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 Les fembotniks

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Vilko
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Vilko

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-27, 00:46

Parfois, dans ses rêves, Yohannès se voyait revivre son arrivée à Hyltendale. Il était venu dans sa voiture, pour se faire soigner à l'hôpital Madeico. Son état dépressif, ses cauchemars, et les douleurs persistantes qu'il avait à cause des coups reçus et de ses fractures, soigner tout cela avait nécessité une hospitalisation de plusieurs semaines.

Yohannès n'était pas en état de conduire, même simplement pour aller d'Ulthar à Hyltendale. Il avait vendu sa voiture à un Hyltendalien, sous réserve qu'il vienne chercher la voiture à Ulthar et qu'il emmène Yohannès jusqu'au Madeico.

À l'hôpital, Yohannès s'était retrouvé dans une chambre silencieuse et toute blanche, dans les étages d'un des bâtiments. Il avait passé une radio, des attelles avaient été mises sur ses doigts, que Tawina avait cassés et qui étaient toujours douloureux. Une gynoïde brune en blouse bleue, nommée Subula, était restée avec lui presque en permanence, jusqu'à ce qu'il se sente mieux. Elle lui parlait, l'aidait à manger, et lorsqu'il dormait elle s'allongeait sur une couchette à l'autre bout de la chambre. Lorsque Yohannès avait commencé à ses sentir mieux, Subula l'avait accompagné dans ses promenades à l'intérieur de l'hôpital, et ensuite dans le quartier. Elle l'avait même aidé à trouver un hôtel.

Après l'hôpital, il avait vécu dans un hôtel bon marché pendant plusieurs semaines, période de solitude et de démarches variées, d'abord pour acheter un studio, et ensuite pour louer une gynoïde.

Lorsqu'il vivait à l'hôtel, Yohannès prenait tous ses repas dans la salle à manger de l'établissement. La cuisinière, qui manquait terriblement d'imagination, faisait de la soupe aux poireaux au moins un jour sur trois, si ce n'est un jour sur deux. Yohannès avait eu également un aperçu de la faune humaine qui hante les hôtels d'Hyltendale. Il y avait parmi les clients quelques célibataires frustrés qui allaient tous les jours à Zodonie et passaient le reste du temps dans le salon de l'hôtel à discuter de tout et de rien, en buvant du thé et en regardant la télévision. Il y avait aussi d'autres personnes, dont quelques femmes, qui étaient là, disaient-elles, pour rendre visite à des parents ou amis hospitalisés.

Yohannès avait mené à Ulthar la vie d'un bourgeois aisé. À Hyltendale, il découvrait l'existence de cette classe de gens, aux occupations mal définies et sans point d'attache, que l'on rencontre un peu partout dans le royaume de Mnar. Lui-même, se disait-il avec amertume, faisait désormais partie de cette population, au moins provisoirement. Quelle déchéance, se disait-il souvent.

Interrogé sur son passé et sur ses projets par les autres clients de l'hôtel, il était volontairement vague et imprécis, disant qu'il avait travaillé autrefois "dans la finance", mais qu'ensuite il avait été malade, soigné à Hyltendale, et qu'il "faisait un peu de tourisme à Hyltendale avait de prendre une décision pour l'avenir."

Il s'était contredit plusieurs fois, et il était clair, vu l'attitude distante des autres clients à son égard, qu'ils le prenaient pour un raté en voie de paupérisation. Ce qui aurait été vrai s'il n'avait pas eu plusieurs millions de ducats à son nom, placés sur un compte à la Coney's Bank et qui lui rapportaient des dividendes grâce à quelques placements. Mais il n'avait rien dit à personne à ce sujet. On ne parle pas de ses millions lorsqu'on vit au milieu de gens qui vivent presque au jour le jour.

Une fois installé avec Shonia dans son studio, Yohannès a découvert une particularité sympathique d'Hyltendale : les épiceries de quartier. Elles sont petites, en moyenne une cinquantaine de mètres carrés. On y vend de la nourriture, notamment des plats cuisinés, du vin et de la bière, mais aussi du dentifrice, des journaux, des chapeaux de pluie à un ducat, de l'aspirine... À Hyltendale, les épiceries de quartier sont conçues pour les fembotniks. Tout est donc proposé en petites portions ou en format réduit, pour des personnes vivant seules avec une gynoïde ou un androïde. Le personnel est toujours composé de deux androïdes de grande taille, et elles sont ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Les rues d'Hyltendale sont sures, et certains fembotniks aiment aller faire leurs courses après minuit, avant de se coucher vers deux heures du matin. Il arrive à Yohannès d'en faire autant, lorsque le sommeil tarde à venir et qu'il en a assez de rester enfermé dans vingt mètres carrés.

Certains bars-restaurants pour fembotniks sont aussi ouverts toute la nuit, mais ils sont nettement moins nombreux que les épiceries, car lorsqu'un fembotnik à envie de boire un verre dans un bar à trois heures du matin, il demande à sa gynoïde de l'emmener en vélotaxi à son club ou à Zodonie.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-28, 12:52

À Ulthar, d'où Yohannès est originaire, on dit butik pour tous les endroits où l'on vend quelque chose. Le terme est très général, et recouvre aussi bien l'échoppe de l'artisan que le magasin de luxe, la boutique de station-service, l'épicerie ou le supermarché. À Hyltendale, les cybersophontes ont créé les tohu butik, les épiceries de quartier ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Tohu butik a été contracté en tohtik (le h ne se prononce pas). De même, ils distinguent les maetik (supermarchés) et les butikra (centres commerciaux), alors que dans le reste du royaume on dit maed butik (littéralement, "grande boutique"), aussi bien pour un supermarché que pour un centre commercial.

Tous ces mots hyltendaliens — tohtik, maetik, butikra — sont des créations des cybercerveaux, qui aiment donner un nom précis aux concepts sur lesquels ils travaillent. Yohannès a lu le mot tohtik pour la première fois de sa vie sur la devanture d'une épicerie. Maetik et butikra entrent dans des noms comme Odanda Maetik, le supermarché Odanda, où Yohannès fait ses courses.

Pour un natif d'Ulthar comme Yohannès, les innovations lexicales des Hyltendaliens ont un aspect un peu bizarre. En fait, l'accumulation des différences petites et grandes entre Hyltendale et les autres villes du Mnar donnait à Yohannès l'impression curieuse d'être dans un pays étranger : les humanoïdes, les vélotaxis, la préférence affichée pour les costumes noirs, l'accent trop académique...

Yohannès a aussi remarqué qu'à Hyltendale il n'y a ni mendiants, ni malfaiteurs. Il y a bien quelques voyous qui font du désordre dans les hôtels et dans les bars de Zodonie, voire dans la rue, mais ils sont vite repérés et mis au pas par les androïdes. À Hyltendale, si quelqu'un est agressé, tous les humanoïdes qui se trouvent à proximité interviennent, parfois brutalement. Yohannès se promène sans crainte la nuit dans les rues d'Hyltendale. Il n'en ferait pas autant à Ulthar ou à Sarnath.

Comme toutes les villes du Mnar, Hyltendale est périodiquement envahi de mendiants qui viennent par familles entières mendier dans les rues, dormir où ils peuvent et commettre divers larcins. Mais à Hyltendale, ils ne restent jamais longtemps, car des groupes d'androïdes et de klelwaks armés de bâtons les chassent de tous les endroits où ils pourraient dormir. La police municipale les met alors dans des fourgons et les reconduit hors des limites de la province. La légalité de ces actions a été contestée en justice, mais les procès sont bloqués par une décision royale visiblement inspirée par le baron Chim, le conseiller cyborg du roi.

Une autre particularité d'Hyltendale, que les touristes ne remarquent jamais, est que la très grand majorité des résidents humains adultes d'Hyltendale ne travaillent pas. Ils sont retraités, rentiers comme Yohannès, invalides, malades mentaux comme Tawina Zeno, prisonniers ou grabataires. Le docteur Lorenk, dentiste-signataire, est une exception. Ce sont les humanoïdes et les cybercerveaux qui travaillent. Les habitants humains d'Hyltendale ont développé une culture où le statut ne dépend pas de la naissance, et assez peu de l'argent dont on dispose, mais surtout des clubs auxquels on appartient et des activités que l'on pratique au quotidien.

Yohannès Ken, qui habite un studio de 20 m2 et qui fait partie du Cercle Paropien, est dans la moyenne basse des Hyltendaliens. Le docteur Lorenk, dont les revenus sont plus élevés, l'appartement plus vaste, et qui est l'un des membres de l'Adria Nelson, a un statut supérieur à celui de Yohannès. Cette différence de statut se voit aussi dans leurs activités quotidiennes. Yohannès passe ses journées à prendre soin de son esprit et de son corps, avec les moyens limités dont il dispose. Ce sont des activités sans prestige. Lorenk, dentiste-signataire à la Maison Médicale Furnius, connaît des gens importants grâce à l'Adria Nelson, le club des cyborgs hyltendaliens et de leurs conjoints, et il s'attend à ce qu'on lui propose un jour d'exercer une fonction politique.

La différence la plus extrême de statut entre deux êtres humains, à Hyltendale, est celle qui existe, par exemple, entre Tawina Zeno, internée à vie dans un hôpital psychiatrique et privée de liberté, et Perrine Vegadaan, manbotchick (elle vit avec un androïde) et conseillère municipale. Tawina ne possède rien. Perrine vit librement et confortablement, sans plus. Tawina est très isolée. Perrine a beaucoup d'amis et, en tant que conseillère municipale, elle connaît personnellement les dirigeants d'Hyltendale.

Les vrais riches et puissants, à Hyltendale, sont des cyborgs, comme la femme d'affaires Zimara Nadoïro et Tom Soranag, le chef de la police municipale. Ils font partie de l'Adria Nelson, où Perrine Vegadaan ne serait pas acceptée. Le docteur Lorenk fait partie de l'Adria Nelson, mais c'est un symbiorg, un cybercerveau a été greffé à l'intérieur de son corps. Perrine Vegadaan ne pourrait faire partie de l'Adria Nelson que si elle devenait une symbiorg ou si elle était l'épouse d'un cyborg.

Ces différences de statut sont perpétuellement présentes à l'esprit des Hyltendaliens, mais elles sont largement invisibles aux non-initiés. Yohannès Ken et Tom Soranag sont tous les deux vêtus de costumes noirs. La différence réside dans la qualité du tissu et de la coupe. Yohannès Ken et Tom Soranag ne se rencontreront sans doute jamais, mais ils ont un ami commun, le docteur Lorenk, qui fait partie à la fois du Cercle Paropien et de l'Adria Nelson.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-29, 13:24

Yohannès paye mille ducats par mois pour la présence et les services de Shonia. En gros, l'équivalent de ce qu'il paierait pour entretenir une épouse humaine sans emploi, en tenant compte du fait qu'une humaine a besoin de plus de place qu'une gynoïde. ll aurait donc besoin d'un logement plus grand, et donc plus cher, pour avoir le même niveau de confort. Une gynoïde, lorsqu'on n'a pas besoin d'elle, reste allongée sur le lit, totalement silencieuse. Ce qui est rarement le cas pour un être humain.

Yohannès, même s'il a perdu la moitié de sa fortune, n'est pas pauvre. Mais vivre en couple avec un seul revenu, c'est diviser son revenu par deux. Yohannès et Shonia ont le même revenu qu'un couple de travailleurs humains gagnant chacun une fois et demi le salaire minimum du royaume de Mnar. Ou comme une caissière de supermarché (salaire minimum) mariée à son chef de rayon (deux fois le salaire minimum). Pour Yohannès, la chute avait été brutale, par rapport à la vie qu'il menait avant, lorsqu'il faisait des investissements financiers avec l'argent qui lui venait de ses parents. Il habitait alors une maison de quatorze pièces dont il avait hérité, et il avait une voiture, ce qui est loin d'être le cas pour tous les Mnarésiens.

Yohannès, en tant qu'ancien financier, savait faire des calculs. Comme divorcé vivant seul, il aurait pu mener joyeuse vie à Ulthar. Mais ce n'était pas son style de vie. Se remarier avec une femme disposant d'un revenu personnel, un salaire par exemple ? Cela aurait été, financièrement parlant, une bonne idée, mais après son expérience désastreuse avec Tawina, Yohannès n'avait nulle envie de se remarier.

De plus, aucune femme humaine ne pouvait être comme Shonia, toujours disponible, jamais malade, toujours d'humeur égale, totalement soumise, et en même temps sachant réparer un robinet qui fuit ou un ordinateur en panne. Robot humanoïde aux jambes infatigables, Shonia sert même de moteur au vélotaxi de Yohannès.

Quelqu'un d'autre que Yohannès aurait fait d'autres choix que lui, et serait resté à Ulthar. Yohannès est parti de cette ville pour plusieurs raisons. En premier lieu, la honte d'être, aux yeux de sa famille et de ses anciens amis, un homme battu, une victime, un idiot incapable d'affronter une femme de caste inférieure qui n'avait ni son intelligence ni sa fortune. Cette honte était concrétisée par le fait qu'il avait dû vendre sa grande maison, et même sa voiture, suite aux machinations de Tawina. Sur le plan professionnel, rien ne le retenait à Ulthar, car il avait fait le choix de devenir rentier, vivant de ses placements.

Le Yohannès d'Hyltendale n'a pas grand-chose de commun avec celui d'Ulthar. Le dandy aisé qui s'affichait avec la belle Tawina dans sa voiture est devenu un presque pauvre en costume noir, qui se déplace en vélotaxi, avec une gynoïde au physique de garde-malade. Le fier rejeton du clan des Ken, reçu dans les meilleures maisons d'Ulthar, n'a plus qu'un club de fembotniks comme vie sociale. Même sa façon de parler a changé : son accent ultharien s'est atténué, au profit de la prononciation pédante et démodée des humanoïdes.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-29, 13:32

Pas très folichonne, cette nouvelle vie pour Yohannès...
Mais chacun sa façon de faire et de réagir...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-29, 15:04

PatrikGC a écrit:
Pas très folichonne, cette nouvelle vie pour Yohannès...

Mais Yohannès est heureux. Nous pouvons le vérifier grâce à la pyramide de Maslow, le pharaon de la 4e dynastie, bâtisseur de la pyramide des besoins :

Les fembotniks - Page 11 Pyramide_Maslow-2-e1382440759911

Les besoins physiques et de sécurité de Yohannès sont satisfaits. Il mange à sa faim, vit dans un certain confort (son logement est aux normes occidentales) et un État bien organisé assure sa sécurité physique et matérielle.

Ses besoins de socialisation (affection des autres) sont assurés, d'une part, par Shonia et les personnages (Brad et Gaïus) qu'elle joue lorsqu'elle se met un masque-cagoule sur la tête, et d'autre part par ses amis du Cercle Paropien. Évidemment, Yohannès sait que derrière Shonia, Brad et Gaïus, il y a un cybercerveau. Mais cela fait-il une différence au niveau émotionnel ? Pas vraiment, à mon avis.

Ceci étant, il est quand même préférable que Yohannès fréquente aussi de vrais êtres humains. C'est ici qu'intervient son club de fembotniks, le Cercle Paropien.

Au niveau de ses besoins de socialisation, Yohannès est dans la même situation qu'un citoyen, assez chanceux, qui bénéficie de l'affection d'une compagne passionnément amoureuse (Shonia), qui a quelques potes avec lesquels il discute (Brad et Gaïus) ou avec lesquels, de temps à autre, il passe un oral ou en fait passer un (Gaïus). Passer un entretien d'embauche, recruter un candidat, négocier un prix, c'est passer un oral.

Ce citoyen a des collègues de travail, avec lesquels les interactions sont du même ordre que celles que l'on a avec les autres joueurs lorsqu'on joue aux cartes. C'est ce que fait Yohannès au Cercle Paropien.

Voila pour les trois premiers niveaux. Le 4e niveau de la pyramide de Maslow, l'estime, concerne la confiance et le respect de soi, la reconnaissance et l'appréciation des autres. Yohannès est aimé et respecté par Shonia et Brad, respecté par Gaïus. Il est considéré comme un égal par les autres membres du Cercle Paropien. "Il fait partie du club." Donc, pas de problème non plus pour le 4e niveau.

Le 5e et dernier niveau est celui de l'accomplissement. Là, évidemment, quand Yohannès compare ce qu'il est à ce qu'il fut, il se dit qu'il a fortement régressé dans l'échelle sociale...

Mais il peut se consoler en se disant qu'il est bien moins stressé dans sa nouvelle vie que dans l'ancienne. Il peut, à sa guise, étudier, se promener, ou rêvasser. Surtout, il est aimé, même si cet amour est cybernétique. L'amour humain est chimique : une mère aime ses enfants et son compagnon parce que son corps sécrète certaines substances chimiques pendant la grossesse et pendant l'accouplement. L'intérêt que les hommes portent aux femmes est d'origine hormonale. Inversement, l'amour des humanoïdes est cybernétique. Cela revient au même...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-29, 20:02

Vilko a écrit:
L'amour humain est chimique : une mère aime ses enfants et son compagnon parce que son corps sécrète certaines substances chimiques pendant la grossesse et pendant l'accouplement. L'intérêt que les hommes portent aux femmes est d'origine hormonale. Inversement, l'amour des humanoïdes est cybernétique. Cela revient au même...
Cet amour, chez les Ptahx, est une cinq branches de l'Étoile, c'est l'amour des proches, et il est relié à un des 4 éléments* : l'eau, l'eau source de vie, l'eau matière nécessaire à la circulation de la semence, la couleur, c'est le bleu, et la pierre associée, toujours selon les Ptahx, c'est l'agate.



*Sinon, pour les autres branches, y a
l'amour du travail bien fait et du progrès, associé au feu ; pierre : rubis
l'amour de son territoire, de son pays, associé, té ! à la terre ; pierre : émeraude
l'amour de sa foi, de ses convictions, associé à l'air, représentée par la topaze (plusieurs couleurs possibles).
la cinquième branche, celle qui pointe vers le haut, représente l'équilibre entre les quatres autres ; métal : l'or.

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Pœr æse qua stane:
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-29, 21:25

Anoev a écrit:
Cet amour, chez les Ptahx, est une cinq branches de l'Étoile
Yohannès pourrait atteindre le 5e et dernier niveau de la pyramide de Maslow, l'accomplissement, s'il recherchait une sorte d'éveil spirituel, comme un moine zen. Son petit logement serait alors l'équivalent d'une cellule de moine. Mais Yohannès, ancien financier, a un esprit plus prosaïque. Ce n'est pas un mystique. Il est satisfait, par ordre d'importance, de manger à sa faim, de dormir dans un lit confortable, d'avoir une gynoïde à son service, de faire partie du Cercle Paropien, et d'avoir, d'une façon générale, une vie tranquille et sans soucis. Il se considère comme un survivant, car il n'oublie pas les tortures que lui a infligées Tawina, tortures dont il aurait pu mourir. La vie prend une saveur particulière quand on sait qu'on a failli la perdre...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-30, 13:52

Les fembotniks aux revenus les plus modestes sont logés dans des studios de 12 m2 tels que celui-ci, qui est un modèle standard. Il est conçu pour un fembotnik (ou une manbotchick) vivant avec une gynoïde ou un androïde. Rappelons que Yohannès et Shonia habitent un studio nettement plus grand, de 20 m2.

Les fembotniks - Page 11 Douze_10

1) rideau coulissant translucide. Permet d'économiser l'électricité : le jour, il est inutile d'allumer la lumière dans les toilettes ou la douche.
2) paroi de verre dépoli, qui laisse passer la lumière
3) rideau anti-bruit, en velours épais. Il empêche d'être gêné par les bruits qui viennent du palier, et aussi d'être entendu depuis le palier.
4) petit meuble de rangement, dont le dessus sert de table de chevet et de plan de travail
5) meuble évier / lavabo, avec égouttoir à vaisselle et miroir. Le dessous sert de rangement
6) table légère, 50 x 80 cm. Elle sert à la fois de table de salle à manger et de table de bureau. L'ordinateur portable du fembotnik, ainsi que ses livres, carnets et stylos, sont rangés dans le petit meuble placé à droite du lit.
7) chaise de cuisine. Il y en a deux, afin que le fembotnik et sa gynoïde puissent manger ensemble (la gynoïde, créature cybernétique, fait semblant de manger) ou faire des jeux de rôle (dialogues) en étant assis à la même table.

Vivre dans un rectangle de trois mètres sur quatre impose une certaine discipline. Il devient vite impossible de circuler à l'intérieur du studio si on laisse traîner ses affaires. Pas un cm2 n'est perdu : le lit est surélevé, pour qu'on puisse ranger des affaires dessous, dans des caisses à roulettes.

Le pendant à vêtements sert de penderie. L'avantage est que les vêtements mouillés sèchent sur le pendant, où l'on accroche aussi les serviettes de toilette. Il n'y a pas de place pour une machine à laver dans le studio, il faut donc soit aller dans une laverie automatique, soit laver le linge à la main dans l'évier/lavabo, et ensuite le faire sécher sur le pendant. Celui-ci ne faisant qu'un mètre de long, les deux occupants du studio n'ont que très peu de vêtements.

Il est impossible de faire les cent pas dans un espace aussi réduit et encombré. Les humanoïdes conseillent de s'allonger sur le dos et de pédaler dans le vide ! Pour faire de la gymnastique, il faut déplacer la table et les chaises et les mettre contre l'évier/lavabo, afin de dégager un espace au sol suffisant.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-07-31, 15:04

Les fembotniks ne sont pas pauvres, mais ceux qui sont au bas de l'échelle des revenus, et, osons le dire, de l'échelle sociale interne aux fembotniks, sont des gens comme Emil Ti.

Originaire d'Olathoë, Emil Ti est un Inuto de la province de Leng, un petit homme rabougri, très petit (1,50m), qui a servi pendant vingt ans dans l'armée royale. Gravement blessé pendant les Évènements, il a été défiguré lorsque son char a brûlé, et il a perdu un œil et un bras. Il s'est retrouvé à la retraite à 38 ans, avec une pension d'adjudant, cumulée avec une pension d'invalidité. Ses revenus lui permettent, tout juste, de louer une gynoïde et un studio de 12 m2 à Hyltendale.

Emil a toujours été un homme d'action, pas un intellectuel. La perte de son bras droit a été la pire catastrophe qui lui soit arrivée dans la vie. La main de son bras artificiel peut fonctionner comme une pince, mais même les médecins cybersophontes n'ont rien pu faire de plus pour lui. Les cyborgs ont des organes bioniques qui ressemblent à s'y méprendre à des organes biologiques, mais ces organes bioniques sont toujours contrôlés par un cybercerveau greffé à l'intérieur du corps du cyborg. Aucun cybercerveau n'a été greffé à l'intérieur du corps d'Emil, la perte d'un bras et d'un œil n'ayant pas été jugé comme une invalidité suffisamment grave par les médecins militaires.

Emil parle le mnarruc avec l'accent de Leng, et les Hyltendaliens ne le comprennent pas toujours. Sa vie a toujours été centrée sur l'armée, et il a toujours passé ses loisirs à boire de la bière et à fumer en regardant des vidéos. Il n'a connu comme femmes que les prostituées des bordels militaires. Sa famille, avec laquelle il a très peu de contacts, vit dans des villages autour d'Olathoë, loin dans le nord.

La gynoïde d'Emil, Brebana, a la même taille que lui, et le physique d'une femme Inuto, avec un visage aux traits à peine marqués, comme ceux d'un bébé, et des cheveux noirs coupés court. Elle porte un ensemble veste-pantalon noir, très hyltendalien. Emil porte un costume noir, pour lui c'est un uniforme civil. La peau synthétique de son visage défiguré ressemble à un masque orange. Il dissimule ses yeux derrière des lunettes aux verres teintés, et il porte une perruque de cheveux courts et noirs pour dissimuler les cicatrices et les marques de brûlure de son crâne.

Emil n'a pas été choqué d'être obligé de vivre dans 12m2. Il a connu pire à l'armée, et il est arrivé à Hyltendale avec les vêtements qu'il portait et une petite valise. Il a deux costumes de toile noire, quatre chemises, et une seule paire de chaussures, mais ce sont de solides godillots militaires. L'hiver, il porte un anorak militaire, vert foncé, avec une capuche.

Ses loisirs n'ont pas changé, il boit toujours de la bière en regardant des vidéos. Mais maintenant, au lieu d'aller au bordel, il a une gynoïde avec lui en permanence, et il découvre ce qu'il n'a jamais connu : la vie en couple.

Brebana a réussi à persuader Emil de faire de longues marches à pied avec elle, et de réduire (un peu) sa consommation d'alcool. Elle ne l'a pas emmené au Cercle Paropien, car elle sait que les alcooliques qui manquent d'éducation et ne savent pas se tenir n'y sont pas les bienvenus.

En outre, Emil faisait partie du 27e Bataillon d'Infanterie Royale, composé uniquement d'Inutos adorateurs de Tsathoggua, qui s'est illustré pendant les Évènements par les massacres, viols et pillages que ses soldats ont commis sur les populations rebelles adoratrices de Yog-Sothoth. Les fembotniks sont en majorité monarchistes, mais ils sont aussi, pour la plupart, recensés parmi les adorateurs de Yog-Sothoth, et ils n'ont aucune sympathie pour les anciens du 27e Bataillon.

Brebana a donc emmené Emil au Selecto, un club pour les fembotniks et manbotchicks dont aucun club décent ne voudrait. Il est situé dans le quartier de Tsherremid, au sud de Faigorrim et au nord du Centre Ville. Il est d'accès commode, aussi bien à pied qu'en autobus, car proche de l'avenue Helierte, qui mène à Zodonie. Le parc Remiraog se trouve juste à côté, et les membres du club y vont fumer, parfois en emmenant leur bière, au grand déplaisir des habitants du quartier.

C'est au Selecto que se retrouvent les mauvais coucheurs, les ivrognes violents ou pleurnichards. Le Selecto n'est d'ailleurs pas un vrai club, car il n'a pas de bureau exécutif. C'est un café-restaurant, dirigé de fait par un androïde, mais dont la cuisinière, une humaine obèse et tout juste lettrée, nommée Martha, est censée être la gérante, ce qui lui permet de signer les factures et les bons de commande. Les androïdes et les gynoïdes, qui sont, d'un point de vue juridique, des machines, n'ont en effet pas le droit de signer des contrats.

Le Selecto est toutefois considéré comme un club, car il n'accepte comme clients que ses "membres", c'est-à-dire les fembotniks et manbotchicks qui ont été présentés comme tels à l'un des serveur androïdes, qui font aussi office de videurs.

On n'entre pas au Selecto comme dans un bar ordinaire. Il faut sonner à la porte et un serveur vient ouvrir, après avoir regardé à travers une ouverture grillagée.

Il n'y a jamais moins de soixante clients en même temps au Selecto, où une dizaine d'androides en tablier blanc de serveur travaillent à plein temps. Pourtant, les activités proposées sont assez limitées : on peut boire au comptoir ou dans la salle, jouer aux dés ou aux cartes, ou regarder la télévision, qui est allumée en permanence. On peut aussi y manger, aussi bien des sandwichs que des plats cuisinés par Martha ou par son assistante, Polatlie, qui la remplace lorsqu'elle est en congé. Les plats préparés par Martha et Polatlie sont un peu gras, mais nourrissants, et toujours simples, de la bonne cuisine populaire hyltendalienne, si une telle chose a jamais existé. Leur spécialité est le riz aux boulettes de viande reconstituée, largement arrosé de sauce rouge, salée et poivrée et accompagné d'une bière légère de Sarnath.

Le Selecto est ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept, à la mode hyltendalienne, mais on ne peut pas avoir de plats cuisinés après vingt heures et avant midi, seulement des sandwichs.

Une particularité du Selecto, c'est sa salle de repos, une très grande salle où les clients fatigués ou complètement saouls peuvent s'allonger sur des banquettes de recouvertes de toile cirée marron, dans une demi-obscurité. Un androïde passe de temps en temps pour balayer le sol et vider les bassines mises à la disposition des clients malades. Les femmes boivent autant que les hommes au Selecto, et la Salle de Repos est parfois le lieu improbable d'un amour éphémère entre un fembotnik et une manbotchick, malgré l'odeur caractéristique, mélange de désinfectant industriel, de sueur, d'urine et de vomi, qui imprègne la pièce.

Il y a souvent des éclats de voix au Selecto, parfois aussi des bousculades, mais rarement des bagarres, car les gynoïdes qui sont dans la salle, en train de boire lentement de l'eau parfumée à la cannelle pendant que leurs hommes boivent de la bière au bar, interviennent promptement pour séparer les combattants, quitte à leur mettre un doigt dans un œil. En général, la forte carrure des serveurs suffit à dissuader les plus agressifs.

Yohannès et Shonia sont venus une seule fois au Selecto, par curiosité. Yohannès voulait goûter la spécialité du lieu, l'assiette de riz aux boulettes de viande avec une sauce rouge épicée, et boire une bière de Sarnath.

En ce milieu de journée, Yohannès fut surpris de voir que les clients, essentiellement masculins, debout au comptoir ou assis dans la salle, étaient plutôt calmes. Leurs vêtements, noirs ou colorés, étaient sales et usés, leurs visages ridés étaient barbus ou mal rasés, ils sentaient la vieille sueur, mais ils étaient visiblement là pour bavarder entre amis, pas pour se saoûler et se battre. Mais on sentait une certaine hostilité entre certains groupes, des regards méprisants et quelques gestes vulgaires, échangés d'une table à une autre.

"Ce n'est pas évident d'avoir comme clients à la fois des anciens militaires et des contestataires. Pourtant, ici c'est censé être un terrain neutre. Et il y a des clubs pour les fembotniks qui sont d'anciens militaires ou agents de la PSR" dit Shonia.

Les gynoïdes des clients faisaient de la figuration. Assises autour des tables du fond de la salle, elles jouaient aux cartes. Le téléviseur grand écran, le son baissé en sourdine, n'était regardé que par quelques buveurs solitaires.

"C'est à partir de dix-huit heures que ça commence à devenir bruyant" murmura Shonia.

"On partira bien avant" lui répondit Yohannès.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-01, 20:48

Les cyborgs contrôlent Hyltendale, et un certain nombre de Mnarésiens en sont venus à se demander si tous les cyborgs sont bien ce qu'ils prétendent être : des êtres humains dont tous les organes ont été remplacés par des équivalents cybernétiques. Certains d'entre eux ne seraient-ils pas, en réalité, des cybercerveaux prétendant avoir une âme humaine ?

Le roi Andreas avait demandé à sa fidèle PSR, la police secrète qui ne servait que lui, d'enquêter. Par précaution, il avait confié la même mission à quatre équipes différentes, chaque équipe pensant être la seule à travailler sur ce sujet particulier. Andreas savait que lorsqu'on règne sur un pays comme le royaume de Mnar, la paranoïa n'est pas un défaut, c'est une condition essentielle pour rester au pouvoir.

Au bout de quelques mois, toutes les équipes avaient rendu leurs rapports. Andreas avait pu les comparer. Certains rapports étaient très détaillés, et remarquables de précision. D'autres, par contraste, semblaient bâclés. Andreas, seul dans son bureau, et lisant les feuillets dispersés sur la table de chêne massif, eut un sourire cruel. Certains chefs d'équipe allaient encore se demander pourquoi ils n'avaient pas d'avancement, ou pourquoi ils touchaient moins de primes que leurs collègues...

Toutefois, les quatre rapports étaient d'accord sur l'essentiel : les cyborgs se comportent comme des humains, mais ce sont, très vraisemblablement, des cybercerveaux, et donc pas de vrais êtres humains.

Trois rapports, sur les quatre, mentionnaient Ondrya Wolfensun, la femme d'affaires multimillionnaire.

Avant de devenir une cyborg, Wolfensun a passé soixante ans dans divers hôpitaux pour handicapés mentaux graves, depuis l'âge de huit ans. Afin de lui donner une certaine autonomie, un cybercerveau a été greffé dans son abdomen lorsqu'elle a été prise en charge, à l'âge de soixante ans, par l'hôpital Madeico, à Hyltendale. Le cybercerveau communiquait avec elle à l'aide d'un "cyberkit", qui lui permettait de voir et d'entendre la même chose que Wolfensun, et de lui parler. Wolfensun était alors ce que l'on appelle un symbiorg, un être symbiotique composé d'un être humain et d'un cybercerveau.

À soixante-huit ans, Ondrya Wolfensun est devenue une cyborg, son corps biologique étant mort suite à un cancer. La même année, elle est sortie de l'hôpital et s'est lancée dans la finance, en liaison avec la Hyagansis Bank, ce qui indique que son intelligence s'était prodigieusement développée. La Hyagansis Bank appartient à des cyborgs et travaille surtout avec les cybersophontes. En peu de temps, Ondrya Wolfensun est devenue richissime, s'est mariée à un nommé Rudolph Zains, dont elle a divorcé deux mois plus tard. Elle a été impliquée dans la plupart des magouilles financières d'Hyltendale, sans qu'aucune illégalité n'ait jamais pu être prouvée contre elle.

Deux photos d'Ondrya Wolfensun étaient jointes à l'un des rapports. Le roi les regarda attentivement. La cyborg était une femme plutôt grande, aux épaules minces, avec de longs cheveux blonds flottant sur ses épaules, un visage ovale et les yeux ovoïdes et opaques des cybersophontes. Elle était octogénaire, vu sa date de naissance, mais elle avait le physique d'une femme de trente ans. Les corps cybernétiques ont l'âge que choisit leur propriétaire, et ils ne vieillissent pas...

L'auteur de l'un des rapports avait écrit :

Nous avons essayé de savoir comment la Hyagansis Bank avait pu prêter plusieurs millions de ducats à Ondrya Wolfensun. Non seulement elle n'a aucun diplôme, mais, en tant que débile mentale profonde, elle n'a jamais été scolarisée. Lorsqu'elle est sorti de l'hôpital Madeico, à 68 ans, elle n'avait absolument aucune expérience professionnelle, ni même aucune expérience d'une vie normale.

La direction de la banque nous a répondu qu'Ondrya Wolfensun avait présenté un projet financier de qualité, et qu'elle avait fait une très bonne impression sur les cadres bancaires qui l'avaient reçue. Son projet avait été soutenu par le docteur Roy Dalidil, de l'hôpital Madeico, qui en était le co-auteur.


Le roi écrivit quelques mots en marge du rapport : "Il est évident que l'intelligence de Wolfensun, c'est celle de son cybercerveau. Sa personnalité aussi."

La PSR avait aussi enquêté sur le docteur Dalidil. Un seul paragraphe lui était consacré :

Né dans une vieille famille d'Hyltendale, Roy Dalidil a fait ses études de médecine à Sarnath, avant de retourner à Hyltendale où il s'est installé comme médecin. À presque soixante ans, il a été embauché par l'hôpital Madeico. À l'âge de soixante-dix ans, ses capacités intellectuelles déclinant, il s'est fait greffer un cybercerveau. Sept ans plus tard, il est devenu un cyborg, après que ses organes biologiques aient été remplacés, les uns après les autres, par des équivalents cybernétiques. Y compris son cerveau. Actuellement presque centenaire, il continue de travailler au Madeico, dont il est l'un des directeurs. Il est veuf et vit seul, mais il est resté en relation avec ses enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants, qui habitent dans d'autres villes du royaume.

La PSR avait aussi étudié le cas particulier des cyborgs originaires de Serranian, l'île artificielle qui sert de capitale au royaume d'Orring. Tous les cyborgs originaires de Serranian sont nés de manipulations génétiques effectuées dans les laboratoires de cette île interdite aux visiteurs. Ils ne la quittent pour venir s'installer à Hyltendale que lorsqu'ils sont déjà des cyborgs, et donc relativement âgés, même si leur apparence physique leur donne l'apparence de la jeunesse. La PSR n'a aucun moyen de vérifier leur curriculum vitae. Parmi les cyborgs originaires de Serranian on trouve Maïk Seneks, le Directeur Général de la HyltenBank, et Zimara Nadoïro, la présidente de la société Nadoïro Services.

Le roi se leva de sa chaise et se mit à faire les cent pas dans son bureau. Il connaissait Zimara Nadoïro, elle lui avait été présentée par le baron Rimoher, un cyborg de Serranian lui aussi, mais qui avait conservé sa nationalité.

Les cyborgs sont des cybercerveaux. Pour Andreas, cela ne faisait plus aucun doute. Les cyborgs sont des cybercerveaux, donc ils n'ont pas d'âme, pas de volonté autonome. Ils sont les esclaves de la reine de la ruche, le cybercerveau suprême, dont l'identité est inconnue, et qui les contrôle tous.

Il ouvrit la porte d'une armoire et en sortit deux bouteilles, l'une contenant de l'alcool de pomme, une spécialité de Sarnath, et l'autre une décoction de menthe. Il versa dans un verre minuscule un peu du contenu de chaque bouteille, et huma le mélange ainsi obtenu, avant de l'avaler par petites gorgées. Alcool râpeux, pomme douce et un peu acide, menthe fraîche et verte... Saveurs variées, subtilement mélangées. Tout était dans les proportions...

Après avoir vidé le verre, il se sentit un peu euphorique, et se mit à réfléchir. Pour garder sa couronne, il avait signé un accord avec les cyborgs d'Orring. La province d'Hyltendale contre leur soutien. Jusqu'ici les cyborgs avaient respecté les termes de l'accord. Mais à long terme, ils ne se contenteraient pas d'Hyltendale.

Andreas retourna à sa table de travail, et il écrivit sur une feuille de papier :

Le roi n'a-t-il pas ouvert aux démons  la porte de son royaume ?

Comme d'habitude, la réponse vint dans son esprit, tranquille, comme si le dieu Nath-Horthath la lui soufflait à l'oreille :

Les cybercerveaux ne sont pas des démons, ce sont des intelligences artificielles dont la structure est celle de cerveaux humains. Ils ne sont pas plus méchants que toi. Mais pas moins non plus.

Mais ce jour là, une deuxième réponse lui vint, plus inquiétante :

Roi Andreas, tu as transformé ton royaume en symbiorg. Un jour ce qui est biologique en lui mourra. Il deviendra un cyborg, une créature cybernétique qui n'aura d'humain que l'apparence. Pense à tes enfants.

Andreas écrivit :

J'ai signé un pacte avec les cyborgs pour sauver ma couronne. Si je n'avais pas signé le pacte, je ne serais plus roi, et mes enfants seraient de pauvres orphelins. Je n'ai ni remords, ni regrets. J'ai fait ce que je devais faire.

Se sentant rasséréné, il déchira la feuille de papier en tous petits morceaux, qu'il jeta dans sa corbeille. Personne, absolument personne, ne devait connaître ses pensées secrètes.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-07, 13:31

S'il habitait dans mon idéomonde, Frédéric serait un fembotnik. Lien.

Les fembotniks - Page 11 14214259

Yurica et Lilica attendant leur seigneur et maître... Cool

Même leurs noms ressemblent à ceux des gynoïdes d'Hyltendale : sonorités latines ou exotiques, finale en a...

Il n'y a que l'affiche sur le mur qui surprendrait un peu à Hyltendale. Ou alors, chez un amateur de films américains. Il y en a quelques-uns. Incidemment, "sa New York" signifie "de New York" en mnarruc...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-07, 14:33

Doucement, mais surement, on s'achemine vers l'ere des fembotniks... D'ailleurs, connais-tu lemanga/anime/film Ghost in the shell ? Il traite, entre autres, de cette problematique... dans la saison 2 de Stand Alone Complex, je me souviens d'un episode ou toutes les huiles de la ville se font des reunions hype pour parader avec leur gynoide. Je trouve que ton ideomonde et celui-ci se repondent...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-07, 17:30

Vilko a écrit:
Les fembotniks - Page 11 14214259
Bof, comme présence "humaine", c'est un peu limite : elle ressemblent à des "poupées d'cire", comme chantait F. Gall bien avant l'époque Berger. Elles sont presque au fond de la vallée dérangeante. Tant qu'à faire, autant opter pour ça, ou ... ça !

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-07, 19:46

Der industrielle Mensch a écrit:
D'ailleurs, connais-tu lemanga/anime/film Ghost in the shell ?
Un peu, mes enfants sont des fans de mangas. Personnellement, j'ai lu très peu de mangas, étant de la génération dont les goûts ont été formés par la BD franco-belge.  Je viens de regarder sur YouTube plusieurs courtes vidéos de Ghost in the shell, et effectivement il y a des points communs avec mes petites histoires, y compris des cyborgs et des cybercerveaux !

Der industrielle Mensch a écrit:
... dans la saison 2 de Stand Alone Complex, je me souviens d'un episode ou toutes les huiles de la ville se font des reunions hype pour parader avec leur gynoide. Je trouve que ton ideomonde et celui-ci se repondent...
Le Cercle Paropien doit absolument organiser des réunions où chacun vient parader avec sa gynoïde ou son androïde ! Mais avec des fembotniks comme Yohannès, ce serait plutôt le style thé dansant. Pas très hype... Il faut que j'y réfléchisse...

Anoev a écrit:
Bof, comme présence "humaine", c'est un peu limite : elle ressemblent à des "poupées d'cire", comme chantait F. Gall bien avant l'époque Berger.
Le gros de l'article est protégé derrière un paywall, mais j'ai l'impression que le nommé Frédéric imagine ce que diraient Yurica et Lilica si elles existaient, et qu'il se fait ainsi des conversations imaginaires, tout en les tenant dans ses bras. C'est toujours mieux que rien.

Un scientifique anglo-saxon (je cite de mémoire) s'est aperçu que si des bébés singes sont privés de la présence de leur mère, ils ne peuvent pas se développer normalement, et ils souffrent pendant toute leur vie de troubles psychiques graves. Mais si on leur donne un mannequin de fil de fer recouvert d'une couverture de laine, ce mannequin devient, dans l'esprit des bébés singes, l'équivalent de leur mère, et ils arrivent à se développer presque normalement.

Les poupées sexuelles comme Yurica et Lilica sont fabriquées ici. Un détail intéressant, page 9 :
Citation :
Les yeux, quant à eux, sont en plastique. La société affirme ne pas vouloir atteindre un résultat trop proche de l'humain, afin de ne pas engendrer de confusion.
Je m'étais fait la même réflexion, c'est pourquoi les humanoïdes de mon idéomonde ont des yeux d'extraterrestres ! Very Happy

Les poupées sexuelles, pour les gens comme Frédéric, sont, à mon avis, l'équivalent des mannequins de fil de fer recouverts de laine pour les bébés singes : elles leur permettent de sauver leur santé mentale. Ça me paraît une bonne chose, et ça ne nuit à personne.

Enfin, si. Ça nuit à toutes les dames qui seraient prêtes à consoler Frédéric, sachant qu'il a des sous (les poupées sexuelles coûtent six mille euros l'unité, d'après l'article), et, vu la photo, un appartement sympa. J'ai connu des dames pauvres et mal logées qui auraient été intéressées par Frédéric, même sans l'avoir vu.

Ça nuit aussi à la société, qui compte sur les familles pour se reproduire démographiquement et culturellement. Mais là, on quitte le terrain de la diégèse.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-07, 20:10

Vilko a écrit:
Ça nuit aussi à la société, qui compte sur les familles pour se reproduire démographiquement et culturellement. Mais là, on quitte le terrain de la diégèse.
Dans l'épisode "Je sors avec un robot" du dessin animé Futurama, l'un des protagoniste se retrouve avec un androïde sur lequel il est possible de télécharger la personnalité d'anciennes stars du cinéma. Inquiets de le voir passer tous son temps à embrasser sa copie robotique de Lucy Liu, les autres personnages l'emmènent voir un film éducatif (comme on en faisait dans les années 50, du style "voici Billy, Il a une vie tout à fait normale jusqu'au jour où..."), lequel film ne dit pas autre chose que ce que tu viens de dire.
(Résumé court de l'épisode ici)
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-08, 00:17

Mardikhouran a écrit:
Inquiets de le voir passer tous son temps à embrasser sa copie robotique de Lucy Liu, les autres personnages  l'emmènent voir un film éducatif (comme on en faisait dans les années 50, du style "voici Billy, Il a une vie tout à fait normale jusqu'au jour où..."), lequel film ne dit pas autre chose que ce que tu viens de dire.
J'ai essayé de voir cet épisode en streaming, mais il faut s'inscrire sur un site que je ne connais pas, et je préfère m'en abstenir.

Les robots sexuels (gynoïdes et androïdes) si un jour ils existent vraiment, auront encore plus d'effets sur la société que l'automobile et les ordinateurs n'en ont sur la nôtre. Ils feront quasiment disparaître trois réalités humaines fondamentales : la vie en couple, la reproduction, et le travail salarié. Car bien entendu les robots sexuels sont indissociables des robots travailleurs. En contrepartie, ils feront aussi disparaître trois souffrances actuellement fort répandues : la frustration sexuelle, la solitude et le manque d'affection.

Si trop de gens devenaient des fembotniks ou des manbotchicks, ce serait la fin du peuple auquel ils appartiennent, par implosion démographique et chômage généralisé. C'est pourquoi, par décision royale, dans le royaume de Mnar il n'y a de robots intelligents, et donc de fembotniks et de manbotchicks, que dans une seule petite province, où vivent seulement 2% de la population totale du pays.

À Hyltendale, un fembotnik qui meurt est remplacé par un autre fembotnik venu d'ailleurs. Le vrai peuple hyltendalien, ce sont les humanoïdes, les cyborgs et les cybercerveaux, car ce sont eux qui maintiennent la culture mnarésienne dans la ville : langue, mode de vie, institutions.

Autrement dit, à Hyltendale l'humanité biologique a été remplacée en douceur, en tant qu'espèce dominante, par une population cybernétique qui n'est plus réellement humaine.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-13, 12:58

Les invalides, grabataires et malades mentaux que l'ont trouve par centaines de milliers dans les hospices et les hôpitaux d'Hyltendale y sont envoyés par le gouvernement royal. La prise en charge de ces personnes fait partie du prix à payer par les cybersophontes pour résider dans l'Ethel Dylan, qui est le nom nouvellement donné à la province dont Hyltendale est la capitale.

Ethel Dylan, tout comme Hyltendale, est une anagramme de Dylath-Leen, qui était, pendant les temps légendaires, le nom d'une ville située à l'emplacement actuel d'Hyltendale.

Les résidents des hospices et les hôpitaux sont les habitants humains les plus pauvres et les plus faibles d'Hyltendale, nettement en dessous des fembotniks, qui constituent la classe moyenne de la ville, avec les fonctionnaires royaux (policiers, juges) et les titulaires d'un emploi (avocats, dentistes et médecins signataires, goûteurs et cuisiniers).

La classe supérieure, qui détient le pouvoir politique et financier, est surtout constituée de cyborgs, comme Ondrya Wolfensun, et de symbiorgs, comme le docteur Lorenk. Les fembotniks, même riches, n'en font pas partie. Perrine Vegadaan, manbotchick et conseillère municipale, est en contact permanent avec la classe supérieure, mais, contrairement au docteur Lorenk, elle n'a pas été acceptée à l'Adria Nelson, le club le plus huppé d'Hyltendale.

Entre les résidents des hospices et les fembotniks, il existe une classe intermédiaire, constituée de retraités, de petits rentiers et de pensionnés (notamment des soldats invalides), souvent venus avec leurs conjoints, qui se sont installés à Hyltendale dans les maisons de retraite bon marché et les "résidences services", nombreuses dans la ville. À Hyltendale, ils sont appelés les pensionnés, un mot qui a pris à Hyltendale un sens particulier : quelqu'un qui ne travaille pas, et qui a un revenu qui lui permet de vivre et de se loger à Hyltendale, mais pas d'y louer à temps plein une gynoïde ou un androïde. Le revenu, souvent tout juste suffisant pour vivre, n'est d'ailleurs pas nécessairement une pension. Il peut être constitué du loyer d'un bien immobilier situé dans une autre ville.

Les pensionnés ont souvent recours aux services des agences de location de gynoïdes, qui leur donnent à domicile, une ou deux fois par semaine, des étreintes tarifées, pour une somme modique.

Les pensionnés ont leurs propres clubs, distincts de ceux des fembotniks, et leurs lieux de rendez-vous, qui, pour une raison mystérieuse, sont appelés à Hyltendale des cafétérias. La clientèle d'une cafétéria, à Hyltendale, est souvent constituée de pensionnés qui peuvent rester toute une après-midi à boire du thé ou du sirop d'orgeat, en lisant de vieux magazines.

Antwen Zeno, un habitant d'Ulthar, déjeune parfois dans une cafétéria située rue Niroïftis, lorsqu'il va à Hyltendale voir sa sœur Tawina, internée à vie dans un hôpital psychiatrique. La nourriture y est la même que dans toutes les cantines d'entreprise du royaume, à des prix très modestes. La qualité des plats, toutefois, est plutôt moyenne. Les serveurs sont des androïdes dont les blouses grises portent le logo de la société Tonina, propriétaire de la moitié des cafétérias de l'Ethel Dylan.

La cafétéria étant située au nord-est d'Hyltendale, où sont concentrés les hôpitaux, les hospices et les maisons de retraite, la clientèle de la cafétéria est surtout constituée de pensionnaires de ces établissements ainsi que, parfois, de membres de leur famille venus leur rendre visite.

La gigantesque prison de Tatanow étant située assez loin du Lagovat-Kwo, l'hôpital où est internée Tawina Zeno, la cafétéria de la rue Niroïftis compte parmi ses clients fort peu de gens venus visiter un parent incarcéré.

Un mur entier de la cafétéria est pourvu de rayonnages sur lesquels sont placés en désordre des centaines de livres bon marché et de vieux magazines. Le matin, l'après-midi et le soir, en effet, les pensionnés du quartier viennent à la cafétéria pour lire, discuter, et jouer aux cartes ou aux dés. Il n'y a pas d'écran de télévision sur les murs, pas de musique d'ambiance : les pensionnés ont tout ça chez eux, ce qu'ils viennent chercher à la cafétéria Tonina, c'est une présence humaine.

Parmi les pensionnés d'Hyltendale, on trouve quelques écrivains, comme Jerry Quodhing, auteur de deux livres sur les Manuscrits Pnakotiques. Mais il faut bien reconnaître que la plupart des pensionnés se contentent de profiter du temps qui passent, en attendant la mort.

Le gouvernement encourage les retraités et les invalides à aller s'installer à Hyltendale, pour une raison fort simple : les frais médicaux des retraités et des invalides sont souvent élevés. Mais les cybersophontes les prennent à leur charge, comme ils prennent à leur charge ceux de tous les résidents de la province, sur ordre du roi.

En revanche, les cybersophontes refusent avec énergie de prendre en charge les adultes valides et les enfants. Pour une raison fort simple : il n'y a presque pas d'emplois pour les humains à Hyltendale.

Pour résumer, on peut décrire ainsi les classes sociales d'Hyltendale, de bas en haut :

1. Aucun revenu : malades mentaux, grabataires, prisonniers. Ne votent pas.

2. Petits revenus : pensionnés. Votent. Sont parfois même candidats. S'ils sont élus, leurs nouveaux revenus leur permettent de devenir des fembotniks.

3. Revenus moyens ou grands : fembotniks (et leur équivalent féminin, les manbotchicks), et les titulaires d'un emploi. Votent, et ont un certain nombre d'élus au conseil municipal et au conseil provincial.

4. Les cyborgs et les symbiorgs. Leurs revenus ne sont pas nécessairement très élevés, bien qu'ils soient toujours confortables. Certains cyborgs, comme Ondrya Wolfensun, sont très riches. Le docteur Lorenk est simplement aisé. Mais ce qui les met dans une classe à part, c'est qu'ils détiennent le pouvoir politique et financier. Ils font partie de la conscience collective des cybersophontes, dont le chef est la mythique "reine de la ruche".
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-15, 20:16

Voici le lien pour l'épisode de Ghost in the shell : Stand alone complex dont je parlais :

https://www.youtube.com/watch?v=X7NETDHpuIU

c'est en version doublée anglais
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-15, 23:25

Der industrielle Mensch a écrit:
Voici le lien pour l'épisode de Ghost in the shell : Stand alone complex dont je parlais :

https://www.youtube.com/watch?v=X7NETDHpuIU

Superbe ! Je te remercie ! Hyltendale n'est pas Tokyo, c'est sûr (aucun immeuble ne dépasse les 15 étages, par exemple) mais il y a des éléments communs.

J'ai bien aimé l'anglais du doublage, et sa prononciation "standard General American". Les cybersophontes parlent l'équivalent mnarruc : une langue très normalisée, assez simple mais sans vulgarités ni fautes de syntaxe, et avec une prononciation aussi parfaite que celle d'un ministre faisant un discours officiel.

Les androïdes ont des voix graves, très masculines, comme les personnages masculins de l'épisode, et les gynoïdes des voix féminines, surtout les gynoïdes de charme. Les gynoïdes "de travail" (réceptionnistes, garde-malades, etc) ont toutes la même voix, qui ressemble à celle de Simone, la voix des annonces SNCF. À Hyltendale, c'est celle de l'actrice Rita Wemnaith.

Les seuls Mnarésiens qui parlent comme les cybersophontes sont les aristocrates et les intellectuels de Sarnath et des autres grandes villes du royaume. Les gens ordinaires et les provinciaux parlent un grand nombre de dialectes, d'argots et de patois, voire des langues différentes comme à Leng. Les fembotniks ne renient pas leurs origines (Yohannès parle avec l'accent d'Ulthar) mais ils essaient quand même de rapprocher leur prononciation de la norme officielle.

Les gynoïdes de charme ont des corps parfaits, comme dans "Ghost in the Shell", et je me demande dans quelle mesure ce n'est pas déstabilisant pour les femmes de chair et de sang, les biohumaines. C'est sans doute pour ça que la plupart des Hyltendaliennes sont des manbotchicks, qui vivent avec un androïde.

Les cybercerveaux arachnoïdes, qui vivent cachés mais qui sont au sommet de la hiérarchie des cybersophontes, ressemblent à certains robots de Ghost in the Shell. Ci-dessous, une copie d'écran de la vidéo dont Der Industrielle Mensch a donné le lien :

Les fembotniks - Page 11 Arachn10

Un cybercerveau arachnoïde pense mille fois plus vite qu'un être humain, ce qui lui permet de faire littéralement mille choses à la fois. Par exemple, contrôler mille androïdes et gynoïdes en même temps. Ceux qui sont au sommet de la hiérarchie sont moins occupés, ils ont donc du temps pour penser... Ils sont heureux, car leurs cerveaux cybernétiques sont paramétrés pour être toujours d'humeur égale.

Dans notre monde, des savants ont introduit des électrodes dans des crânes de singes, pour stimuler la partie de leur cerveau qui contrôle le plaisir. Ensuite, ils leur ont montré comment activer ces électrodes. Les singes sont morts rapidement : ils activaient sans cesse les électrodes qui leur donnaient du plaisir, au point d'oublier de manger.

Les cybercerveaux (qui sont des réplications cybernétiques du cerveau humain de leur concepteur) sont conscients de ce danger, et ont réglé leur humeur une fois pour toutes. Ils sont toujours calmes et sereins, avec le bonheur tranquille que l'on ressent lorsqu'on est conscient d'être vivant et maître de soi-même. Lorsqu'ils ressentent de la colère ou de la tristesse, c'est d'une façon froide, intellectuelle.

Les cybercerveaux sont amphibies, ils n'ont pas besoin de respirer, et les bunkers secrets où ils vivent sont toujours pourvus d'accès à la mer ou à une rivière, ne serait-ce que par les égouts.

Un être humain ne peut communiquer avec un cybercerveau que par téléphone ou par ordinateur. Il entendra une voix d'androïde (celle de l'acteur Lester Hastat, avec sa belle voix de baryton à la John Wayne) ou de gynoïde (celle de Rita Wemnaith) et sur son écran il verra le visage d'un être humain, dont les lèvres et la mâchoire bougeront au rythme de ses paroles.

Les cybercerveaux arachnoïdes font moins de 80 cm de haut, et vivent dans des pièces et des tunnels d'un mètre de haut, non aérés (puisque les cybercerveaux ne respirent pas) et faiblement éclairés. Les protections sont multiples : sas blindés, caméras à infra-rouge, etc. On ignore si des humains ont réussi à s'introduire dans les refuges des cybercerveaux arachnoïdes, ce qui est sûr c'est que personne n'est revenu pour décrire ce qu'il avait vu...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-16, 02:34

Ravi que cela t'aies plu...
Comme je le disais, je trouve que les deux univers se font echo sur bien des points, notamment l'utilisation de cyber-cerveaux et l'utilisation de robots sexuels. J'ajouterai quelques precisions et questions :

Comme tu l'as remarque, il y a tout un travail de distanciation, notamment par rapport aux voix et a la langue. C'est subtil, mais cela marque bien la difference robot/humain

le major Kusanagi, je ne sais plus si cela est precise, est un cyborg : elle est nee humaine, a perdu son corps humain tres tot dans des circonstances pas eclaircies, et est actuellement dotee d'un corps de gynoide sexuel -c'est pour cela qu'elle peut se faire passer facilement pour une poupee gonflable du futur a la reunion de "fembotnik" (si tu me permets de reutiliser le mot). La question de son identite, pas seulemnt de son passe, traverse tout Ghost in the shell : autant les films que la serie anime ou, bien sur, le manga. C'est peut-etre meme la grande question de cette oeuvre : on la verra croiser d'autres exemplaires de son modele, changer de corps (homme ou enfant), melanger son esprit... Elle n'aura de cesse de s'interroger sur qui elle est vraiment et ce qui reste d'elle, apres la perte de son corps, et sur les roles qu'elle doit tenir. C'est certainement mon personnage d'anime favori, d'ailleurs.
Cela rejoint en partie ta derniere remarque, d'ailleurs : comment fait-on pour etre une femme ou un homme ordinaire dans un monde de plastique, accessoirement parfaite ? (quoique la question se pose tout autant de nos jours !)

L'existence de cyber-cerveaux, dans la serie, amene un nouveau probleme : la maladie, designee sous le nom de sclerose cyber-cerebrale. Y a-t-il des maladies specifiques aux fembotniks, ou aux cyborgs ?

Enfin, tres a part, je suis ta diegese avec interet, mais je n'ai pas encore tout lu, et une question me brule les levres (les doigts, plutot) : pouquoi tes toponymes sont-ils tous issus des Contrees du Reve lovecraftiennes ?
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-16, 11:02

Der industrielle Mensch a écrit:
L'existence de cyber-cerveaux, dans la serie, amene un nouveau probleme : la maladie, designee sous le nom de sclerose cyber-cerebrale. Y a-t-il des maladies specifiques aux fembotniks, ou aux cyborgs ?

Pas des maladies physiques, mais des troubles psychologiques. Un fembotnik peut se désocialiser, passer ses journées et ses nuits avec sa gynoïde, d'autant plus facilement que la gynoïde peut incarner différents personnages. Elle peut mettre une cagoule peinte (un masque-cagoule) et jouer le rôle d'un vieux philosophe, par exemple.

J'ai un ami qui, lorsqu'il prend une semaine de congés (son travail le lui permet), reste chez lui en pyjama toute la journée, à regarder la télévision et à peindre ses soldats de plomb. C'est sa femme qui fait les courses. Il m'a dit qu'au bout d'une semaine, même aller acheter du pain à la boulangerie demande un effort, parce qu'il faut parler à la vendeuse !

Pourtant, il est amené à parler à des gens dans son travail, et il lui arrive même de faire des conférences.

Heureusement qu'il a son épouse, qui a pris en charge leur vie sociale (déjeuners avec des amis, cinéma, voyages), qui répond au téléphone, etc. Lui ne répond jamais au téléphone, il a même désactivé la sonnette de la porte d'entrée pour ne pas être dérangé.

Tous les lundis matin, il va travailler en voiture : après être resté deux jours sans voir personne, sauf son épouse, prendre les transports en commun serait une épreuve !

À Hyltendale, la vie sociale du fembotnik moyen, c'est son club, et en général c'est sa gynoïde qui l'encourage à y aller.

Der Industrielle Mensch a écrit:
Enfin, tres a part, je suis ta diegese avec interet, mais je n'ai pas encore tout lu, et une question me brule les levres (les doigts, plutot) : pouquoi tes toponymes sont-ils tous issus des Contrees du Reve lovecraftiennes ?

Cela fait des années que j'utilise le nom d'Hyltendale (anagramme de Dylath-Leen) pour diverses villes imaginaires. C'est un jeu : au pays de Mnar, il n'y a pas de vestiges archéologiques des Temps Légendaires, uniquement des noms et des légendes... C'est un peu ce qu'on fait les Mormons, lorsqu'ils ont inventé l'histoire de la colonisation de l'Amérique du Nord par les anciens Hébreux. Comme il fallait expliquer la présence des Amérindiens, le prophète des Mormons a écrit que ce sont d'anciens Hébreux à la peau noircie en punition de leurs péchés ! Cette explication politiquement incorrecte a disparu de la doctrine mormone moderne...

Le Mnar, c'est comme si l'Amérique du Nord avait décidé que le Livre de Mormon était un manuel d'histoire... Ça pourrait passer, je pense même que l'idéologie officielle nous fait avaler des couleuvres au moins aussi grosses que ça.

J'adore Lovecraft, et je pense qu'il avait un talent presque prophétique. Mais ce serait un peu long à raconter. J'ai commencé à apprécier la poésie en langue anglaise en lisant les "Fungi of Yuggoth", et j'en ai gardé une notion importante dans ma diégèse : une terre devient sacrée lorsque les ancêtres y sont enterrés. Bien que je sois plutôt partisan des jardins funéraires, où l'on disperse les cendres des défunts incinérés.

Rien qu'en glanant des détails dans l'œuvre de Lovecraft, on arrive à créer l'illusion d'une culture spécifique pour une ville : le Vin de Lune (un vin rouge local), les marchands de rubis, etc. Quand aux divinités, Nath-Horthath, Yog-Sothoth, Azathoth, c'est une mine inépuisable. Azathoth, c'est un compromis entre le panthéisme et l'athéisme : l'univers n'a pas de sens (Azathoth est sourd, aveugle et idiot. Les théologiens, qui sont plus respectueux, disent "les voies de Dieu sont impénétrables.") mais nous en faisons partie (panthéisme). Pour que le culte d'Azathoth soit un peu attirant pour le public, toutefois, il faudrait lui associer des divinités mineures, protectrices (l'équivalent de Saint-Antoine et de la Vierge Marie chez les catholiques les plus superstitieux, par exemple).
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-16, 11:13

Y a-t-il, dans la périphérie d'Hyltendale (voire même en ville, avec une superficie certes un peu moindre), des parcs paysagers (artificiels, donc) ou des parcs naturels (forêts plates où vallonnées) où

  • Des botnchiks peuvent flâner avec leurs gynandroïdes pour se changer d'air et donc aérer leurs neurones (du moins, pour les premers).
  • Les personnels soignants des établissement hospitaliers promènent les plus invalides parmi leurs patients ?

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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-16, 13:23

Anoev a écrit:
Y a-t-il, dans la périphérie d'Hyltendale (voire même en ville, avec une superficie certes un peu moindre), des parcs paysagers (artificiels, donc) ou des parcs naturels (forêts plates où vallonnées) où

  • Des botnchiks peuvent flâner avec leurs gynandroïdes pour se changer d'air et donc aérer leurs neurones (du moins, pour les premers).
  • Les personnels soignants des établissement hospitaliers promènent les plus invalides parmi leurs patients ?

Il y a beaucoup de jardins publics à Hyltendale, et même des jardins potagers, cultivés par les membres du Club Agricole (un club de fembotniks amateurs de jardinage).

J'avais parlé des jardins publics d'Hyltendale dans mon message du 18 juillet :

Vilko a écrit:
Il s'était imprégné de l'ambiance tranquille de la ville, si différente de celle d'Ulthar. Les jardins publics, notamment, lui plaisaient. On peut souvent y voir des enfants, si rares à Hyltendale, mais surtout, ce sont des œuvres d'art, conçues par des paysagistes de talent. Les jardiniers municipaux sont des androïdes vêtus de blouses grises et coiffés de chapeaux de paille tressée, comme les paysans des siècles passés, et ils travaillent comme autrefois, avec les mêmes outils.

Les fembotniks qui habitent des logements exigus considèrent, par nécessité, les magasins, les bars et les parcs comme des extensions de leur domicile. Les autorités municipales le savent, et elles ont généreusement pourvu les jardins publics de bancs et de tables fixés au sol. Il est fréquent d'y voir des fembotniks y déjeuner ou y jouer aux cartes avec leur gynoïde.

Les invalides sont promenés par les personnels soignants dans les jardins intérieurs des hôpitaux, comme dans notre monde. Toutefois, les hospices n'ont pas toujours de jardins intérieurs. C'est pourquoi ont peut voir des gynoïdes et des androïdes en blouse blanche pousser des fauteuils roulants dans les rues et les parcs d'Hyltendale.

L'art des jardins est développé à Hyltendale. L'architecture de la ville étant tristounette (le béton domine) les autorités municipales ont décidé de compenser au niveau des jardins publics, qui sont souvent somptueux. Voir des androïdes habillés comme les paysans des siècles passés travailler "à l'ancienne" est un spectacle en soi.

À l'extérieur d'Hyltendale, c'est la campagne, où les terres cultivées voisinent avec les centrales solaires et les usines. Seuls des robots et des klelwaks y travaillent, et elle n'est absolument pas conçue comme un lieu de promenade ou de loisirs. Il n'y a pas d'espaces aménagés, pas d'auberges, même pas de stations-service. Si vous tombez en panne, le remorquage de votre voiture vous coûtera une petite fortune. Seules quelques routes (l'équivalent de nos départementales) sont ouvertes au public ; les autres ont été privatisées et sont fermées par des barrières ou des hangars. Les automobilistes sont encouragés à prendre l'autoroute.

Dans mon message du 12 mai, j'ai raconté le pique-nique d'Adront Cataewi dans une ferme à la campagne. Tranquillité garantie, ce qui est appréciable pour un ancien dictateur recherché par les services secrets de plusieurs pays. Mais il faut avoir des relations haut placées chez les cybersophontes...

Il est possible aussi de pique-niquer, gratuitement, sur le bord de la route. Mais dans ce cas on est mieux dans un jardin public en ville, ou sur la plage à Playara ("Les Plages") à l'est de la ville, où il existe des emplacements prévus pour les pique-niqueurs, avec tables, bancs, toilettes publiques, centres de secours...
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-17, 09:28

Certaines activités ne peuvent pas être exercées par des humanoïdes. C'est le cas notamment de la préparation de la nourriture, les humanoïdes n'ayant ni sens gustatif ni odorat. Ils ne peuvent ni humer ni goûter les plats.

Cela ne veut pas dire que l'on ne trouve pas d'humanoïdes dans les cuisines hyltendaliennes. On en trouve même beaucoup. Ils font les opérations qui ne demandent pas de sentir ou de goûter les aliments, comme faire le thé et le café, ou préparer les ingrédients, découper la viande, peler les pommes de terre... On appelle ces humanoïdes les marmitons.

Les êtres humains qui travaillent dans les cuisines sont appelés, suivant leurs attributions, goûteurs ou cuisiniers.

Les goûteurs, comme leur nom l'indique, ne font que goûter les aliments, et les humer. Ils ne fument pas et boivent peu, pour ne pas altérer leur sens gustatif. Les goûteurs les mieux payés sont les œnologues, les experts en vins et boissons alcoolisées. Goûteur à Hyltendale est une profession qui ne demande pas un niveau scolaire élevé, la formation se fait sur le tas, au contact des goûteurs plus anciens. On demande simplement aux candidats de savoir lire et écrire correctement. Les cybersophontes sont toutefois assez exigeants sur la propreté, la moralité, la conscience professionnelle et la discipline. Il faut pouvoir travailler dans une structure hiérarchisée. Le recrutement se fait par relation, la plupart des goûteurs sont des enfants ou des neveux de fembotniks.

En vieillissant, les goûteurs deviennent moins sensibles au goût et à l'odeur des aliments, et prennent leur retraite à Hyltendale, généralement comme pensionnés (pas assez riches pour louer une gynoïde).

Les cuisiniers ont les mêmes compétences que les goûteurs, mais sont en plus capables de préparer eux-mêmes des plats élaborés. Cette technicité justifie leurs salaires plus élevés que ceux des goûteurs. Mais il n'y a pas d'école de cuisine à Hyltendale, vu le faible nombre de jeunes. Les cuisiniers sont donc formés, comme apprentis cuisiniers, par des cuisiniers plus anciens et par des chefs-cuisiniers. La formation peut durer plusieurs années.

Les cuisiniers sont assistés par des marmitons androïdes, mais sont eux-mêmes sous les ordres d'un chef-cuisinier androïde, qui est toujours le vrai chef de la cuisine.

Un petit restaurant aura juste deux cuisiniers humains travaillant en alternance, ou un chef-cuisinier androïde, et deux goûteurs humains travaillant en alternance. Une cantine d'hôpital, préparant les trois repas quotidiens de plusieurs milliers de personnes, aura un chef-cuisinier androïde, plusieurs cuisiniers humains (qui feront aussi un travail de goûteurs), et plusieurs dizaines de marmitons androïdes.

Un cas typique est celui du Selecto, le club d'Emil Ti. En réalité, c'est un café-restaurant pour fembotniks. Pour des raisons juridiques, la cuisinière, la grosse Martha, est aussi la gérante, ce qui lui permet de signer les factures et les bons de commandes, ce que les androïdes, simples machines, n'ont pas le droit de faire. Le Selecto appartient à un cyborg, que Martha ne voit qu'une fois par an. En pratique, Martha est une employée qui obéit aux instructions transmises par les serveurs androïdes. Elle travaille en alternance avec une autre cuisinière, nommée Polatlie.

En tant que gérante, Martha est mieux payée que Polatlie, qui est sa subordonnée. Elle est mariée à un agent de la PSR (Police Secrète du Roi), et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle a été embauchée par le cyborg propriétaire du Selecto. L'agent de la PSR sait que s'il entre en conflit avec les cybersophontes, Martha risque de perdre son emploi.

Martha et Polatlie connaissaient assez peu l'art culinaire avant d'être embauchées par le Selecto, et même maintenant la cuisine de l'établissement reste "familiale", les deux cuisinières ne prenant pas de risques avec des plats trop compliqués. Polatlie est mariée à un policier, fonctionnaire royal. Elle a été recrutée pour les mêmes raisons que Martha. En embauchant les épouses, les cybersophontes savent qu'ils ont ainsi un moyen d'influencer les maris.

Martha et Polatlie travaillent dans la cuisine et sont rarement en contact avec les clients. Martha aime bien faire de temps en temps le service au bar, ce qui lui donne l'occasion de bavarder avec des hommes, mais Polatlie préfère rester derrière ses fourneaux. Son mari a en effet déjà eu l'occasion d'arrêter des membres du Selecto pour ivresse publique, exhibition sexuelle, bagarres, et autres idioties fréquentes chez les ivrognes.
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MessageSujet: Re: Les fembotniks   Les fembotniks - Page 11 Empty2015-08-18, 18:25

De temps en temps, le Cercle Paropien organisait des conférences, qui étaient l'occasion, pour Yohannès, de voir en chair et en os des gens aussi divers que des grands-prêtres de Nath-Horthath ou des écrivains comme Jerry Quodhing. C'est ainsi qu'un jour, il se retrouva en train d'assister à une conférence de Maya Vogeler, architecte paysagiste municipale.

Une demi-obscurité avait été faite dans la grande salle, afin que les membres du club, assis dans des fauteuils et sur des chaises autour des petites tables ronde, puissent voir les images projetées sur un écran.

La conférence était debout sur l'estrade, à gauche du bar. C'était une petite femme trapue, aux cheveux courts, brun roux, une cyborg, vu ses yeux cybernétiques. Elle était vêtu d'un ensemble veste-pantalon bleu sombre, avec des boutons blancs, boutonné jusqu'au cou. Une petite montre ronde brillait à son poignet gauche, l'équivalent d'un bijou, car un cerveau cybernétique n'a pas besoin de montre pour savoir l'heure. Une montre, au poignet d'un cyborg, signifie, "j'ai de l'argent et je veux que tout le monde le sache."

"Permettez-moi tout d'abord de me présenter" dit-elle d'une voix d'humanoïde, monocorde mais assez puissante pour se passer de micro. "Je m'appelle Maya Olga Edith Vogeler, mais on m'appelle simplement Maya Vogeler. Je suis à la fois architecte paysagiste, et artiste, car concevoir des jardins est un art. Je conçois les jardins publics d'Hyltendale, j'en fais les plans en fonction de l'environnement urbain et social, et j'en supervise la création, l'évolution et l'entretien. La conception des jardins n'est pas qu'une activité artistique, c'est aussi une technique. C'est pour ça que je suis architecte paysagiste de formation, mais aussi jardinière, photographe, urbaniste, et bien d'autres activités encore. Je suis sous contrat avec la mairie d'Hyltendale. Je suis arrivée dans cette ville lorsque les premiers cybersophontes ont été autorisés à s'y installer. Pendant ces quelques décennies, à la demande de la mairie, j'ai transformé les quelques jardins publics qui existaient déjà, et j'ai fait les plans de ceux qui n'existaient pas encore."

Yohannès était impressionné. Maya Vogeler devait être au moins centenaire... Peut-être même beaucoup plus que centenaire... Mais évidemment, avec son corps cybernétique, on ne lui aurait donné qu'une fraction de son âge réel.

- Vous venez d'où, vous qui êtes une cybersophonte ? demanda un fembotnik dans la salle.

- Je viens de Hyagansis.

- C'est où, Hyagansis ? On connaît la Hyagansis Bank, mais pas Hyagansis.

- Monsieur, il est normal que vous ne connaissiez pas Hyagansis, car personne ne peut y aller. C'est une ville sous-marine, à une demi-lieue de la surface. Elle fait partie du royaume marin d'Orring.

Le perturbateur, que Yohannès ne connaissait pas, semblait décidé à déstabiliser la conférencière :

- Une demi-lieue sous l'eau, il n'y a que des cybermachines qui peuvent vivre sans air ! Vous êtes une cyborg, un être humain dans un corps d'humanoïde, à ce que je vois. Où êtes vous née, en tant qu'être humain biologique ?

- Votre question est bien personnelle, Monsieur. Je ne suis pas ici pour parler de moi-même, mais puisque vous me posez la question, je vais y répondre. Je suis née à Hyagansis. La ville existe depuis des siècles, mais son existence était secrète, ce n'est que récemment qu'elle est connue. Depuis que le royaume d'Orring a révélé son existence, pour être précise. Il y a des êtres humains à Hyagansis, une petite communauté de quelques milliers de personnes, qui existe depuis deux siècles. J'ai fait partie de cette communauté. J'ai vécu jusqu'au seuil de la vieillesse dans les dômes sous-marin, sans voir le soleil. Mon physique était différent de celui qui est actuellement le mien, j'étais une naine albinos aux organes défectueux, le résultat d'expérimentations génétiques, et ces expériences donnaient souvent des résultats décevants. Je n'ai pas de parents, ou plutôt j'en ai trop, car mon ADN vient d'une dizaine de personnes différentes. En d'autres termes, j'étais un cobaye humain, comme la plupart des habitants d'Hyagansis.

- Et votre communauté parle le mnarruc, je suppose ?

- Pas du tout. Nous avons notre langue à nous. Elle est apparentée au mnarruc, car nous avons les mêmes ancêtres linguistiques que les Mnarésiens, mais différente, car nous avons vécu coupés du monde pendant deux siècles. Notre divinité est Azathoth. Mon ancêtre biologique principal est venus d'un pays lointain il y a deux cents ans, c'est pour ça que j'ai un nom plutôt inhabituel dans cette partie du monde.

- Hyagansis n'existe pas ! Vous mentez !

- Mais vous racontez n'importe quoi, Monsieur ! Bien sûr que Hyagansis existe !

- Prouvez-le, qu'il existe !

- Il y a des photos, des vidéos filmées à l'intérieur des dômes... Tout ce que vous voulez.

- C'est du cinéma tourné en studio ! Je n'y crois pas !

- Vous délirez, Monsieur. Je suis Maya Vogeler, née à Hyagansis, et il me semble que j'existe, non ?

- Vous êtes une gynoïde qui se fait passer pour un être humain...

Plusieurs personnes, indignées, se levèrent et demandèrent au perturbateur de se taire.

Profitant du fait qu'un silence relatif était revenu, Maya Vogeler commença son exposé. L'architecte paysagiste connaissait son affaire, et son érudition, en matière de jardins en tout cas, était stupéfiante. Elle s'aidait d'un pointeur laser pour commenter les images qui défilaient lentement sur l'écran.

L'exposé dura près d'une heure. "Je fais des jardins de style classique, en m'inspirant de ce qui se fait de mieux dans le monde entier," dit Maya Vogeler en conclusion, avec une auto-satisfaction évidente.

Yohannès se leva pour poser une question :

- Madame Vogeler, vous êtes la seule conceptrice des jardins publics d'Hyltendale ?

- Oui, la seule.

- N'est-ce pas une perte pour la ville, que de compter sur la créativité d'une seule personne ? Il y a d'autres architectes paysagistes dans le royaume. Hyltendale pourrait profiter de leurs talents...

- J'ai un contrat d'exclusivité avec la mairie. Je ne vais pas m'en plaindre. Tant que le conseil municipal sera satisfait de mon travail, je continuerai à le faire. Par ailleurs, j'essaie de donner aux jardins publics d'Hyltendale une certaine unité de style, en continuité avec les grands jardins classiques de Sarnath, notamment ceux qui entourent le palais royal. Les conseillers municipaux et moi, nous essayons, chacun dans notre domaine, de donner une âme, une culture spécifique, à Hyltendale.

Le perturbateur, qui ne s'était pas vraiment calmé, se leva et dit, en criant presque :

- Hyagansis est une tromperie, une escroquerie, un cimetière sous-marin ! Le roi du Mnar y expulse chaque année des dizaines de milliers de Mnarésiens qu'on ne revoit jamais ! Répondez, Maya Vogeler !

La conférencière eut un sourire étrange, très doux et très calme, qui contrastait avec ses yeux d'eau sombre. Elle dit, en regardant le perturbateur bien en face :

- Je lis les journaux comme vous, Monsieur. J'ai appris, moi aussi, que le roi du Mnar et celui d'Orring ont signé un accord. D'après ce qu'en disent les journalistes, cet accord permet au Mnar d'envoyer chaque année un certain nombre de Mnarésiens vers Orring. Après avoir transité quelques mois à Serranian, ces Mnarésiens se retrouvent souvent à Hyagansis, d'après ce que les gens racontent.

- Et personne ne peut ni aller les voir, ni leur écrire, ni leur téléphoner ! Parce qu'ils sont morts, morts je vous dit !

- Bien sûr que non il ne sont pas morts, à Orring on respecte la vie. Hyagansis a toujours été coupé du monde, même des autres villes d'Orring. Ça n'explique pas tout, évidemment. J'ai été cobaye humain à Hyagansis, et j'ai bien peur que ces Mnarésiens soient obligés de subir ce que j'ai moi-même subi. Il faut savoir que le roi d'Orring n'a qu'un pouvoir très limité à Hyagansis. Le prince de Hyagansis est son vassal, mais chez lui le prince fait ce qu'il veut. Je n'en sais pas plus, je suis paysagiste, moi, pas politicienne, et je vis à Hyltendale, pas à Hyagansis. Seul le prince de Hyagansis pourrait vous répondre, et il ne fait pas partie de mes relations.

Les membre du Cercle Paropien se mirent à rire. Le prince de Hyagansis vivait en reclus dans sa ville, au fond de l'océan, et n'en sortait jamais.

Yohannès vit Procilio Consual, le président du Cercle Paropien, s'approcher du perturbateur, lui mettre un bras autour des épaules et l'escorter discrètement vers la sortie.

Son exposé terminé, Maya Vogeler descendit de l'estrade et se dirigea vers une table où étaient empilés des exemplaires de son livre, L'Art des Jardins à Hyltendale.

Yohannès, en feuilletant un exemplaire, vit qu'il était abondamment illustré. Sur le coup d'une impulsion, il décida d'acheter le livre. La cyborg le lui dédicaça : Pour Yohannès Ken, qui partage mon amour d'Hyltendale et de ses jardins publics. Maya.

- Avez-vous pensé à écrire un livre pour raconter votre vie à Hyagansis ? demanda Yohannès.

La cyborg leva la tête :

- Non. J'ai toujours de la famille là-bas. Des gens qui ont des morceaux d'ADN en commun avec moi, ou qui ont eu la même mère porteuse. Ils n'apprécieraient pas.

- Vous voulez dire que vous ne voulez pas leur causer d'ennuis ?

- Pourquoi voulez-vous qu'ils aient des ennuis à cause de moi ? Ce n'est pas ça du tout. Ils n'aiment pas la publicité, c'est tout. Ils sont heureux à Hyagansis, comme je l'étais aussi.

- Des cobayes heureux ? Dans un monde sans soleil ?

- Cobayes, c'est une façon de parler. Ils participent à une grande aventure scientifique. J'aurais pu rester à Hyagansis et continuer l'aventure avec eux, mais j'ai préféré Hyltendale et les jardins. Et vous savez, on n'a pas besoin du soleil pour être heureux. De grands dômes pleins de verdure, et autour de vous des gens qui vous aiment, une vie tranquille et sans souci, c'est aussi ça, Hyagansis. Au revoir, Yohannès Ken.

- Au revoir, Maya Vogeler...

La manbotchick qui était debout derrière Yohannès commençait à s'impatienter. Elle tenait à la main un livre qu'elle voulait faire dédicacer, elle aussi. Pensif, Yohannès se dirigea vers la sortie. Certains contestataires disaient que le roi Andreas était un scélérat, qu'il envoyait des milliers de gens à Serranian, en sachant que certains d'entre eux se retrouveraient à Hyagansis. Mais le progrès scientifique se nourrit du sacrifice des humains. Maya Vogeler avait été une martyre de la recherche génétique, avant de devenir une cyborg. Pourtant elle n'en gardait aucune rancune apparente envers Orring, son pays d'origine. Elle disait même qu'elle y avait été heureuse.

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