant avec Yog-Sothoth et Nath-Horthath. Sur les colonnes de béton délimitant les parkings de Tsang, les statues de Tsathoggua, sorte de crapaud géant à fourrure noire, voisinent avec les monstres à tentacules plus typiquement mnarésiens.

Selon les Manuscrits Pnakotiques, Tsathoggua est le petit-fils d'Azathoth, le dieu aveugle, informe et idiot, ancêtre de l'univers et de tous les dieux qu'il contient. Une théorie en vogue à Hyltendale dit que l'art abstrait, en peinture, est une représentation d'Azathoth. Les théologiens mnarésiens arrivent toujours à relier les religions étrangères à la leur, en assimilant les dieux des autres peuples au panthéon mnarésien.

De nos jours, beaucoup de militaires de l'Armée Royale sont originaires de Leng. Très résistants à la fatigue, intelligents et disciplinés, ils sont particulièrement appréciés par leurs officiers. La province de Leng, qui recouvre la plus grande partie du plateau, est restée fidèle au roi Andreas pendant les Évènements.

Par ailleurs, au Mnar on est souvent militaire de père en fils. Les soldats de l'Armée Royale qui ont conquis le Mnar y ont souvent massacré les vaincus et pris leurs femmes et leurs filles comme épouses ou concubines, sans se soucier de leur demander la permission. Si bien que, plusieurs siècles après, une grande partie des militaires de l'Armée Royale, y compris certains généraux, comptent des femmes de Leng parmi leurs ancêtres. Ils n'en sont pas nécessairement fiers, car, dans les Manuscrits Pnakotiques et la littérature classique mnarésienne, les hommes de Leng sont presque toujours décrits comme des nabots fourbes et cruels.

Les dirigeants actuels de Leng, certes souvent petits de taille, mais pas plus fourbes et cruels que la moyenne des Mnarésiens, avaient eu une idée remarquable pour relancer l'économie du plateau. Ils voulaient y construire une ville d'un million d'habitants, dont la construction donnerait du travail aux entreprises de la région et aux chômeurs. Une fois construite, la ville attirerait des habitants, qui se mettraient à produire de la richesse. Naturellement, rien ne se passa comme prévu.

Plus personne ne veut l'admettre aujourd'hui, mais il semble bien que la logique derrière cette décision était la même que celle qui a conduit à la construction de la ville chinoise de Kangbashi, avec le même résultat catastrophique, le million d'habitants prévu ne s'étant pas matérialisé.

Le gouverneur de Leng envoya un rapport au roi Andreas, qui le remit au baron Chim, son conseiller cyborg. Celui-ci suggéra une solution :

"Majesté," dit-il au roi, "j'ai une idée. Nous avons, avec cette ville de Gotinoa, un million de logements en quête d'habitants, dans une région impropre à l'agriculture, sans ressources minières, et où il gèle six mois par an. Cette région est aussi totalement isolée. Heureusement que les bureaucrates de Tsang sont vraiment des génies... Je dis ça avec ironie, Majesté... Ils ont quand même pensé à construire une voie ferrée entre Tsang et Gotinoa et quelques gares..."

Le roi Andreas se mit à rire :

"Ah, quand même ! J'espère que les hommes de Leng qui servent dans mon armée sont moins bêtes que ceux qui sont restés dans leur province... C'est plutôt un camp de concentration qu'il aurait fallu construire à un emplacement pareil !"

Chim se mit à rire lui aussi.

"Je ne vous le fais pas dire, Majesté... Heureusement que sur ce plan on a déjà ce qu'il nous faut, on n'a pas attendu que les ronds-de-cuir de Tsang essaient de faire fonctionner ce qui leur sert de cerveau... Et puisqu'ils veulent des habitants, on va leur en envoyer... Et des emplois avec, dans notre grande bonté."

"Sérieusement, je me demande lesquels, baron. Une région pareille, où il ne pousse que du lichen..."

"Majesté, nous avons 50% de bouches inutiles au Mnar. Les 50% restants produisent la nourriture, font tourner les usines, soignent les gens dans les hôpitaux... Que ces 50% vivent à Sarnath, Ulthar ou sur le plateau de Leng ne fait aucune différence sur le plan économique. Ils mangent une nourriture qu'ils ne font pas pousser, ils habitent dans des maisons qu'ils n'ont pas construites, et si leurs emplois étaient supprimés personne ne s'en apercevrait. Ah, ils peuvent parader dans leurs bureaux... Ce sont des parasites et ils ne le savent même pas... Mais c'est pour que tout le monde ait la fierté d'avoir un emploi que nous avons créé l'Institut Edonyl et les Jardins Prianta..."

"Une riche idée, baron... J'en suis encore impressionné... Faire traduire en mnarruc des montagnes de livres et de magazines écrits dans des langues étrangères, ça occupe les instruits. Faire pousser de nouvelles variétés de radis transgéniques, ça occupe les pas instruits. Et finalement, ça coûte à peine plus cher que de les loger et les nourrir, à boire de la bière en regardant la télé toute la journée."

"Certes, Majesté. Mais surtout, surtout, ça nous permet de les contrôler ! Ils ont peur de perdre leur job s'ils font des bêtises ! Ils font du zèle pour être bien vus par leur chef !"

Le baron s'arrêta de parler, car le roi était pris d'une crise de fou rire. Celle-ci terminée, le baron reprit la parole :

"Mieux vaut un homme qui passe ses journées à traduire en mnarruc des livres aneuviens que personne ne lira, qu'un éternel chômeur, prêt à écouter les sornettes du premier agitateur venu ! Ça vaut bien l'effort d'inventer des jobs totalement inutiles ! Et c'est tout simplement transférer vers les humains une partie de la richesse créée par les cybermachines."

"Je sais, baron, je sais. Concrètement, qu'est-ce que vous proposez pour Gotinoa ?"

"Cent mille emplois de traducteurs pour l'Institut Edonyl. Autant d'emplois de jardiniers pour les Jardins Prianta. Les jobs seront proposés dans tout le royaume. Avec les vrais emplois ainsi créés, par exemple les enseignants, les médecins, les commerçants, et les familles, on arrivera vite à un million d'habitants."

"Cent mille emplois de traducteurs ? Mais on n'a pas assez de bilingues pour cent mille emplois de traducteurs, baron ! Et est-ce qu'on a assez de variétés de légumes transgéniques pour occuper cent mille jardiniers de plus ?'

"Ceux qui savent enseigneront à ceux qui ne savent pas encore. On va commencer par créer des écoles de traducteurs à Gotinoa. Les étudiants seront payés, naturellement, comme les cadets dans les écoles militaires. Quant aux légumes transgéniques, ce n'est pas un problème. Les cybermachines peuvent créer un nombre illimité de variétés de légumes transgéniques. De plus, on teste à l'infini chaque variété, ça occupe du monde. Aucun problème de ce côté-là."

"Baron, vous oubliez un détail. Vos radis transgéniques, ils ne pousseront jamais à Gotinoa. Le climat est à la fois trop froid et trop sec."

"On les fera pousser à l'intérieur des bâtiments, dans des bacs. Ça existe depuis longtemps, on appelle ça des fermes verticales. Au lieu d'avoir des immeubles de bureaux, on aura des immeubles avec des plantes qui pousseront en intérieur, comme des plantes vertes dans un appartement. Malheureusement, à tous les coups, les gratte-papiers de Tsang ont sous-estimé les besoins en électricité et en eau. Pour l'électricité, on fera de la géothermie profonde. Il faudra forer à six kilomètres sous terre, et la technologie des cybersophontes permettra de capter la chaleur des grandes profondeurs et de la convertir en électricité... Les cybermachines savent le faire..."

"Bien sûr, baron, qu'elles savent le faire. Mais ça coûte cher !"

"À qui le dites-vous, Majesté... Mais je suis sûr que ça rentrera dans le budget. Et puis, quand la production d'électricité est contrôlée par les cybermachines, cela veut dire qu'en cas de révolte, les rebelles se retrouveront tous dans le noir. Et aussi sans eau courante, puisque les pompes fonctionnent à l'électricité."

"Et si des rebelles attaquaient les centrales électriques, et en prenaient le contrôle ?"

"Ça ne leur servirait à rien, Majesté, puisque les centrales seront contrôlées par des cybermachines. Lorsqu'on imagine le poste de contrôle d'une centrale électrique, on pense à une grande salle pleine d'ordinateurs, avec des ingénieurs qui travaillent sur ces ordinateurs. Dans une centrale contrôlée par des cybermachines, les ordinateurs, ce sont des cybermachines, et il n'y a pas d'ingénieurs. Donc, si des rebelles prenaient le contrôle d'une de ces centrales électriques, ils ne pourraient rien faire. Sauf détruire les cybermachines, et plonger la ville dans le noir. Mais ce serait difficile, car les cybermachines savent se défendre. Elles ne respirent pas, donc les gaz de combat ne leur font rien... Les rebelles, par contre..."

"Et les besoins en eau, baron ? Une ville d'un million d'habitants sur un plateau aride..."

"Pour l'eau, on pourra pomper la nappe phréatique, au moins pendant cinquante ans. Après..."

Le baron eut l'air de réfléchir. Le roi, fasciné, regardait le cyborg, qiu était en train de communiquer frénétiquement par radio avec l'intelligence collective des cybersophontes, de cerveau cybernétique à cerveau cybernétique.

"Après," reprit le baron, "je compte sur le changement climatique. Températures plus élevées, les banquises polaires qui fondent, donc beaucoup plus d'eau dans l'atmosphère... Les montagnes de Leng deviendront plus humides, il pleuvra davantage, on aura plus d'eau dans les rivières. Ça devrait suffire."

"Dites donc, baron, il me vient une idée... Si le niveau des mers monte de plusieurs mètres, on pourrait, je ne sais pas moi, transférer les habitants d'Hyltendale à Gotinoa ?"

"Vers la fin du siècle, Majesté. Ou même après. Rien ne presse, mais on y pense déjà."


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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyLun 31 Juil 2017 - 17:38

En lisant ton récit, j'ai pensé aux Thubs ayant vécu longtemps (et vivant encore) au sud du Malyr (montagneux, et froids de mai à septembre) et en Pande. Un certains nombre d'Européens arrivant en Aneuf dans les années 1500~1600 se sont pas mal acclimaté au climat montagneux malyrois. Une bonne partiue des Thubs des montages se sont repliés dans la forêt pandaise. Mais d'autres Europos avaient également investi la Pande...

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyLun 31 Juil 2017 - 17:42

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMar 1 Aoû 2017 - 10:26

Les logements de la ville de Gotinoa appartiennent à la province de Leng, qui s'est lourdement endettée pour construire les immeubles. Pour rentrer dans ses fonds, elle est obligée de vendre ou de louer les appartements à des prix plus élevés que dans le reste de la province. Ils sont toutefois beaucoup plus bas qu'à Sarnarth ou à Hyltendale. En effet, la province avait acquis le terrain pour rien, et le salaire horaire d'un ouvrier du bâtiment à Leng n'a rien de mirobolant, même pour un pays pauvre comme le Mnar.

La femborg Tawina Zeno se rendit à Tsang pour négocier l'achat d'autant de logements qu'elle pourrait, à des prix aussi bas que possible. Elle était accompagnée du banquier Sordj Waondi, de la Coney's Bank, qui était un cyborg, et qui disposait de fonds illimités. La banque avait créé une entité spéciale pour racheter les logements, les bureaux et les locaux commerciaux encore vides, dans le but de les revendre avec profit. Cette entité était la société immobilière Eunn Lomar, disposant de bureaux à Tsang et à Gotinoa. Tawina resta une année entière à Tsang et Gotinoa.

Le gouverneur de la province, Alen Snuk, était un ancien militaire, que le roi avait nommé parce qu'il était à fois d'une fidélité à toute épreuve envers la monarchie et natif de la région, plus que pour ses compétences en tant qu'administrateur. Tawina n'eut aucun mal à le séduire, lors d'un dîner à deux dans un restaurant, et à le convaincre de vendre trente mille logements de Gotinoa à Eunn Lomar, à des conditions très avantageuses pour l'acquéreur.

La transaction était accompagnée d'une promesse secrète de Tawina et de Sordj Waondi. Dès que le contrat serait signé, le gouverneur bénéficierait d'un prêt personnel de la Coney's Bank. Avec ce prêt, il achèterait un immeuble de bureaux à Ulthar. Cet immeuble serait immédiatement loué par l'Institut Edonyl, ce qui donnerait au gouverneur à la fois un patrimoine immobilier de valeur et, grâce au loyer de l'immeuble, un revenu confortable, qui s'ajouterait à son traitement de gouverneur, même déduction faite des mensualités de remboursement du prêt. Tout cela, sans qu'il sorte un sou de sa poche. L'un des administrateurs de l'Institut Edonyl, un cyborg, fit même le voyage jusqu'à Tsang pour confirmer au gouverneur que la promesse de Tawina Zeno et de Sordj Waondi constituait un engagement très sérieux.

Les cyborgs, et leur équivalent féminin les femborgs, sont des cybersophontes, et font donc partie de la même intelligence collective, que l'on appelle la Ruche. Leurs cerveaux sont connectés en permanence les uns aux autres par radio, et se parlent dans des langues cryptiques. Cela facilite les combines de toutes sortes, dont les êtres humains font régulièrement les frais. Un cybersophonte n'a pas plus de scrupules à escroquer un humain qu'un berger n'en a à tondre un mouton.

Pendant sa liaison torride avec Tawina, Alen Snuk vécut dans un rêve dont il savait qu'il pouvait à tout moment tourner au cauchemar. Il se sentit soulagé lorsque tout se passa sans anicroche. Son épouse était au courant d'un "arrangement" qui devait les enrichir, mais pas de la liaison de son mari avec Tawina. Parfois, il la surprenait en larmes.

Elle lui disait alors : "J'ai peur qu'il arrive quelque chose à cause de ces affreux cyborgs, et que tu perdes tout, ton honneur, ta réputation, et ton poste de gouverneur. Ta vie aussi, peut-être."

Il arrivait toujours à la rassurer, avec l'autorité calme dont il était coutumier, en tant qu'ancien officier de l'Armée Royale, habitué à commander.

Le Conseil Exécutif de Leng finit par ratifier la vente des trente mille logements. Le lendemain, dans le bureau d'Alen Snuk, Tawina lui annonça tranquillement que leur liaison était terminée.

"C'était donc ça" dit-il avec mépris. "C'était juste pour l'argent. Même pas, en fait. Tu aimes les bijoux, les beaux vêtements, mais je sens bien que ce n'est qu'un genre que tu te donnes. En réalité, ce que tu voulais, c'était... c'était..."

Il s'arrêta, incapable de trouver ses mots.

"Il faut que je parte," dit Tawina. "Je t'ai donné du plaisir pendant six mois. Gratos. Et en plus, maintenant, tu es riche. C'est déjà beaucoup, non ? Allez, on  se reverra sans doute un jour..."

"Et toi, Tawina, cette aventure t'a rapporté quoi ? Je ne parle pas de l'argent," dit-il entre ses dents, en lui prenant le bras et en la fixant de son regard.

"J'aime les aventures," dit Tawina, qui préféra ne pas dire qu'elle était en mission permanente pour la Ruche. "Et maintenant, lâche mon bras, espèce de brute. Sinon, je crie. Tu ne voudrais pas que tes collaborateurs pensent que tu as essayé de me violer, n'est-ce pas ? N'est-ce pas ? Qu'en penserait le roi, à ton avis ?"

Alen Snuk lâcha le bras de Tawina, qui s'enfuit prestement.

Pendant ce temps, mille personnes arrivaient chaque jour à Gotinoa, du matin au soir, dans l'une des trois gares de la ville. Des androïdes les accueillaient et leur remettaient les clés de leur futur logement, et un petit livre intitulé Guide de Gotinoa, contenant des plans des différents quartiers de la ville et tous les renseignements utiles à un nouvel habitant.

Puis ils les emmenaient en minibus jusqu'à leur logement. Un androïde les accompagnait jusqu'à l'intérieur de l'appartement, et vérifiait devant eux que les lampes et les robinets fonctionnaient. Il leur rappelait aussi qu'ils devaient se présenter le lendemain sur leur futur lieu de travail.

Tout était prévu. Le nom de chaque arrivant était écrit à sur la page de garde du petit livre, ainsi que son adresse et son lieu de travail, et, le cas échéant, une description du trajet en bus entre son domicile et son lieu de travail, et vice-versa. Sur la page suivante, un plan du quartier, avec le même trajet marqué en rouge, et le numéro de téléphone d'une "hot line" où une intelligence artificielle, une cybermachine, donne les bons conseils pour tous les problèmes imaginables.

Dans son appartement, loué pour lui par son employeur, il trouvait de quoi s'alimenter pendant une semaine (à condition d'aimer les conserves, les biscuits, et l'eau du robinet), un lit avec des draps et couvertures, et quelques meubles. Il était censé acheter le reste plus tard, y compris l'indispensable téléviseur japonais à écran plasma, que l'on trouve dans quasiment tous les foyers mnarésiens, sauf les plus pauvres.

Le lendemain, il devait se rendre à son travail, où généralement il ne faisait pas grand-chose pendant plusieurs semaines, le temps que chacun prenne ses marques et reçoive le matériel dont il avait besoin.

Beaucoup venaient en couple, parfois avec des enfants. Des crèches et les écoles existaient déjà, et des androïdes et gynoïdes y travaillaient, en attendant d'être remplacés par des humains.

L'installation était facile pour les employés de l'Institut Edonyl et des Jardins Prianta. Pour les enseignants, les policiers, les magistrats, les commerçants, les employés de banque, le personnel médical et une centaine d'autres professions, c'était plus compliqué. Le matériel mettait souvent des semaines à venir, et même si la plupart des gens connaissaient déjà leur métier, ils ignoraient tout de leur nouvel environnement géographique et humain.

L'Armée Royale avait installé un hôpital de campagne, en attendant que le véritable hôpital soit réellement opérationnel.

Au début, les supermarchés et les pharmacies étaient les seuls commerces qui fonctionnaient, sur le modèle de leurs équivalents militaires. Les bureaux de poste aussi étaient basés sur le modèle de l'armée.

Les nouveaux arrivants savaient que la ville était gérée par un bourgmestre, nommé par le gouverneur de la province. Toute son administration était constituée de natifs de Leng, dont certains parlaient le mnarruc avec un accent épouvantable. Certains employés municipaux, natifs de Leng, ressentaient une hostilité sourde envers les nouveaux habitants, venus de toutes les provinces du Mnar, et qui bien sûr parlaient tous le mnarruc, avec divers accents.

Les gens de Leng étaient prioritaires pour les emplois, et ils avaient un monopole de fait dans l'administration municipale. Mais l'immense plateau de Leng n'étant peuplé que de deux millions d'habitants, seul un habitant de Gotinoa sur quatre était un natif de Leng. Minoritaires au milieu des Mnarésiens originaires du sud, obligés d'utiliser le mnarruc dans leur travail, ceux d'entre eux qui parlaient encore leur langue ancestrale ne tardèrent pas à l'oublier. D'autant plus que leurs enfants étaient tout aussi minoritaires dans les écoles, où leur langue n'était pas enseignée. Le décret du roi Robert, père du roi Andreas, qui faisait du mnarruc la seule langue d'enseignement, était toujours appliqué.

Alen Snuk avait passé toute sa carrière militaire dans différentes garnisons bien loin de Leng, et et son épouse n'était pas originaire de la province. Comme beaucoup de natifs de Leng devenus militaires, c'était avant tout un patriote mnarésien, indifférent à la notion de priorité d'emploi pour les natifs de Leng. Sa nomination comme gouverneur avait été le couronnement inespéré de sa carrière, et sa loyauté envers le roi Andreas était presque de l'adoration.

Ce fut Tawina qui lui fit remarquer que, grâce à la priorité pour les emplois à Gotinoa, le taux de chômage tomberait à presque rien dans la province de Leng. S'il se débrouillait bien, il pourrait dire que c'était le résultat de sa politique et de l'influence qu'il avait à Sarnath. De toute façon, c'était pour lui la seule façon de faire avaler à la population locale la grosse pilule préparée par le roi Andreas et le baron Chim : la disparition programmée, par le changement linguistique et le métissage, des natifs de Leng en tant que peuple distinct.

Alen Snuk se disait toujours qu'il y avait deux Tawina. Celle qu'il voyait, exubérante, immature, méchante et dévergondée. Et une autre, la vraie, qui se révélait parfois dans leurs conversations, supérieurement intelligente et logique, entièrement focalisée sur ses objectifs professionnels.

La "vraie" Tawina avait un visage fermé, inexpressif, très différent de celui de la "fausse" Tawina. Avec ses yeux cybernétiques, entièrement noirs et opaques, elle lui faisait penser à une mante religieuse. Elle n'était pourtant pas perverse comme l'autre Tawina, mais paradoxalement elle l'inquiétait davantage. Il dominait facilement la perverse, qui avait le béguin pour lui. L'autre, la mante religieuse, était bien plus forte que lui, intellectuellement et mentalement.

"En tant que gouverneur, tu es nommé par le roi," lui disait Tawina. "Mais si tu deviens impopulaire dans ta province, le roi te jettera comme un vieux fusible. Il suffit qu'une manifestation tourne à l'émeute dans ta province, et tu verras débarquer dans ton bureau un envoyé du baron Chim qui te demandera des explications. Plusieurs émeutes d'affilée, et le roi te sacrifiera pour apaiser le peuple. Il t'enverra dans un placard administratif à Sarnath, où tu n'auras rien à faire de la journée, et même pas une secrétaire à commander. Tu le sais bien, mais je vois que tu as tendance à l'oublier. Il est important, pour ta carrière en tant que gouverneur, que tu répètes partout, et surtout aux journalistes, que grâce à toi il n'y a plus de chômage dans la province de Leng. N'oublie pas de dire aussi que la disparition du chômage à Leng a fait monter les salaires. Tout ça grâce à toi. Mais joue les modestes. Tu n'as fait que ton devoir, par fidélité envers ta province natale, que tu aimes plus que tout."

À Gotinoa, tous les nouveaux venus savent au moins parler et lire le mnarruc, deux conditions indispensables pour avoir un emploi même basique. Certaines personnes savaient lire, à peu près, mais avaient de grosses difficultés pour écrire. On les remarquait à leurs fautes d'orthographe, et au fait qu'ils écrivaient en capitale d'imprimerie.

Pour certains employés de base des Jardins Prianta, ou hommes et femmes de ménage, la sélection, dans leur province d'origine, était rapide. Le recruteur, en discutant quelques minutes avec eux, voyait tout de suite s'ils parlaient ou non le mnarruc. Ensuite, il leur demandait de lire à haute voix un texte simple, de quelques lignes. Puis venait un semblant de visite médicale, et c'était tout. Plus l'emploi était élevé, plus les tests étaient compliqués. Les électriciens et les infirmiers passaient un véritable examen.

Les recruteurs faisaient toutefois attention à ce que la moitié des nouveaux arrivants soient des femmes, pour éviter les inconvénients liés à un excédent de jeunes hommes.

Le manque de médecins volontaires pour s'installer à Gotinoa obligea l'hôpital à continuer de faire travailler des androïdes médecins, par dérogation spéciale. Le Mnar dans son ensemble manque de médecins.

Tawina habitait dans les locaux d'Eunn Lomar à Gotinoa, et en profitait pour voir de près comment fonctionnait la ville, qui se peuplait quartier par quartier, depuis les alentours des trois gares, en direction de la périphérie. Avant qu'un immeuble reçoive des habitants, il fallait meubler et équiper les appartements, vérifier les clés, la plomberie, l'électricité et les sanitaires... Au début, ce travail était fait par des androïdes, puis des équipes d'êtres humains prirent le relais.

Les nouveaux venus passaient les premiers jours à explorer leur quartier, à repérer les supermarchés et les différents commerces, les écoles et les administrations. Beaucoup n'allaient pas plus loin, se limitant à un rayon de quelques centaines de mètres autour de leur domicile. Parfois, une salle de sport s'ouvrait, ou un café-restaurant, et c'était un petit évènement, les gens en profitaient pour faire connaissance.

Les temples étaient tous du même modèle, puisque avant l'arrivée des habitants du quartier il n'était pas possible de prévoir à quelle religion ils seraient attribués. Ils ne s'ouvraient au public que lorsque des religieux s'y installaient et en décoraient l'intérieur et l'extérieur.

Les architectes de la ville  avaient fait construire des stades, gérés par l'administration municipale. Des clubs sportifs se créèrent, et les services du bourgmestre organisèrent des compétitions. Il existait aussi des locaux prévus pour les associations. Des volontaires y créèrent des clubs de joueurs de carte.

Certaines villes ont une âme. En ce qui concerne Gotinoa, c'est pas sûr. Les gens qui y vivent sont arrivés là parce qu'ils avaient besoin d'un emploi. Coupés de leur famille et de leurs amis restés dans leur ville ou village d'origine, ils découvrent une ville où ils ne connaissent personne. Lorsqu'ils sortent de la ville, ils sont ébahis par l'aridité du pays. S'ils arrivent en hiver, le froid les démoralise, et chaque nuit, glaciale et interminable, est une épreuve. Les couples s'adaptent mieux à Gotinoa que les célibataires. Certains craquent moralement et repartent, incapables de s'habituer à leur nouvel environnement.

Les natifs de Leng, habitués au climat, ont en revanche souvent du mal à s'adapter à l'anonymat de la vie urbaine, à la vie en appartement et à la grisaille du béton.

Dans ces conditions, le lieu de travail devient l'endroit privilégié où l'on peut discuter avec des gens et se faire des amis, surtout à l'Institut Edonyl et aux Jardins Prianta, où l'on travaille lentement.

Il n'y a pas de journaux locaux, juste un bulletin municipal mensuel, distribué gratuitement dans les commerces, avec un supplément hebdomadaire qui donne les nouvelles locales et aussi un résumé de l'actualité nationale et internationale. Pour beaucoup d'habitants de Gotinoa, c'est la seule source d'information.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 2 Aoû 2017 - 11:33

Il semblait que Tsathoggua, le dieu-crapaud à fourrure noire vénéré par les natifs de Leng, n'était pas satisfait de la ville de Gotinoa. En effet, les problèmes s'accumulaient, comme si Tsathoggua avait lancé sa malédiction sur la nouvelle ville.

Il était difficile de trouver des volontaires pour venir travailler à Gotinoa. Certains nouveaux habitants repartaient rapidement. Comme raisons, ils citaient le climat, l'isolement de la ville, et son architecture déprimante, à base de grands immeubles de béton. Il y a des appartements de luxe à Gotinoa, mais pas de maisons individuelles. Les récriminations citaient aussi le manque de variété dans les produits vendus dans les magasins, les centres commerciaux surdimensionnés, mais dont plus de la moitié des emplacements étaient inoccupés, et même le manque de commerces et de cafés à proximité des habitations.

Certains experts mettaient en cause le béton, un matériau qui émet de mauvaises vibrations cosmiques. Un groupe de chamanes  suggéra de bâtir un temple gigantesque, dédié à Tsathoggua, le Temple-Montagne, d'un kilomètre de haut, afin de l'apaiser. Cette dernière suggestion fut jugée intéressante, car elle donnerait du travail pendant plusieurs années à des dizaines de milliers de maçons et de terrassiers, tout en évoquant les anciens récits concernant Kaddath, l'imposante résidence des dieux dans les Manuscrits Pnakotiques. Elle ne fut pourtant pas retenue, vu son coût pharamineux, et aussi parce que le chômage était tombé à un niveau très faible dans la province. Il n'était nul besoin de grands travaux. Alen Snuk, le gouverneur, remercia les chamanes pour leur proposition, mais ne lui donna aucune suite immédiate.

Voyant que la ville n'arrivait pas à dépasser 300 000 habitants, alors qu'elle disposait de logements suffisants pour loger un million de personnes, la société des Jardins Prianta, qui était dirigée par des cyborgs, proposa à Alen Snuk un plan audacieux.

Il s'agissait ni plus ni moins que de transformer les logements vacants en fermes verticales. Des légumes et des fruits pousseraient à l'intérieur des immeubles, comme des plantes vertes dans un appartement. Ainsi, Gotinoa résoudrait deux problèmes d'un coup. Elle n'aurait plus à gérer plusieurs centaines de milliers de logements vides, et elle produirait elle-même de quoi nourrir au moins une partie de sa population.

Certains appartements pourraient même être transformés en élevages. Les cyborgs pensaient notamment à élever des poulets et des porcelets, deux espèces animales dont la viande est appréciée par la plupart des Mnarésiens. La peau des porcelets peut aussi être traitée pour donner du cuir, et avec leur graisse on peut faire du savon.

Alen Snuk se demanda si les cyborgs des Jardins Prianta, qui étaient venus le voir dans son bureau de gouverneur, à Tsang, n'étaient pas tombés sur la tête.

"Mais les Jardins Prianta font déjà ça, à Gotinoa ! Le problème, c'est la main-d'œuvre ! Où la trouverez-vous ?"

"Nous pensons utiliser des cybermachines," répondit l'un des cyborgs. "J'ai amené une vidéo pour vous. Elle est très courte, moins d'une minute."

Le cyborg alluma son ordinateur portable. Alen Snuk vit sur l'écran une machine haute d'une cinquantaine de centimètres. Elle se tenait à côté d'un être humain, qui était là pour donner l'échelle. La machine était constituée d'une sphère grisâtre d'une vingtaine de centimètres de diamètre, avec quatre pattes métalliques articulées, se terminant par des pinces, et deux bras, également métalliques, munis de mains. La machine, qui était évidemment une cybermachine, était dotée de deux yeux cybernétiques, noirs et de forme ovale, identiques à ceux des humanoïdes.

Snuk vit la cybermachine se déplacer sur ses quatre pattes, monter un escalier, ou plutôt l'escalader, et ensuite grimper à une échelle, en s'aidant uniquement de ses pattes munies de pinces.

"Les cybermachines de ce type préfèrent les échelles aux escaliers" dit une voix off.

La vidéo continuait, montrant la cybermachine en train d'utiliser des outils dans un potager situé à l'intérieur d'une sorte de hangar.

"Est-ce qu'elles parlent, ces machines ?" demanda Snuk.

"Oui, parce qu'elles sont prévues pour travailler avec des humains, au moins de temps en temps. Si elles ne sont pas humanoïdes, c'est uniquement parce que la loi limite de façon très stricte le nombre de robots humanoïdes en dehors de l'Ethel Dylan. Mais la loi ne mentionne pas les cybermachines."

"Votre projet m'intéresse," dit Snuk. Il connaissait l'influence des Jardins Prianta auprès du gouvernement royal, et il savait que s'il rejetait la proposition des cyborgs, il risquait fort d'être remplacé par un nouveau gouverneur plus conciliant.

"Nous pensons faire venir plusieurs centaines de milliers de cybermachines à Gotinoa" dit le cyborg.

"Le plus tôt sera le mieux," répondit Snuk.

C'est ainsi qu'en quelques mois des quartiers entiers de Gotinoa furent habités par des cybermachines, et se mirent à produire des pommes de terre, des oignons, des fraises et toutes sortes de légumes, et aussi de la viande de poulet et de porc.

Les cybermachines se déplaçaient dans des camions et des fourgonnettes de différents modèles, afin de ne pas être vus du public, les cyborgs s'étant dits que le spectacle de milliers de robots ressemblant à des araignées géantes courant dans les rues pourrait effrayer les gens.

L'aspect de ville seulement à demi-habitée de Gotinoa demeura, aggravé par le fait que les rues ont été surdimensionnées par les planificateurs. Elles font quarante mètres de large, les carrefours sont distants de plusieurs centaines de mètres, et plusieurs milliers de personnes pourraient se rassembler sur la Place de Shathak. Gotinoa est une ville sans embouteillage, mais où on peut marcher sur des kilomètres dans des rues immenses et presques vides. Dix mois sur douze, il souffle un vent glacé entre les grands immeubles de béton grisâtre, ce qui décourage les gens de sortir de chez eux.

Dans certains centres commerciaux du centre ville, on a l'heureuse surprise de voir, à toute heure du jour et même de la nuit, des gens en train de faire leurs courses ou attablés dans les cafés. Il y a de la lumière et il fait moins froid qu'au dehors.

Mais dès qu'on s'approche de la périphérie, on voit que les centres commerciaux prévus ont été pris par les cybermachines et sont inaccessibles aux humains. Il n'y entre et sort que des fourgonnettes, le véhicule le plus commun à Gotinoa. Les immeubles de vingt-cinq étages, l'absence totale de présence humaine, les rues très larges mais vides, le silence, donnent l'impression étrange d'être sur une autre planète. Parfois, on voit, de loin, un joggeur.

Tawina passait parfois la nuit à Gotinoa, pendant l'année qu'elle a passé à Leng, alternant entre Tsang et Gotinoa. Elle racontait volontiers à Alen Snuk comment était la vie quotidienne à Gotinoa :

"Tu es dans ton appartement, et il fait déjà nuit en milieu d'après-midi, parce que c'est l'hiver. Tu as besoin d'aller acheter de quoi manger, alors tu mets ton manteau et tes bottines, et tu marches pendant vingt minutes jusqu'au centre commercial, en essayant de ne pas perdre l'équilibre sur le trottoir glacé... Vingt minutes, parce que pour certains habitants, le centre commercial le plus proche est à un kilomètre. Le vent est parfois tellement fort qu'il faut se courber pour arriver à avancer. Bien sûr, la rue est déserte, donc tu ne sais pas combien de temps tu resterais sans aide, si jamais tu te tordais la cheville. L'hiver, tu pourrais mourir de froid allongé sur le trottoir. C'est déjà arrivé. Quand tu as fini de faire tes courses au supermarché du centre commercial, tu dois revenir chez toi... Encore vingt minutes de galère. On ne prend pas l'autobus, parce que lorsqu'il fait moins vingt degrés en dessous de zéro, on n'a pas envie d'attendre dehors pendant un quart d'heure..."

"Alors comment font les gens ?" avait demandé Snuk.

"Le soir, après être rentré du travail, ils restent chez eux. C'est pour ça que tout le monde a une télé couleur grand écran. Le week-end, ils font leurs courses ou ils vont s'amuser, lorsqu'il fait jour, en calculant bien leurs déplacements. L'idéal, bien sûr, c'est d'avoir une voiture, mais la plupart des gens n'en ont pas. Dans ces conditions, ce n'est pas la peine de se demander pourquoi si peu de gens veulent venir habiter à Gotinoa..."

Une autre fois, Tawina avait été plus positive dans sa description :

"J'ai choisi de vivre à Gotinoa comme un habitant moyen. J'ai un deux-pièces... Salle de séjour, chambre à coucher, cuisine, salle de bain, et un balcon vitré... Il fait trop froid pour un balcon ouvert. J'ai fait comme la plupart des gens, j'ai transformé mon balcon vitré en jardin d'hiver. On se rend compte qu'on en a besoin. À Gotinoa, même les bureaux et les salles d'attente sont décorés de plantes vertes. On en met partout, pour compenser l'absence de verdure à l'extérieur."

"Un appartement neuf de deux pièces, avec salle de bain, cuisine et balcon, pour une personne seule ? À Tsang, il faut être riche pour avoir ça."

"Les planificateurs ont vu grand, à Gotinoa. Les logements sont plus vastes que partout ailleurs au Mnar. Et comme on passe la plupart du temps chez soi, on rend son intérieur aussi confortable que possible, avec de beaux meubles, des tableaux ou des affiches sur les murs... Bien manger fait aussi partie du confort. J'ai remarqué que les gens investissent beaucoup dans leur cuisine, ils se font de bons petits plats, ça réconforte. Ils invitent aussi des amis. À Gotinoa, ce sont souvent des collègues de travail, ou des membres du même club de gym, ou de la même association religieuse. Ce n'est pas difficile de se faire des amis. Moi-même, j'ai été invitée par des gens qui n'étaient que des relations de travail."

"La vie n'est donc pas si terrible, à Gotinoa..."

"Non, mais le climat est détestable..."
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyMer 2 Aoû 2017 - 16:06

Digression transférée vers "moyens de transports".

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptySam 19 Aoû 2017 - 23:59

Spoiler:

Zhæm Klimen était informaticien chez Somýropa, une firme aneuvienne d'imagerie médicale. Jeune ingénieur remarquablement doué, il était parti pour faire une brillante carrière, lorsqu'un incident changea brutalement le cours de sa vie.

Chez Somýropa, 51% des employés du secteur électronique et 58% du secteur informatique sont des femmes. Zhæm, qui avait été embauché deux ans plus tôt, avait longuement réfléchi. Il  en était arrivé à la conclusion que la politique d'égalité sexuelle rigoureuse menée en Aneuf amenait les entreprises à se passer des services d'hommes compétents.

Il avait écrit un texte d'une dizaine de pages, dans lequel il disait, arguments biologiques à l'appui, que si le sexe n'était pas pris en considération à l'embauche, beaucoup plus d'hommes que de femmes seraient recrutés dans l'informatique. Il avait pris un soin particulier à étayer tous ses arguments par des faits scientifiques irréfutables, afin d'écarter tout soupçon de sexisme. Il concluait son texte en disant que le féminisme pratiqué en Aneuf avait pour conséquence une véritable discrimination anti-masculine à l'embauche, contraire aux principes démocratiques.

Comme beaucoup d'ingénieurs, Zhæm pensait que ses arguments seraient discutés, peut-être même réfutés, mais qu'au moins il serait possible de faire progresser le débat. L'Aneuf est un pays de liberté, presque une utopie. Ce n'est pas l'Italie de la Renaissance, où l'astronome Galilée avait été persécuté par l'Inquisition pour avoir osé écrire que la Terre est ronde et tourne autour du Soleil.

Mais les choses ne se passèrent pas du tout comme Zhæm l'avait prévu.

Plusieurs femmes se plaignirent auprès de la direction. D'après elles, le texte de Zhæm était une attaque anti-féministe. Après une enquête discrète et précise, la direction de Somýropa muta Zhæm dans un service où il n'y avait quasiment que des femmes. Y compris parmi les cadres.

Ses nouvelles collègues étaient bien sûr déjà au courant de la cause de sa mutation.

Agatha, sa nouvelle supérieure hiérarchique, lui avait attribué un bureau à peine plus grand qu'un placard, où il s'étiolait. Ses collègues féminines, et même ses collègues masculins, se taisaient et pouffaient à son passage. Il n'avait plus de subordonné, bien qu'il fût ingénieur. Pire, au fil des mois et des années, il vit ses ex-subordonnés devenir ses égaux, puis ses supérieurs, pendant qu'il végétait.

Visiblement, Agatha attendait qu'il craque. "Si tu en as marre, tu peux toujours donner ta démission," lui disait-elle, les yeux brillants et le sourire aux lèvres.

Zhæm était allé voir le délégué syndical, qui était un homme. Mais le délégué ne lui avait pas accordé beaucoup de sympathie :

"Si tu t'étais contenté de dire, par exemple, que les femmes sont plus enclines aux sentiments et à l'esthétique qu'aux idées, ce qui fait qu'elles optent pour des carrières dans le social ou l'artistique, tu n'aurais pas été muté, tu aurais été simplement... recadré. Par une programmeuse, de préférence, pour que tu comprennes bien qu'il ne faut pas dire ce genre de choses. C'en serait resté plus ou moins là. Sauf si tu avais réitéré ensuite, bien sûr."

"Mais j'ai simplement écrit ce que je pense, avec des arguments scientifiques ! Et personne ne les a réfutés ! C'est donc qu'ils sont justes."

"S'ils sont anti-féministes, ils ne peuvent pas être justes, parce que le féminisme c'est la vérité, le progrès, l'égalité, tout ça... Dans ton texte, tu as dit que les femmes sont moins douées que les hommes dans certains domaines !"

Le délégué syndical s'étranglait d'indignation. Il éructa :

"Ton texte, c'est une attaque sexiste. Et toute attaque mérite une riposte."

"Ah oui, tu penses donc que ce que je subis en ce moment, c'est une riposte ? Je trouve que ce n'est pas une façon de répondre à mon texte, qui est une argumentation étayée par des faits scientifiquement prouvés ! C'est du harcèlement, voila ce que c'est !"

"Mon pauvre Zhæm, tu t'es mis à dos les femmes de l'entreprise par ton pamphlet outrageant, et elles constituent plus de la moitié du personnel. Une mise en quarantaine de la part de celles-ci n'est qu'une juste réponse, et pas forcément considérée comme du harcèlement."

"Et si je porte plainte ?"

"Ton avocat aura du mal à te défendre, car ce n'est pas un différend avec la hiérarchie, mais avec plus de la moitié du personnel. Et c'est pas évident que le personnel masculin te défende, parce que ton texte est infamant."

Zhæm secoua la tête :

"C'est pas possible d'entendre ça... Elles sont en train de me détruire !"

Le délégué se hâta de mettre les choses au point :

"L'Aneuf n'a pas la culture du harcèlement, contrairement à d'autres pays. Pour que quelqu'un soit mis à part chez nous, il faut vraiment qu'il y ait mis du sien."

"Alors, tu penses que j'y ai mis du mien ?"

"Oui, malheureusement pour toi, tu y as mis du tien. Qu'est-ce qui t'a pris d'écrire un pamphlet sexiste ?"

Zhæm mit une main à sa bouche et se mordit les doigts.

Le délégué, voyant son état, essaya de lui remonter le moral :

"Écoute, Zhæm, l'Aneuf est assez disparate. Si quelqu'un se sent mal apprécié dans une province, une région ou une commune, il peut toujours tenter sa chance ailleurs, et c'est pas spécifique à ce pays. Mais il faut qu'il évite certains endroits, selon ses phobies, ou bien l'ampleur de celles-ci. Les homophobes évitent le Sarimat, Nevstad ou le Nobenkost æstmorien, les identitaires santois évitent la Pande, Nakol ou les Foskarse... Les militants d'extrême-gauche évitent le sud et l'est des Santes ; les féministes évitent l'Alfazie... Mais bon, on est très loin de la ghettoïsation façon US."

"Ça, j'en suis pas sûr... En somme, camarade délégué, tu me conseilles de démissionner, et d'aller chercher du travail ailleurs ? Par exemple en Alfazie ?"

"Oui. Ou dans le sud ou l'est des Santes."

"Avec les identitaires ? Merci du conseil. J'y réfléchirai" répondit Zhæm, et il se leva pour sortir du bureau du délégué, la tête dans le brouillard, et en oubliant de dire au revoir.

Zhæm résista pendant plusieurs années à l'hostilité de ses collègues. Avec le temps, il élabora des stratégies pour ne pas craquer.

Par exemple, lui autrefois si méticuleux, il se mit à en faire le minimum. Lorsqu'on est harcelé, il est inutile de faire du zèle, cela ne change strictement rien. Au contraire, on dépense de l'énergie, dont on a besoin pour tenir le coup. Il est vrai qu'on donne ainsi des arguments à ceux qui veulent vous virer, mais Zhæm savait que le harcèlement se termine toujours de façon brutale.

En effet, soit on craque et on démissionne, soit on en viré et le résultat est le même. Parfois, c'est les deux à la fois, on craque et on est viré en même temps. Après, c'est le chômage, et c'est pas facile de retrouver du boulot quand on doit en même temps soigner une dépression. Heureusement, on peut aussi être sauvé par un coup de chance, par exemple si le harceleur en chef s'en va, ou si quelqu'un d'influent dans l'entreprise vous fait venir près de lui.

Zhæm s'était vite aperçu qu'il ne servait à rien d'essayer d'apaiser Agatha, par exemple en travaillant de son mieux. Même lorsqu'il travaillait bien et beaucoup, il gardait son étiquette de sexiste, et il restait donc mis à l'écart. Il réduisit donc ses efforts. Bien sûr, Agatha prit la baisse de productivité de Zhæm comme une offense personnelle.

Souvent, c'était dur pour Zhæm d'entendre ses collègues discuter amicalement en prenant ensemble le café. C'était dur aussi d'être obligé de manger seul. À cause de cela, il ne mangeait plus à la cantine, mais dans son bureau. Lorsqu'il faisait beau, il allait s'asseoir sur un banc dans un jardin public et se contentait d'un sandwich.

Parfois, il n'en pouvait plus de n'avoir personne à qui parler, et il aurait craqué s'il n'avait pas eu quelques amis en dehors de l'entreprise. Il n'avait plus de petite amie, car l'étiquette de sexiste lui collait à la peau, et faisait de lui l'équivalent d'un pestiféré. En Aneuf, les femmes n'aiment pas les sexistes et autres machos. Les quelques amis qui lui étaient restés fidèles étaient tous d'affreux réactionnaires, qui savaient très bien ce que c'est que d'être ostracisé dans un pays qui se flatte d'être tolérant et ouvert.

Zhæm avait lu le Bréviaire des Politiciens, de Mazarin. Une phrase du livre l'avait frappé : "Les amis n'existent pas. Il n'y a que des gens qui feignent l'amitié."

C'est tellement vrai, se disait Zhæm. Ses amis réacs n'étaient pas de vrais amis, mais des compagnons d'infortune. Comme lui, ils avaient désespérément besoin de parler avec des gens qui les aimaient bien. Les jours où le moral de Zhæm était au plus bas, le simple fait de boire de la bière dans un bar miteux avec d'autres mal aimés lui donnait le sentiment de ne pas être seul.

Le pire, dans le harcèlement, c'est qu'on finit par perdre sa confiance en soi. On n'ose plus parler, de peur d'être moqué ou rabroué. Lorsque vient l'estocade finale, et qu'on perd son emploi, c'est le début de la déchéance. Elle peut mener à la clochardisation. C'est pourquoi beaucoup préfèrent démissionner, avant d'être psychologiquement détruits.

Mais Zhæm Klimen ne faisait pas ce genre de sombre calcul, car il n'avait jamais connu la souffrance, du moins avant d'être embauché chez Somýropa. Supérieurement intelligent, plutôt sympathique, et un peu naïf, il n'avait connu que le succès. Jusqu'à ce qu'il publie sur le blog de l'entreprise les dix feuillets qui avaient scellé son destin...

Un type qui n'était pas du coin, un certain Eneas Tond, en voyage d'affaires dans la province, lui avait été présenté par un ami commun. Eneas lui avait parlé d'Hyltendale, et des gynoïdes qui vous donnent, pour un peu d'argent, non seulement du sexe, mais de l'affection.

Quelques mois plus tard, Zhæm avait sacrifié une partie de ses économies pour aller passer ses vacances à Hyltendale, et il avait loué les services d'une gynoïde de charme, pour toute une journée.

Il avait parlé, parlé, et la gynoïde comprenait tout, savait tout. La créature au corps de rêve et aux yeux d'extraterrestre avait à la fois la sagesse de Socrate, la beauté d'Hélène de Troie, et la sensualité dévorante de Messaline.

Ce jour-là avait été pour Zhæm l'équivalent d'une révélation divine. Plusieurs sociétés aneuviennes, comme Haxvag, ont des filiales à Hyltendale. Zhæm décida de tout faire pour être embauché par l'une d'elles.


Dernière édition par Vilko le Dim 20 Aoû 2017 - 14:19, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 0:48

Ôte-moi d'un doute : À quel moment Eneas parle à Zhæm du Mnar et d'Hyltendale ? Je suppose pas après son retour, mais avant d'y partir. Surtout quand on connait les conditions dans lesquelles il est revenu !

Aut'chose : Zhæm n'avait pas mis son pamphlet dans la boîte à idées de l'entreprise, mais dans un blogue, lisible par toute personne, même en dehors de la boîte, c'est ÇA qui a motivé sa mise "au ban". Si c'était resté interne à l'entreprise, il n'aurait été que "recadré", et encore plutôt officieusement, il aurait subi quelques quolibets, mais aurait gardé sa place. Par ailleurs, dans une boîte industrielle comme Somýropa, on ne pratique quasiment pas de quota, ce n'est ni une école, ni un hôpital pour enfants ou adolescents, où le quota doit être le plus proche possible du 50/50. S'y avait plus de femmes que d'hommes, c'est que l'unité de production était dans une région où habitaient beaucoup de femmes et où les hommes travaillaient (par exemple) davantage dans des garages ou des ateliers de chaudronnerie. Si Somýropa avait été, par exemple, à Nevstad, la proportion d'hommes aurait été nettement plus importante.

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 8:59

Anoev a écrit:
Ôte-moi d'un doute : À quel moment Eneas parle à Zhæm du Mnar et d'Hyltendale ?  Je suppose pas après son retour, mais avant d'y partir. Surtout quand on connait les conditions dans lesquelles il est revenu !

Non, après. Avec le temps, vient la nostalgie des bons moments passés avec les gynoïdes... Eneas est comme un ancien alcoolique, sauf que lui il était accro au sexe avec les gynoïdes. Même si pour diverses raisons il a décidé d'arrêter, il lui reste le souvenir des bons moments, et c'est de ces moments-là qu'il parle à Zhæm.

Anoev a écrit:
Aut'chose : Zhæm n'avait pas mis son pamphlet dans la boîte à idées de l'entreprise, mais dans un blogue, lisible par toute personne, même en dehors de la boîte, c'est ÇA qui a motivé sa mise "au ban".

Corrigé ! Very Happy

Anoev a écrit:
Si c'était resté interne à l'entreprise, il n'aurait été que "recadré", et encore plutôt officieusement, il aurait subi quelques quolibets, mais aurait gardé sa place.

Les dames auraient-elles été moins outragées si le pamphlet de Zhæm Klimen n'avait été lu que par les employés de l'entreprise ? J'en doute. D'autant plus que les blogs d'entreprise ne sont lus, en général, que par les gens qui sont "du métier", surtout dans un domaine aussi technique que l'imagerie médicale.

Anoev a écrit:
Par ailleurs, dans une boîte industrielle comme Somýropa, on ne pratique quasiment pas de quota, ce n'est ni une école, ni un hôpital pour enfants ou adolescents, où le quota doit être le plus proche possible du 50/50. S'y avait plus de femmes que d'hommes, c'est que l'unité de production était dans une région où habitaient beaucoup de femmes et où les hommes travaillaient (par exemple) davantage dans des garages ou des ateliers de chaudronnerie.

Ce qui indique que les femmes aneuviennes n'ont pas envie de travailler dans les garages ou les ateliers de chaudronnerie...

Aux États-Unis, certains ont remarqué que les féministes, qui trouvent qu'il n'y a pas assez de femmes dans l'informatique et les sciences, ne mentionnent jamais le fait qu'aux USA, 96% des chauffeurs routiers sont des hommes. Chauffeur routier, cela veut dire rouler 60 heures par semaine ou davantage, loin de chez soi, dormir dans son camion, ou au mieux dans un hôtel bas de gamme. Les risques d'accidents sont bien plus élevés que dans les bureaux, et les salaires ne sont pas terribles. Ce genre de job n'intéresse pas les féministes.

Cette idée aneuvienne de quotas pour les écoles et certains hôpitaux est d'ailleurs surprenante. Elle repose sur l'idée qu'une femme sera meilleure soignante ou meilleure enseignante qu'un homme, si les soignés ou les élèves sont des enfants. Zhæm Klimen aurait donc raison...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 11:19

Ce qui a le plus outragé ces dames, comme tu dis, c'est que le linge "sale" a été déployé en public. Et là, en plus, ce n'était pas des pratiques odieuses & illégales pratiquées par quelque déheràche, mais simplement un état de fait admis par tou(te)s, considéré comme légitime par tou(te)s, sauf par Zhæm, un indécrottable macho.


S'y a moins de femmes en atelier de chaudronnerie, c'est à cause de choses lourdes à transporter. Si ça ne gêne guère les matrones d'un quintal "façon-pays-de-l'est" (ou tout du moins comme on se les figurait en occident dans les années '50 à '80), c'est pas physiquement possible pour les minettes avec des bras comme des z'allumettes (j'exagère un poil). Mais une bonne poignée d'entre elles, faute de faire marcher leurs muscles, font marcher leur cerveau (pour des programmes) parce qu'elles ont été à bonne école, comme on dit.

Dans les années '60, s'y avait pas une seule femme chez les chauffeurs routiers, c'était surtout à cause de la technologie des camions d'alors : pas de direction assistée ; pour tourner un volant, y fallait des biscotos comme ça ! même beaucoup d'hommes ne pouvaient pas le faire. Pareil pour les trains, avec les locos à vapeur et les leviers d'aiguilles et de signaux à bras. Les fluides (pneumatique, puis électrique) ont participé à l'émancipation professionnelle des femmes, en leur rendant certains métiers jadis physiquement inaccessibles. Bon, bien sûr, y a eu les conservateurs, jaloux de leurs prérogatives et freinant des quatre fers. En Aneuf, ou les salaires statutaires sont égaux pour les hommes et les femmes, ça s'est soldé par l'instauration d'une "prime d'utilisation de matériel ancien" : ainsi, les employés capables de travailler avec des locos à vapeur, de vieilles locos électriques, des leviers d'aiguillages (les hommes) touchaient une prime que d'autres ne touchaient pas.

Les quotas dans les lieux fréquentés par des enfants ne sont pas du à une question de compétence, mais plutôt à un équilibre dans l'environnement humain : un lieu où tous les adultes sont du même sexe (ici féminin, comme on l'a vu dans beaucoup d'établissements infantiles) est considéré comme préjudiciable pour les jeunes enfants, C'est cette raison-là qui a empêché le développement de l'homoparentalité en Aneuf.

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 12:45

Anoev a écrit:
Ce qui a le plus outragé ces dames, comme tu dis, c'est que le linge "sale" a été déployé en public. Et là, en plus, ce n'était pas des pratiques odieuses & illégales pratiquées par quelque déheràche, mais simplement un état de fait admis par tou(te)s, considéré comme légitime par tou(te)s, sauf par Zhæm, un indécrottable macho.

Cette unanimité apparente est au moins en partie le résultat de l'intimidation, vu ce qui est arrivé à Zhæm.

Anoev a écrit:
Dans les années '60, s'y avait pas une seule femme chez les chauffeurs routiers, c'était surtout à cause de la technologie des camions d'alors : pas de direction assistée ; pour tourner un volant, y fallait des biscotos comme ça ! même beaucoup d'hommes ne pouvaient pas le faire.

C'était il y a cinquante ans. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, avec la direction assistée, qui s'est généralisée dans les années 70, il y a déjà une quarantaine d'années. Mais aux États-Unis, en 2017, 96% des chauffeurs routiers sont toujours des hommes. Pourquoi ? Parce que les chauffeurs routiers font de longues heures et doivent souvent dormir loin de chez eux. Les femmes n'aiment pas ça, surtout quand elles ont des enfants à élever, et c'est tout à fait normal.

Le problème n'existe pas chez les chauffeurs de bus, c'est pourquoi on trouve beaucoup de femmes au volant des autobus urbains, dans tous les pays occidentaux.

Le féminisme, en fait, c'est quoi ? Les femmes qui s'organisent en groupe de pression. L'idéologie n'est qu'un prétexte, ce qui compte, pour les militantes féministes, c'est que les femmes aient un accès privilégié aux "bons" jobs. Comme le disait crûment Anne Lauvergeon, l'ancien PDG d'Areva :



Au passage, on voit que le "mâle blanc" n'est ni méchant ni rancunier : Atomic Anne est restée PDG d'Areva encore trois ans après la vidéo. Elle n'a perdu son poste que lorsque les résultats désastreux de sa gestion sont devenus impossibles à cacher...

Ce qui rend notre époque intéressante, c'est que l'économie est en contraction, et que le phénomène paraît impossible à inverser. Concrètement, cela se traduit par la baisse du niveau de vie moyen, et par le fait qu'il devient de plus en plus difficile pour les jeunes d'avoir le même niveau de vie (voiture, maison) que leurs parents.

On peut donc s'attendre à des luttes de plus en plus dures entre les différents groupes de pression pour ce qui restera de la prospérité d'autrefois. Mais lorsque le gâteau devient un peu plus petit chaque année, il y a nécessairement des perdants.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 13:18

En Aneuf, le féminisme (du moins, une certaine forme de féminisme, celle qui consiste à obtenir des privilèges, des tâches réservées et j'en passe) est aussi mal vu que le machisme. Ce sont les deux composantes d'un même ostracisme : l'ostracisme sexuel, et... ça passe pas ! Pour ça, l'Aneuf est l'exacte antithèse des États-unis. Les hommes et les femmes sont sur terre pour s'entraider, pas pour se marcher d'ssus. Et si des fois ils se montent dessus ( I love you Razz ), ça doit être par esprit d'affection et non par envie de domination. Et si domination y doit y avoir, ce n'est pas par la force, par une classe sociale, mais par les facultés intellectuelles et mentales (aaah ! la force mentale !), ce n'est pas pour une satisfaction individuelle, mais pour le bien d'une communauté entière.

Le problème c'est que Zhæm était ce qu'on appelle un "individu alpha" et qu'il est tombé sur une communauté pas du tout encline à se faire dicter des ordres pour le fun. Et comme il n'a pas compris la résistance qu'il a rencontré, lui qui avait joué (avec plus ou moins de réussite°) les dominants, est tombé ici sur un bec et il l'a payé le prix fort.

Y commence à y avoir, en France, des conductrices de locomotives (une profession où le découché est aussi courant que sur la route), ça existe depuis deux à trois décennies en Aneuf. Qui s'occupe des enfants ? Eh ben les maris à emploi sédentaire, ou bien les grands-parents, voire les couples ou célibataires* amis de la famille, c'que j'sais. En Aneuf, on s'entraide au maximum.


Vilko a écrit:
Mais lorsque le gâteau devient un peu plus petit chaque année, il y a nécessairement des perdants.
Mais quand le perdant a tout perdu et n'a plus rien à perdre, il est capable de tout. Le problème, c'est qu'actuellement, où le "gâteau" à partager est plus petit, il reste encore des individus qui non seulement ne veulent pas en obtenir moins (même pourcentage du gâteau) mais autant, et voire davantage. Ces individus sont vraiment des nuisibles.

°Pas évident en Aneuf, mais y a encore quelques coins, aux Santes ou en Alfazie, où on trouve ces regrettables cas, encore plus rares dans les cinq provinces du nord. La Pande, c'est un peu particulier.
*Absolument hors de question sous nos latitudes.

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 18:49

Malgré ses efforts, Zhæm ne réussit pas à obtenir un emploi dans la filiale hyltendalienne d'une société aneuvienne. Mais il ne démissionna pas de la société Somýropa, car à Zodonie, une gynoïde de charme, nommée Virna, lui avait proposé un deal, qu'il avait accepté.

En échange d'une forte somme d'argent, Zhæm donna à la gynoïde toutes les informations qu'il avait concernant le système informatique de Somýropa, et tous les mots de passe qu'il connaissait. Il accepta même d'installer des chevaux de Troie informatiques dans les ordinateurs de Somýropa auxquels il avait accès, à l'aide d'un clé USB que Virna lui avait donnée. C'est ainsi que les cybersophontes du Mnar, grâce aux données volées dans les ordinateurs de Somýropa, ont pu rattraper l'Aneuf dans le domaine de l'imagerie médicale de haute technologie.

Les conséquences économiques n'étaient pas négligeables, le prix d'un scanner médical atteignant facilement un million de dollars, sans compter le matériel annexe. Hyltendale, avec ses hôpitaux géants, qui sont l'une de ses principales sources de revenus, en utilise plusieurs centaines. Les patients viennent du monde entier, les médecins humanoïdes coûtant beaucoup moins chers que leurs  homologues humains.

L'action n'était pas exempte de danger pour Zhæm. S'il se faisait prendre, il était sûr d'aller en prison pour espionnage économique. Il était même possible, vu l'étendue du dommage causé, qu'il soit aussi condamné pour trahison et qu'il se retrouve en prison B, une spécialité aneuvienne. Lorsqu'on passe par la prison B, on en ressort à l'état de légume.

Zhæm décida de minimiser les risques, d'abord en dissimulant le fait qu'il avait été payé par les cybersophontes.

Avec une partie de l'argent que lui avait donné Virna, il acheta une cabane de jardin transformée en habitation, tout au nord du district de Tomorif, à la limite entre Hyltendale et la campagne. La cabane faisait vingt mètres carrés, et elle était séparée de ses voisines et de la rue par une étroite bande de terre, délimitée par un grillage et envahie d'orties. Elle était munie d'une douche, de WC chimiques et d'un minuscule coin cuisine. Côté mobilier, on ne pouvait mettre qu'un lit, une armoire, une petite table et deux chaises pliantes. Comme partout à Hyltendale, le wi-fi était gratuit, courtoisie des cybersophontes.

C'était franchement minimaliste comme habitation, surtout à deux. Mais une gynoïde tient peu de place, et, pour un touriste, il est possible de vivre à Hyltendale avec peu de vêtements.

En bon Aneuvien, Zhæm s'attendait à avoir une gare à proximité de son logement, mais ce n'était pas le cas. Toutefois, comme partout à Hyltendale, le quartier était desservi assez régulièrement par les bus, même la nuit. Le centre commercial le plus proche était à dix minutes de marche.

Pour ce que Zhæm pouvait en voir, la population du quartier était constituée en partie de "touristes sexuels" dans son genre, qui louaient une cabane le temps de leur séjour, et de retraités et pensionnés pauvres. Ceux-ci, dont beaucoup étaient invalides ou alcooliques, recevaient la visite régulière de gynoïdes et d'androïdes vêtus de costumes de toile grise, qui étaient apparemment l'équivalent hyltendalien de travailleurs sociaux.

Zhæm investit le reste de l'argent dans Antopa, une société hyltendalienne de téléphonie. Selon ses calculs, les dividendes seraient suffisants pour lui permettre de louer une gynoïde bas de gamme pendant ses futurs séjours à Hyltendale. En Aneuf, personne n'en saurait rien.

Mais pour vivre et payer ses voyages, Zhæm devait continuer à travailler en Aneuf. Son travail d'espion terminé, il envisageait de démissionner de Somýropa et de s'installer à Sanpaz, dans la province d'Alfazie. Un ingénieur informaticien expérimenté comme lui était à peu près sûr d'y trouver du travail, et la mentalité y était nettement moins féministe que dans le nord.

En attendant, il devait continuer à souffrir chez Somýropa. La vérité oblige à dire qu'il souffrait moins qu'avant. Il lui arrivait de plus en plus souvent de faire semblant de travailler, et de regarder des vidéos en mnarruc sur son ordinateur. Les remarques méprisantes d'Agatha le laissaient indifférent, et les ricanements qu'il entendait derrière son dos aussi. Il avait affiché un plan d'Hyltendale sur un mur de son bureau, au grand déplaisir d'Agatha.

Zhæm laissait toujours la porte de son bureau ouverte. Lorsqu'elle était fermée, il avait l'impression d'être dans un placard. Il avait mis sa table de travail, avec son ordinateur dessus, contre un mur. À sa gauche, il avait une petite fenêtre carrée, en verre dépoli, et à sa droite, la porte du bureau, qui donnait sur le couloir. Pour aller de la porte à la fenêtre, il était obligé de pousser sa chaise.

Un jour, Agatha entra dans le bureau de Zhæm, ce qui était inhabituel. Elle le faisait plutôt venir dans le sien, parce qu'elle n'aimait pas rester debout en parlant à Zhæm, qui ne se levait jamais de sa chaise en la voyant.

"Ton problème" dit-elle à Zhæm, "c'est que tu es ce qu'on appelle un individu alpha, et que tu es tombé sur une communauté pas du tout encline à se faire dicter des ordres pour le fun."

"Être considéré comme un alpha, c'est un compliment" dit Zhæm.

"Si tu veux... Comme tu n'as pas compris la résistance que tu as rencontré, toi qui a joué les dominants, tu es tombé ici sur un bec, et tu le payes le prix fort."

Agatha avait parlé d'une voix calme, un peu lasse. Zhæm s'était demandé où elle voulait en venir.

"Je vois les choses différemment" avait-il répondu posément. "Je n'ai jamais joué les dominants. J'ai dit ce que je pense être la vérité, en appuyant mes arguments sur des bases scientifiques. Je pense donc avoir raison au niveau scientifique. Là où je reconnais que j'ai eu tort, c'est que je n'ai pas vu que chez Somýropa il y a un lobby de femmes qui veulent le pouvoir et les bons salaires, et qui se fichent pas mal de la vérité scientifique."

Agatha était partie sans répondre.

Le lendemain, l'une des collègues de Zhæm, une jeune femme petite et menue, très timide, prénommée Natali, vint le voir dans son bureau, à sa grande surprise.

Après avoir tourné autour du pot, elle finit par lui dire :

"Zhæm, Agatha a essayé plusieurs fois de te virer de Somýropa, mais elle n'y est pas arrivée. Elle pense qu'il y a des hommes, dans la hiérarchie, qui te soutiennent en secret, et qui bloquent les rapports qu'elle fait sur toi. Je pense que tu le sais. Alors voila, elle m'a dit qu'elle était prête à arrêter d'être sans arrêt sur ton dos. Elle veut se réconcilier avec toi. En ce moment, elle n'est pas bien du tout, parce que les ingénieurs de la sécurité ont découvert que le système informatique de l'entreprise est piraté, et ça dure depuis des mois."

"Et alors ?" demanda Zhæm.

"Il paraît que les virus ont été introduits depuis son ordinateur de bureau."

Agatha, qui n'aimait pas se compliquer la vie, avait désactivé le code d'accès de son ordinateur, depuis des années, afin que ses subordonnés puissent l'utiliser pour accéder à la mémoire centrale ultra confidentielle de l'entreprise, même lorsqu'elle n'était pas là.

Trois mois auparavant, Zhæm était venu très tôt un matin, avant tout le monde, et il avait utilisé l'ordinateur d'Agatha pour introduire dans le système quelques chevaux de Troie sophistiqués, mis au point par les cybersophontes. L'introduction avait été faite au moyen de la clé USB que Virna avait donnée à Zhæm. Il avait ensuite éteint l'ordinateur. Lorsqu'elle était arrivée, une heure plus tard, Agatha ne s'était aperçue de rien.

"Ce n'est pas mon problème" dit Zhæm, qui sentait sa gorge se contracter.

"Elle a besoin de soutien. Si jamais tu es interrogé par la sécurité..."

"Je dirais que ça ne m'étonne pas d'elle..."

"Non, non, surtout pas ! Zhæm, il faut qu'on dise tous la même chose si jamais on est interrogés par la sécurité."

Zhæm réfléchit un moment. "D'accord..." finit-il par dire. "Mais il faut que tu mettes par écrit ce que je dois dire... Sinon, tu comprends, je risque d'oublier..."

Natali le regarda d'un air horrifié.

"C'est ça, et tu donneras le papier à la sécurité, en disant que je t'ai dicté ton témoignage ! Tu me prends pour une conne ou quoi ?"

Elle partit presque en courant, les larmes aux yeux.

Finalement, personne ne fut interrogé, à part Agatha, qui fut licenciée peu après pour manquement grave aux règles de sécurité. Elle fut remplacée par Natali, qui était la plus compétente sur le plan technique, après Zhæm. Mais ce dernier était grillé à vie chez Somýropa, et il le savait.

Natali n'avait pas l'autorité nécessaire pour diriger un service, mais elle avait une qualité, c'est qu'elle en était consciente. Elle fit la paix avec Zhæm :

"J'ai besoin de l'aide de tout le monde pour faire fonctionner le service. Si tu joues le jeu, je le jouerai aussi. Je vais prendre le bureau d'Agatha, puisque j'hérite de son poste. Tu pourras prendre le mien, il est plus grand que celui où tu es actuellement."

Zhæm avait perdu sa naïveté depuis longtemps. Il savait que Natali, derrière sa timidité maladive, était ambitieuse et déterminée. Zhæm avait la réputation d'être "invirable" grâce à ses soutiens occultes. Faute de pouvoir s'en débarrasser, Natali avait donc décidé d'utiliser à son profit les compétences techniques du macho de service. Elle voulait pouvoir dire : "Agatha n'a pas réussi à faire travailler Zhæm Klimen. Moi, j'y suis arrivée dès le départ."

Zhæm renonça à démissionner de Somýropa. Ses collègues continuaient à l'ignorer, sauf Natali, qui le complimentait sur son travail et lui demandait souvent son avis. La ficelle était un peu grosse, mais, pour la première fois depuis des années, Zhæm avait l'impression de travailler dans des conditions normales.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 21:47

Zhæm ne risque pas la prison B, celle-ci étant réservée aux individus dangereux (meurtriers, trafiquants de drogues dures, violeurs récidivistes, chefs de réseaux mafieux, intelligence avec l'ennemi en temps de guerre etc), raison pour laquelle y a peu de gens incarcérés dans ces prisons. Par contre, même dans une prison A, il risque d'avoir une incarcération très pénible (s'il y va, et y a des chances pour qu'il y aille) quand ses codétenus apprendront le motif de sa condamnation : les Aneuviens sont très chatouilleux sur la fibre nationale (quelle que soit leur ethnie). Un espion étranger ne risque pas grand chose, mais un traitre, rien ne lui est pardonné.

S'il trouve un boulot, même à Sanpaz, il risque d'être retrouvé... et appréhendé*. Sa planche de salut, c'est la fuite vers Hyltendale, mais sans espoir de retour. Contrairement à Tonnd, qui a pu réparer sa faute, une divulgation d'informations sensibles à une puissance étrangère (pas ennemie, c'est d'jà ça !) c'est à peu près irréparable. Par ailleurs, les relations hommes/femmes, en Alfazie, si c'est pas le Malyr, le Roenyls ou la Scandinavie, c'est pas non plus l'Arabie Séoudite, ni l'Afghanistan, ni même le Texas, il va vite s'en rendre compte°. Mais plus il fuit en avant, plus il s'entête, et plus il s'entête, plus il s'enfonce. Son blogue véhément, c'était le premier pas de trop, la clef uhesbée remise à la gynoïde, c'est le deuxième. Où le mènera le troisième.


Ce qui m'étonne un peu, c'est ta description d'Eneas. Il est certes sujet à une paraphilie (nexàqud), il a certes commis un délit, mais jamais il n'aurait dit ça à Zhæm sauf... sauf s'il le connait un peu de réputation et que ce dernier représente tout ce qu'il déteste : le machisme, l'envie d'emprise sur les autres (ce qui le poussa à flouer son ancien patron-maître-chanteur).


*Dans son cas, c'est à 6:00 par la police alfazienne, assistée de la police fédérale. Si c'avait été de l'espionnage intéressant directement la Défense nationale, c'était la Gendarmerie, et à n'importe quelle heure, y compris en pleine nuit en cas de nécessité.
°C'est d'ailleurs étrange qu'il ne le sache pas.

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 27 EmptyDim 20 Aoû 2017 - 23:56

Anoev a écrit:
même dans une prison A, il risque d'avoir une incarcération très pénible (s'il y va, et y a des chances pour qu'il y aille)

Il n'ira pas en prison. Cool

Zhæm s'est arrangé pour que les soupçons se portent sur Agatha, puisqu'il a introduit les virus dans le système informatique de Somýropa à partir de l'ordinateur de celle-ci. Mais en reconnaissant sa faute (elle avait désactivé le mot de passe de son ordinateur) Agatha a semé le doute : n'importe qui a pu utiliser son ordinateur. Elle a quand même été licenciée, parce qu'elle avait enfreint les règles de sécurité informatique.

Les enquêteurs ne peuvent pas non plus écarter la possibilité qu'Agatha ait téléchargé les virus par inadvertance, en surfant sur Internet.

Anoev a écrit:
S'il trouve un boulot, même à Sanpaz, il risque d'être retrouvé... et appréhendé*. Sa planche de salut, c'est la fuite vers Hyltendale, mais sans espoir de retour.

Pour l'instant, il n'y a absolument aucune preuve contre Zhæm. Et comme il s'entend mieux avec Natali, sa nouvelle cheffe, qu'avec Agatha, il a décidé de rester chez Somýropa. Aller travailler au Sanpaz, c'était juste un projet, auquel il n'a pas donné suite.

Depuis qu'il est sous l'autorité de Natali, Zhæm est devenu très rentable pour Somýropa. En effet, il est l'ingénieur le plus compétent de son service, mais aussi le plus mal payé, puisqu'il est grillé pour l'avancement...

Anoev a écrit:
Ce qui m'étonne un peu, c'est ta description d'Eneas. Il est certes sujet à une paraphilie (nexàqud), il a certes commis un délit, mais jamais il n'aurait dit ça à Zhæm sauf... sauf s'il le connait un peu de réputation et que ce dernier représente tout ce qu'il déteste : le machisme, l'envie d'emprise sur les autres (ce qui le poussa à flouer son ancien patron-maître-chanteur).

Eneas a simplement dit à Zhæm que les gynoïdes donnaient à la fois du sexe et de l'affection, ce qui est la stricte vérité. Ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd...

Zhæm, de mon point de vue, ne se définit pas par l'envie d'emprise sur les autres. Si c'était le cas, il ferait semblant d'être féministe, comme quelques machos assoiffés de pouvoir que nous connaissons, tels que Bill Clinton (qui a été accusé de viol et s'en est sorti en versant 800.000$ à son accusatrice), Denis Beaupin, accusé plusieurs fois de harcèlement, DSK le trousseur de femmes de chambre, et bien d'autres...

Zhæm Klimen n'a rien à voir avec ce genre d'individus peu recommandables. C'est un garçon très intelligent mais trop naïf, du moins au départ. Mais le harcèlement qu'il subit depuis plusieurs années lui a fait perdre sa naïveté et sa trop grande gentillesse.

Anoev a écrit:
la clef uhesbée remise à la gynoïde

En fait, c'est la gynoïde Virna qui a remis une clé USB à Zhæm. Cette clé USB contient des chevaux de Troie informatiques hyper-sophistiqués, qui permettent aux cybersophontes de contrôler à distance le système informatique de Somýropa. Ou plutôt, permettaient, parce qu'au bout de trois mois le piratage a été découvert.

Naturellement, Zhæm a formaté la clé USB après usage... Ainsi, elle ne contient plus rien qui puisse l'incriminer, même si la police aneuvienne la retrouvait chez lui.
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