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| Expression de la possession | |
| | Auteur | Message |
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Greenheart
Messages : 4041 Date d'inscription : 03/05/2008
| Sujet: Expression de la possession Ven 12 Juin 2020 - 19:20 | |
| Comment exprimez-vous les différentes relations entre êtres et choses que l'on pourrait regrouper sous le nom de possession (et la non possession) ? *** Concernant la forme, on peut s'intéresser à quel genre de mots on a besoin pour exprimer ce lien. Je suppose que toutes les classes grammaticales peuvent exprimer la possession, mais dans ce cas, il faudrait préciser comment on combine ces mots de telle ou telle classe, et les règles d'accord s'il y en a. Par exemple en français l'adjectif possessif s'accorde avec la personne du possesseur et le nom de l'objet possédé, qui peut être de n'importe quel genre ou nombre peut importe la réalité, c'est le dictionnaire qui décide. - Spoiler:
En anglais, il n'y a d'accord qu'avec la personne et pour la troisième personne avec le genre.
His book. Her bag. Son livre. Son sac.
His books. Her bags. Ses livres. Ses sacs.
Ni en français, ni en anglais il n'y a d'accord au niveau de la fonction, mais en latin il y a le problème de distinguer le sexe du possesseur, impossible en utilisant seulement l'adjectif possessif (seulement si le possesseur est sujet) ou le pronom génitif (qui provient de) ou datif (qui profite à).
Je vois son livre (à lui) et son sac (à elle). I see his book and her bag. Video codicem viri et saccum mulieris. (je vois le livre de l'homme et le sac de la femme - tous les deux adultes).
Ce qui du coup, met en relief le fait que les possessifs français ou complément de nom ont bien du mal à distinguer le livre qui nous appartient mais que quelqu'un d'autre tient, le livre que l'on a écrit et celui qu'on possède etc. en plus du sexe de celui qui possède ou du genre de la chose possédée par exemple au pluriel.
*** Concernant le fond, de quoi nous parlons quand on évoque un lien de possession :Quelques pistes non limitatives, et chaque cas de figure peut contenir en fait plusieurs cas de figure : Quand quelque chose ou quelqu'un possède quelque chose, il peut s'agir : - Spoiler:
1. D'un état, d'une qualité, d'un sentiment, d'une sensation, un attribut, un droit, une nationalité, une envie, un choix, un goût etc.
Tout l'amour que j'ai pour toi. J'ai froid, très froid. Je n'ai jamais eu de chance mais cette fois sera la bonne. Je ne suis pas parisienne...
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2. D'un possesseur qui possède une partie de lui-même, formant un tout avec lui.
Cet ordinateur a un processeur puissant. J'ai deux mains, alors je te dis au revoir à deux mains. Ce manteau a une couleur qui me plait.
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3. D'un possédé appartenant à un ensemble d'éléments de même nature ou non, séparés ou non du groupe.
Un électeur sur deux pense ne pas aller voter dimanche. La police a procédé à une dizaine d'arrestations. Je suis de ceux qui ne renoncent jamais.
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4. D'un vêtement, uniforme, panoplie, armure ou d'accessoire.
Je porte une paire de jeans et un t-shirt rouge, c'est mon t-shirt, mes jeans. Il n'aura qu'une sandale à ses pieds : c'est sa sandale. N'oublie pas de mettre ta ceinture quand tu conduis : ton pantalon tombe.
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3. D'un possesseur qui tient un objet (deux objets séparés).
Haut les mains, j'ai un pistolet dans ma poche et mes balles dans mon slip. La trousse de secours est dans mon sac-à-dos et il est sur mon dos. Utilise le paiement sans contact avec ta carte, pas la mienne.
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4. D'un possesseur qui détient un objet (il est à sa disposition, on le lui a remis mais ce n'est pas forcément sa propriété, il l'a volé, il l'a emprunté, il l'a trouvé etc.)
J'ai trouvé un portefeuille dans la rue. Un inconnu vous offre des fleurs qui puent, c'est l'effet Répulse. Il ne mange que du bio et pourtant il n'urine que du glyphosate.
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5. D'un possesseur qui utilise un objet.
C'est mon train, le train pour Dijon. Beurkadent, c'est mon dentifrice. J'ai mis tes clés de ton véhicule de fonction dans ton casier.
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6. D'un possesseur qui a mis de côté un objet pour qu'il puisse le retrouver, mais il ne le tient pas et il n'est pas forcément sa propriété.
J'ai du bon tabac dans ma tabatière. J'ai 100 euros sur mon livret A mais c'est un emprunt. C'est nous qui avons votre femme, si vous voulez la revoir...
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7. D'un être vivant censé n'appartenir à personne et pourtant déclaré à quelqu'un.
...euh, ce n'est pas votre femme et vous ne voulez pas la revoir ? Mon avocat fera le nécessaire. En attendant, allez promener mon chien. Si tu te fais tout ce que je dis, tu seras un homme, mon fils (paraphrase d'un fameux poème de Kipling).
*
8. D'un possesseur déclaré propriétaire de l'objet en question.
La cabane que j'ai achetée se trouve au Canada, sous deux mètres de neige. Je n'ai jamais reçu les livres que j'ai pourtant payé. Donner c'est donner, reprendre c'est voler : cette mini-jupe est à moi !!!
*
9. Du représentant du possesseur gérant le bien du possesseur.
Vous avez acheté cette maison mais cette mine d'or et le gaz de schiste appartient à l'état : dégagez. Le règlement de la copropriété vous interdit d'élever des poules dans votre jardin. Vous avez acheté ce programme (ce film) mais il appartient à Microsoft (à Disney).
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10. Du fabriquant, producteur, cultivateur pour un produit, un fruit etc.
J'ai fait un gros caca. C'est mon gâteau, c'est moi qui l'ait fait. Mes pommes, ce sont les meilleures : gouttez-en moi donc une !
*
11. Du créateur ou auteur d'une oeuvre dont il est censé détenir les droits.
C'est un opéra de Verdi. C'est le collier de nouilles de mon bébé, il l'a fabriqué pour me l'offrir à la fête des mères. C'est bien ce que j'ai dit : ce sont mes propres mots.
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12. De celui qui cite des propos ou reformule ou transforme la réalité ou les propos d'un autre.
C'est ta version des faits, je n'ai rien vu de tout ça. Mes personnages ne résument pas ma pensée mais la leur. C'est mon idée mais les idées appartiennent à tout le monde.
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13. La possession au sens de posséder le corps de quelqu'un ou sa chair.
(censuré) Il est possédé par la fièvre du jeu. Sur scène, elle incarne Aphrodite, déesse de l'Amour.
(liste non exhaustive) | |
| | | Mardikhouran
Messages : 4314 Date d'inscription : 26/02/2013 Localisation : Elsàss
| Sujet: Re: Expression de la possession Ven 12 Juin 2020 - 20:35 | |
| Je vais d'abord parler du láadan de Suzette Haden Elgin, car il distingue différentes relations de "possession" avec des marqueurs casuels distincts :
- -tha : "possédé par naissance", par exemple une partie du corps ou un membre de la famille
- -the : quant le locuteur ne sait pas ou ne veut pas savoir de quelle manière le possédé appartient au possesseur
- -thi : "possédé par hasard", par exemple un livre que l'on tient
- -tho : "possédé légalement, après achat, par convention", par exemple une maison ou un époux ou un ami... ou un opéra que l'on a créé, car c'est le suffixe par défaut lorsque les autres ne conviennent pas
- -thu "partitif", faux possessif dans "un cœur de pierre" ou "une collection de livre"
Les terminaisons nominales s'appliquent au syntagme nominal tout entier, pas seulement au nom (ou pronom) de tête, c'est pourquoi on peut trouver d'autres marqueurs de cas après les possessifs, par exemple : Báa eril eb le belid withethoth wa(déclaratif) (passé) acheter moi maison femme-POSS-ACC (perception directe) "j'achetai la maison de la femme" [c'est de la surdéclinaison] Autre particularité syntaxique, un nom propre ne peut pas recevoir ces suffixes et nécessite un pronom personnel de secours : Báa eril eb le belid Meri bethoth wa(déclaratif) (passé) acheter moi maison Mary elle-POSS-ACC (perception directe) "j'achetai la maison de Mary" | |
| | | Wojnicz
Messages : 855 Date d'inscription : 13/12/2017
| Sujet: Re: Expression de la possession Ven 12 Juin 2020 - 22:49 | |
| Le système du láadan est similaire à celui de nombreuses langues faisant une distinction entre possessions inaliénables (généralement le corps et la famille) et aliénables (généralement tout le reste). Certaines de ces langues ont également des possessions obligatoires, certains noms (généralement ceux désignant les possessions inaliénables) ne peuvent jamais y apparaitre sans un possesseur. En klingon, l'idéolangue que je connais le mieux, la possession est marquée de deux façons:
- En plaçant simplement le possesseur avant le possédé, comme en anglais, par exemple le nom natif du klingon, tlhIngan Hol (Klingon langue) signifie "langue des Klingons".
- Avec un suffixe possessif là où on utiliserait un pronom possessif en français, par exemple Holchaj (langue-leur) signifie "leur langue".
Ces suffixes marquent le nombre de possesseurs, mais pas le nombre de possédés, ça se fait séparément. À la première et la deuxième personne, il y a deux types de suffixes possessifs, ceux pour les êtres vivants capables de parler, et ceux pour tout le reste, les suffixes de la troisième personne ne font pas cette distinction. Il est facile de les différencier, ceux de la première catégorie finissent tous par ', ceux de la deuxième catégorie et de la troisième personne par j. En tableau, ça donne ça (j'utilise le masculin dans les exemples, mais le klingon ne distingue pas le sexe, le forbekien plus bas non plus): Possesseur | jup (ami) | qam (pied) | Mon | jupwI' | qamwIj | Ton | juplI' | qamlIj | Son | jupDaj | qamDaj | Notre | jupma' | qammaj | Votre | jupra' | qamraj | Leur | jupchaj | qamchaj |
La diachronie du klingon n'a jamais été explorée en détail comme ce n'est pas une langue naturaliste, mais il est possible que - ma' et - maj soient apparentés au pronom maH (nous) et - chaj à chaH (ils). - wI' et - lI' peuvent créer des ambiguïtés quand on les emploie avec des noms homophones de verbes, car des suffixes identiques existent pour les verbes et servent respectivement à convertir un verbe en agent et à marquer l'aspect progressif. Par exemple, jaw signifie à la fois "seigneur" et "discuter", donc jawwI' signifie à la fois "mon seigneur" et "quelqu'un qui discute", et jawlI' signifie à la fois "ton seigneur" et "il est/ils sont en train de discuter" (à la troisième personne, les sujets des verbes ne sont pas marqués). Comme en pIqaD (alphabet klingon), l'orthographe est identique, les différencier n'est possible que par le contexte. En forbekien, une de mes langues et celle qui a le système de possession le plus intéressant que j'ai dû créer pour le moment, je me suis inspiré dans une certaine mesure du klingon, mais aussi des langues sémitiques. La première façon de construire la possession est de mettre le nom possédé à l'état construit et le placer avant le possesseur. Cet état s'obtient en ajoutant - ar au radical au singulier, - ir au collectif et - or au pluriel et au singulatif. Par exemple, le nom natif du forbekien est oktar Forbek (langue-de Forbek), le mot okta (langue) est à l'état construit. Un problème avec cette méthode, c'est les adjectifs, car ils suivent les noms mais ne peuvent pas être à l'état construit. Si le nom possédé prend un adjectif ou plusieurs, on ne le met pas à l'état construit, à la place on place la préposition er avant le possesseur. Par exemple, "les yeux bleus du chat" se dit lifo zan er erma (yeux bleus du chat). Là où on utiliserait un pronom possessif en français, on met à l'état construit et on ajoute un des suffixes possessifs suivants en forbekien: Possesseur | Suffixe | Mon/mes | -a | Ton/tes | -o | Son/ses | -i | Notre/nos | -ai | Votre/vos | -en | Leur/leurs | -ü | Réfléchi | -so | Réciproque | -un |
Par exemple, "mon œil" se dit lifara (œil-mon), "mes yeux" lifora (yeux-mon), "ton œil" lifaro (œil-ton), etc... le réfléchi et le réciproque servent à clarifier certaines ambiguïtés, par exemple "il a vu son chat" se dit subeni ermarso (a-vu-il chat-son-propre) quand on parle du chat du sujet, mais subeni ermari (a-vu-il chat-son) quand on parle de celui de quelqu'un d'autre.
Dernière édition par Wojnicz le Sam 13 Juin 2020 - 22:53, édité 1 fois | |
| | | Anoev Modérateur
Messages : 37621 Date d'inscription : 16/10/2008 Localisation : Île-de-France
| Sujet: Re: Expression de la possession Ven 12 Juin 2020 - 23:27 | |
| En aneuvien, la possession, quelle soit inaliénable (ses bras) ou non (ses jouets) est représenté par les adjectifs et pronoms possessifs, lesquels sont des emprunts de langues romanes ou de l'espéranto, et on note : Les adjectifs ne sont variables qu'à la personne, par contre, les pronoms sont aussi variables en nombre et déclinables. En cas de risque d'ambigüité, ils peuvent être précédés d'un article défini : àt, àr. Sauf évidence, ces adjectifs et pronoms sont réfléchis : e gœnsa meże = j'ai pris les miens eg mega seże = j'ai emprunté les siens ka mega meże = elle a emprunté les miens. Là où c'est moins évident, c'est quand le personnel et le possessifs sont tous les deux à la troisième personne , on a là da wach sed xeliys* = he lavo sia vag = he washes his own car = il lave sa (propre) voiture da wach sed xeliys dan = he lavo hi vag = he washes his car = il lave sa voiture (d'un autre homme, évoqué antérieurement) da wach sed xeliys dan = he lavo hi vag = he washes her car = il lave sa voiture (à elle). Tout ce qui ne relève pas d'une possession relève de l'adjectif et du pronom personnel indirect ed (j'ai dû l'évoquer je m'rappelle plus où y a pas longtemps) : eg musa ed strægens = j'ai raté mon train ed erkàpdak ruva kas = son patron l'a appelée da smlàk ed brikaż = il embrasse sa fiancée ep or raxa ed taψ? = Avez-vous réservé votre place ? Comme rien ne rappelle la personne, ce déterminant (ou pronom) est toujours réfléchi s'il n'y a pas de pronom au génitif derrière, ainsi : ed erkàpdak en ruva kas = mon patron l'a appelée da smlàk ed loenerkaż en = il embrasse ma petite-fille. Ce système, certes plus "perfectionné" que celui de la langue française, a, je reconnais, des limites, ainsi : Da vedja das kœm eże =Il l'a vu avec les siens Il l'a vu avec les siennes. Si c'est réfléchi à das, y a aucun moyen de savoir si c'est "les siens" ou "les siennes". En aneuvien, la famille n'est pas une possession inaliénable, ce n'est pas une possession, du tout : K Martin ea ed neràpdur = Mme Martin et ses enfants. Med & ted peuvent être utilisés pour l'affection, nod à la rigueur, jamais la troisième personne ni le vouvoiement ( ved) ni la deuxième personne du pluriel. * Mais on dit da wach ed xeliys s'il s'agit d'une voiture mise à sa disposition. "On" dit également ed vlàt ep med demad = mon appartement (j'en suis locataire), c'est mon chez-moi._________________ - Pœr æse qua stane:
Pour ceux qui restent.
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